30 - Née d'hiver

240 23 25
                                    

2e jour de la saison de la lune 2450

Le retour à la routine recommençait la prochaine journée. Depuis leur arrivée à l'académie, comme le désirait le Grand Maître, les apprentis avaient passés la plupart de leur temps libre à récupérer leur force. Pour la plupart, Azéna y compris, cela signifiait rattraper le sommeil perdu durant le voyage ardu à dos de dragon.

Ce soir-là, elle ne fut visitée que par un seul rêve dans lequel une figure y fut présente : celle d'une jeune elfe lunaire qu'elle ne reconnaissait pas. L'étrangère était là, debout et immobile comme un pion, dans une bibliothèque immense illuminée par des lanternes magiques. L'archère était seule avec elle et pourtant, elle ressentait la présence invisible de biens d'autres.

— Qui es-tu? demanda-t-elle en approchant doucement.

L'elfe ne réagit pas à sa voix, continuant de sonder la salle, sûrement en quête d'un livre en particulier. En premier lieu, ses mouvements étaient lents et calculés, mais rapidement, sa respiration devint saccadée et elle se dépêchait. Sa panique eut raison d'elle et ses traits se plissèrent sous le stress.

— Nadjala ja umur'an, murmura-t-elle en passant sa délicate main sur le dos des multiples tomes.

L'aéromancienne ne comprenait pas ce qu'elle racontait, mais elle reconnue la langue elfique. Cela lui rappela qu'elle devrait l'apprendre bientôt.

— Laisse-moi t'aider.

Soudainement, elle fut tirée hors du rêve. Elle ouvrit les yeux et sa réalité fut entièrement différente d'il y avait un moment. Elle était tortillée dans ses couvertures de laine, nue comme un ver mis à part ses sous-vêtements.

La fatigue lui rongeait toujours les muscles, mais elle ne pouvait que songer à la brillante chevelure argentée de l'elfe et à son accoutrement digne d'une reine : une robe en soie de couleur azure et aux bordures neige. Elle n'y comprenait rien, mais cette femme l'intriguait.

Elle secoua la tête comme pour se purifier de ses pensées inutiles et procéda à vaciller hors de son lit en s'étirant les bras vers le plafond. Trop paresseuse pour lire l'horloge accroché au mur, elle estima le temps de la journée d'après les deux soleils qui étaient hauts dans le ciel. C'était l'après-midi. Fayne n'était pas ici. Pas étonnant; elle était une lève-tôt.

— Nix est portée disparue aussi, marmonna-t-elle, un sourire satisfait aux lèvres.

La demi-elfe bâilla, essuya ses yeux humides et s'habilla. Entretemps, elle trouva une lettre suspicieuse attachée à sa fenêtre. Celle-ci provenait de Maître Argoshin qui s'était sûrement faufiler jusque-là dans les ombres de la nuit. L'adolescente y reconnue l'écriture ciselée de son mentor. Encore étonnant qu'il pouvait s'avérer si gracieux avec ses mains partiellement écaillée et griffue.

— Entraînement, entraînement. Quelle surprise...

Elle soupira, déchira la feuille de parchemin à l'aide de son aéromancie dans une sauvagerie sereine et jeta les morceaux dans une brise qui les emporta au loin. Il ne fallait pas qu'elle soit découverte; elle ne pouvait pas se montrer trop prudente.

Elle entendit des gloussements qui provenaient d'en bas. Seule et pas de Tyrath en vue, elle décida de descendre à la salle commune pour y relaxer brièvement avant de devoir quitter l'académie. Elle n'avait décidément pas de répit.

Descendant les escaliers dans un mouvement turbulent, elle laissa chacun de pas s'alourdir dans son impatience. Malgré cela, elle ne causa que peu de tapage dû à sa légèreté. Elle aurait désiré se prélasser dans la présence de ses amis, de son fidèle compagnon de vie et peut-être même avoir l'occasion de discuter avec Naëshirie. Cette dernière pensée la fit rougir.

3 - Sang, os et dagueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant