41 - Runes

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4e jour de la saison du sapin 2450

L'horizon brillait d'un doré éblouissant et pourtant, aucun être ne bénéficiait de chaleur. L'hiver avait ravagé le territoire d'Atgoren, ne laissant qu'une couverture blanche de neige dans son sillage. Mais après la tempête vient le beau temps. Le ciel azure et dégagé couronnait le paysage plongé dans une sérénité qui parut, à ce moment, sempiternelle. L'air frais emplissait les poumons d'un duo d'adolescentes qui traversaient l'enceinte de l'académie d'Archlan. Quelques enfants en profitaient pour se faire la guerre, abusant de la quantité énorme de neige collante. Certains dragons, particulièrement ceux qui étaient jeunes et qui appréciaient le froid, se roulaient partout et creusaient, créant un labyrinthe de tunnels.

Tyrath s'arrêta et admira la scène, remuant son derrière comme un félidé à la chasse. Il se mit ensuite à sautiller et à pousser des feulements joueurs.

— Arrêtes, râla Karasha. Tu vas les attirés vers nous.

Le drake argenté l'ignora et continua ses tentatives pour attirer l'attention des autres jeunes dragons, ses actions devenant de plus en plus exagérés.

— Et il s'est mis à danser, soupira la dragonne brune, désespérée. Azé, occupes-toi de ton bébé.

Pas de réponse. Que des gloussements de filles.

Azéna et Naëshirie ne remarquèrent rien, trop préoccupées par l'autre pour même s'apercevoir que leurs dragons ne suivaient plus. Elles ne pouvaient pas démontrer de l'affection en public, mais elles s'accordaient tout-de-même des regards tendres.

— Je ne voulais pas m'abaisser à ce truc débile, mais bon... Les temps sont désespérés me semble-t-il, ronchonna Karasha. Hé ! Zézé ! tonna-t-elle en direction des dragonnières.

Sa voix caverneuse s'écrasa au travers de l'enceinte comme une rivière envahissante, attirant momentanément l'attention de plusieurs, incluant ceux désirés.

Azéna tourna la tête, ses traits légèrement déformés par l'irritation.

— Quoi ? questionna-t-elle en serrant les dents, tentant de son mieux de dissimuler son aversion pour ce surnom. Karashounette, ajouta-t-elle avec fierté.

Son interlocutrice renâcla, clairement offensée par la façon dont elle avait été adressée.

— Bon. Je l'ai cherché.

— Mhmmm, approuva l'archère en croisant ses bras et en affichant un sourire qui luisait dans sa victoire. Mais sérieusement, qu'est-ce qu'il y a ?

Karasha n'eut pas besoin de répondre. Un roucoulement tordu attira l'attention de tous. Ils se tournèrent vers Tyrath qui s'amusait à imiter très pauvrement le son que produisait les oiseaux. Plusieurs dragonneaux s'étaient rassemblés autour de lui et le fixaient avec intérêt.

— Il divertis avec les bébés, en conclut l'aéromancienne. Et alors ? Si ça l'amuse.

— Je crois qu'il joue avec les bébés, pas qu'il les divertit... Mais bon, je voulais juste t'aviser qu'il ne suit plus, expliqua Karasha.

Ses pupilles se rétrécirent soudainement et elle poussa un grognement, montrant les dents comme si un danger s'était présenté devant elle, ou plus précisément, derrière les dragonnières.

Celles-ci firent volte-face et eurent le réflexe de se mettre en position de combat. Azéna empoigna son arc elfique et y encocha une flèche. Naëshirie rapprocha ses deux poings en un mouvement sec, soulevant une barrière protectrice de roc qui perça la couche épaisse de neige.

— L'équipe que v'faites ! s'exclama une voix familière qui portait d'ailleurs une tonalité colérique. Mais regardez-vous aller !

Une jeune adulte au regard perçant qui portait deux épées croisées sur son dos toisait les adolescentes. Elle ne semblait pas affectée du tout par leurs réactions offensives, gardant une posture rigide.

3 - Sang, os et dagueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant