Depuis hier que j'ai vu Fabien, je ne cesse de penser à ce qu'il s'est passé avant que je ne me sauve. Je m'en veux d'être parti ainsi. Mais après ce que m'a dit Thérèse, j'essaie de me persuader que c'était la meilleure solution.
Je repense à ses larmes, pourtant il souhaitait que je reste à ses côtés, Je ne suis pourtant qu'un inconnu pour lui, mais je sais d'expérience qu'il est parfois plus facile de se confier à un inconnu qu'à une personne que l'ont voit tous les jours. Peut-être avait-il juste besoin d'en parler à quelqu'un, et que par un pur concours de circonstance, ce quelqu'un fut moi.
Peut-être ne veut-il plus me revoir, mais alors pourquoi m'avoir embrassé en me voyant partir ?
Je sors de mes pensés par mon téléphone qui m'annonce un nouveau message, le douzième depuis minuit, tous du même destinataire : Nicolas. Encore trois messages sans réponse et il devrait comprendre que son rêve de vie longue et harmonieuse à mes côtés n'est pas partagé.
L'air ailleurs, je me prépare et décide d'aller marcher un peu dans un parc à quelques kilomètres de chez moi. Ce n'est pas réellement un parc c'est davantage un site naturel comprenant un observatoire pour les animaux au bord d'un marais. Mais de nos jours de moins en moins de personnes viennent ici alors c'est l'endroit idéal pour se vider la tête.
Il est rare que je vienne ici malgré que j'affectionne particulièrement ce lieu qui semble hors du temps.
En franchissant l'entrée du site, un bol d'air frais rempli mes poumons, me permettant de laisser mon esprit s'envoler. Je me dirige lentement jusqu'à l'observatoire, profitant de chaque seconde de trajet, m'enivrant des bruits de la nature, du bruit des animaux et du vent dans les feuilles, de la douceur de la sérénité du lieu.
J'ai beau être un citadin, j'ai toujours adoré la nature et ce qu'elle nous apporte.
En arrivant dans la petite cabane en bois donnant vue sur le marais, je constate sans surprise que l'endroit est désert, j'ai donc le choix de m'asseoir où je veux. Instinctivement je me cale dans un coin et pose mes bras sur le petit rebord face à moi.
Au bout de quelques minutes, je pose ma tête sur mes bras et regarde un héron se balader au bord de l'eau, sans doute à la recherche d'une carpe.
- Mélian ?
Je sursaute à l'entente de mon prénom et me tourne vivement surpris.
- Fabien ? Mais... Que faites-vous là ?
- Je viens souvent ici, replonger dans mes souvenirs. Dit-il en observant le marais devant lui. Et vous ?
Cette fois il plonge son regard dans le mien, et je prends un doux plaisir à me perdre dans ses yeux.
- Essayer d'avoir les idées claires, mais... Ce n'est pas aussi évident que je le pensais...
- Je comprends...
Nous nous regardons encore quelques instant sans oser bouger, puis de son index il pointe ma place avec un léger sourire.
- Habituellement je m'assois ici...
Sans réfléchir je me lève d'un bond et m'écarte de la place.
- Oh je suis vraiment désolé, tenez...
Sans comprendre pourquoi, son sourire se transforme en rire, créant un écho sur le marais, faisant s'envoler mon ami le héron...
- Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous faire fuir, vous pouvez vous remettre où vous étiez si vous voulez, je plaisante, je n'ai pas de place particulière.
À la fin de sa phrase, il me gratifie d'un clin d'œil et se rapproche de moi d'une allure féline avant de se pencher près de mon oreille.
- Je préférai le jeune homme sûr de lui... Me murmure-t-il d'une douce voix.
Sa main droite vient se placer sur mon bras tandis que l'autre vient se loger dans mes cheveux.
- J'ai adoré notre baiser hier, ça faisait longtemps que je n'avais rien ressenti d'aussi fort...
Sans me laisser le temps de lui répondre, il avance davantage vers moi, me faisant reculer jusqu'à avoir le dos collé contre la cloison de la cabane, je peux sentir son sexe commencer à grossir contre le mien, ce qui m'excite au plus haut point.
Ses lèvres viennent emprisonner les miennes sans me laisser le temps de protester et j'adore ça. Moi qui d'habitude garde le contrôle, je découvre pour la première fois ce que c'est de laisser les rênes à son partenaire, et c'est tellement grisant, tellement agréable.
Je me laisse aller à ce baiser rempli de tendresse, de passion, plus rien ne compte autour de nous. Nos langues se rejoignent, faisant durcir nos membres davantage.
Je passe à mon tour mes mains dans le dos de mon amant, le rapprochant au plus près de moi. Je peux désormais sentir la chaleur de son corps à travers nos vêtements devenus inutiles à cet instant.
Alors que la main de Fabien se glisse entre nous afin de venir caresser mon sexe, un flash me revient comme un coup de fouet.
« Fabien n'apprécie pas les coups d'un soir, si c'était votre intention ce n'est pas la peine d'aller le voir. Mais après il s'agit de votre vie amoureuse, alors je n'ai rien à dire là-dessus, juste attention ne jouez pas avec lui. »
Ce que m'a dit Thérèse résonne désormais dans mon esprit, comme si elle savait qui je suis au fond de moi, comme si c'était écrit sur mon front, et comme pour me rappeler ce que je suis, mon téléphone se met à sonner de nouveau.
Sûrement mon plan cul qui veut des explications qu'il n'aura jamais. Voilà ce que je suis, un salaud qui joue avec les sentiments des autres sans se préoccuper de ce qu'ils ont pu vivre par le passé.
Je ne veux pas faire davantage souffrir Fabien, mais je sais qui je suis, je sais ce que je fais de mes partenaires sexuels, je passe mes nerfs sur eux, j'extériorise ma haine à travers le sexe, je prends énormément de plaisir à les faire souffrir comme je souffre intérieurement. Et je ne veux pas faire vivre cela à Fabien.
À contre-cœur je m'écarte de lui, lentement en baissant la tête.
- Je suis désolé, je dois y aller.
Sans rien ajouter, je sors de la cabane et presse le pas pour ne pas que Fabien ne me suive sur les sentiers de terre. Sans m'en rendre compte, je sors du parc en courant, à bout de souffle, comme si j'avais retenu ma respiration durant tout le trajet retour.
Ce jeune homme, aussi ravissant soit-il a déjà trop souffert, et je ne veux pas prendre le risque d'être un salaud avec lui, car c'est ce que je suis avec toutes mes conquêtes, c'est ce que je suis devenu depuis la disparition de Mathieu.
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Au Regoubillonnement des Chambrières
General Fiction"Au Regoubillonnement des Chambrières", un sex-shop qui se verra être à l'origine de différentes histoires, notamment celle de Thérèse, une jeune femme hétérosexuelle, mais les choses ne se passent pas toujours comme prévu...