37 ; Attends-moi

1.1K 148 22
                                    

Plusieurs semaines plus tard

Nolan

Cette salle d'attente m'angoisse. Le premier rendez-vous date d'une quinzaine de jours et ils m'ont parus extrêmement longs. À mes côtés, Tina feuillette distraitement un magazine. Je sais pertinemment qu'elle ne le lit pas puisqu'elle déteste ce genre de littérature. Preuve en est qu'elle prévoit de monter une bibliothèque dans la pièce exiguë qui lui a servi de chambre auparavant.

L'entrevue qui se profile bouleversera tout, nous en avons conscience tous les deux. L'impatience prend place dans mes veines, amenant mon genou à tressauter. J'en viens même à me ronger les ongles, ce qui ne m'arrive jamais de coutume. Ma petite amie demeure silencieuse, visiblement en proie à ses questionnements incessants. Son nez surmonté de ses lunettes se retrousse lorsque la porte s'ouvre enfin. Un patient en sort puis le médecin nous signifie d'entrer. Presque timidement, je les précède, découvrant à nouveau ce bureau aux étagères remplies de bouquins scientifiques. Après un court entretien, je découvre enfin ce que j'espérais tant.

En acier, la prothèse reproduit la forme de ma jambe habituelle. La pulpe de mes doigts frôle le métal froid. Je l'ai conçue avec le prothésiste lors du premier rendez-vous. Ainsi, je m'assois sur un fauteuil du bureau, en face de deux barres parallèles. Avec son aide, je la positionne correctement. Par la suite, il prend le temps de m'expliquer son fonctionnement. Au bout de quelques minutes, je teste différents mouvements. Concentré, je plie et tends mon nouveau genou. Par la suite, j'ai du mal à réaliser ce qu'il se passe.

En effet, le docteur se place entre les deux barreaux m'incitant à me lever. Fébrile, j'hésite durant plusieurs secondes. Fermement cramponné aux accoudoirs de mon siège, mon rythme cardiaque s'accélère déraisonnablement. La panique monte en moi, m'immobilisant.

Soudainement, Tina remplace l'homme devant moi. Son chignon flou laisse échapper quelques mèches brunes sur son visage. Ses lunettes semblent agrandir ses iris. Ma respiration se coupe et elle m'offre un sourire autant sincère que nerveux. Puis, elle me tend ses mains. À ses côtés, le docteur m'encourage à me lancer. Il s'approche de moi, assurant ma sécurité si je venais à défaillir.

Par conséquent, je lâche un long soupir avant de me soulever avec la force de mes bras. Instinctivement, je me raccroche aux barres, manquant de confiance en cette jambe de fer. Au loin, j'entends la voix de ma moitié, m'encourageant. Tremblant de pied en cap, je demeure debout, sans oser avancer d'un iota. À la place, je pose ma main au plus près de celle de la Française. Son pouce cajole mes phalanges puis elle recule.

Machinalement, j'effectue une enjambée afin de la rejoindre. Effaré, je me rends compte que mes réflexes réapparaissent d'eux-mêmes. Tina s'éloigne encore, manquant de trébucher dans sa maladresse. Tenant à lui prouver ma force, je continue de progresser jusqu'à atteindre la fin du parcours. Elle aurait pu se rendre à cet instant-ci. Seulement, elle croit bien plus en moi puisqu'elle ne s'arrête qu'au mur, à un mètre d'où je me trouve. Essoufflé, je l'implore silencieusement, en vain.

— Attends-moi, je murmure, la peur prenant à présent le dessus.

Maintenant, je n'ai plus de sécurité. Alors, elle m'ouvre ses bras, comme si elle comptait me rattraper au cas où je tomberais.

— Miss, amorcé-je.

Cependant, à l'instant où je croise son regard plein d'espoir, je ne parviens pas à m'amuser d'elle. Après tout, il est évident qu'elle choirait avec moi. Pourtant, elle s'en fiche. Elle cherche uniquement à me soutenir à son niveau. Rien que pour cela, je lâche les barrières. Perdant l'équilibre, je bascule en avant, me rattrapant au mur de part et d'autre de son visage. Stupéfaite, ses yeux s'écarquillent tandis qu'elle s'empare de ma taille dans l'espoir de me secourir. Passé le moment de choc, je me positionne correctement sans m'éloigner d'elle.

ZébrésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant