Zébrés

34 ; Il a le droit de savoir

Un secret peut en cacher un autre ...

______________________________

Tina

Allongée en travers du lit, les mollets à l'air libre, j'ouvre progressivement les yeux. De cette façon, je me rends compte de deux choses : la pluie a repris ses droits et Nolan a disparu de la chambre. Son fauteuil s'est volatilisé avec lui. Paresseuse, je m'étire longuement avant de retomber mollement sur le matelas. Nue sous les draps, je m'enveloppe dans la couette, ramenant mes pieds au chaud.

Au loin, j'entends deux voix masculines aux accents celtiques. Ainsi, je devine que les deux frères s'expliquent, calmement au premier abord. Heureuse de ce simple constat, je m'allonge en diagonale, afin de poser ma joue sur l'oreiller de mon petit ami. Hier soir, je doutais sur l'idée qu'il me laisse dormir avec lui. Finalement, il ne s'y est pas opposé du tout, au contraire.

Avec mollesse, j'enfile un pull en laine appartenant à Nolan. Sa couverture à carreaux orne notre lit, semblant nous protéger des dangers extérieurs. Alors que je me vêtis d'un simple short de nuit, la porte s'ouvre. De cette manière, je découvre Nyle, le visage blême, se dirigeant vers l'extérieur ainsi que son frère, entrant dans la pièce. Une expression on ne peut plus sérieuse étire ses traits. Instantanément, ce sourire matinal s'évapore de mes lèvres.

— Tout va bien ? je m'inquiète, m'avançant dans sa direction.

— Pourrais-tu m'emmener à l'aérodrome ? me questionne-t-il d'une voix grave.

Instinctivement, j'acquiesce, m'habillant afin de sortir. La situation paraît actuellement plutôt grave donc, je ne prends pas le temps de lui demander plus d'explications. Pour une fois, il me les donne quand même :

— Attends, murmure-t-il, fourrageant ses cheveux.

Je me fige dans mes mouvements en le dévisageant sans comprendre. Dehors, l'averse s'accentue, provoquant un bruit sourd ici. À cela s'ajoute une obscurité étrange en pleine journée.

— Qu'y a-t-il ?

— J'aimerais me rendre là-bas pour m'expliquer avec quelqu'un, amorce-t-il prudemment.

Je le rejoins en quelques pas puis m'accroupis devant lui. Ses mains enserrent les miennes avec appréhension, il me paraît particulièrement anxieux. Malgré tout, il se montre enclin aux confidences alors je me concentre sur ses paroles, espérant enfin comprendre l'origine de tous ses maux.

— Tu te souviens lorsque je t'ai parlé de Ceallach ? Je t'ai dit qu'il souhaitait se marier. Il se trouve que sa copine était enceinte. Il ne l'a jamais su, continue-t-il difficilement. Eryn m'en a tellement voulu... Nous nous entendions très bien avant l'accident. Seulement, dès qu'il est décédé, elle a catégoriquement refusé de m'adresser la parole.

Ses sourcils se froncent, comme s'il se souvenait de cette époque révolue. Pendue à ses lèvres, me voilà sur le point de découvrir le fin mot de toute cette histoire.

— Par vengeance, tristesse et colère, elle a trafiqué mon parachute pour que je vive la même mort que Ceallach. Je le sais puisqu'elle est venue me voir à l'hôpital. J'en étais surpris, j'imaginais qu'elle souhaitait que nous reprenions contact. À la place, elle a posé un bout de corde sur mon lit puis elle est partie. Je n'ai pas tardé à comprendre qu'il s'agissait de ce qui avait manqué à mon parachute pour s'ouvrir.

Coupable de la mort de son meilleur ami. Trahi par son amie. Présentement, je conçois mieux sa difficulté à passer outre ces épisodes tragiques. De plus, cela explique qu'il se soit tu si longtemps à ce sujet. En effet, cela aurait signifié l'accuser de tentative d'homicide. Je suppose que, pour l'hommage de Ceallach, il n'en a jamais rien fait.