33 - Purge de Gosform

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41e jour de la saison du sapin 2449

Sa mère la reine n'avait guère prêté attention aux recommandations de ses conseillers. Selon elle, l'hiver n'était pas une excuse pour retarder leurs plans. Il fallait unir Gosform sous une autorité avant de s'attaquer aux autres royaumes. Quelques territoires demeuraient loyaux au Haut-Roi, craignant les dragonniers plus que la cruauté de leur souveraine. Cela aurait été leur dernière erreur. L'armée de la Légion Ancestrale purgea le royaume de la Chouette Grise, remplaçant les traites par des têtes loyales. La forteresse de Nerô, siège de la maison Nytagôrn, vassale de la maison Diramin, était leur dernier obstacle.

Serfantor était en charge de l'avant-garde puisqu'il pouvait aisément tracer le chemin pour le reste des soldats avec l'aide de Shalith. Peu pouvaient résister à un dragon et le Haut-Roi ne semblait pas se préoccuper de ses sujets, pas ceux résidants en Gosform de toute façon. Cette attitude désolait le prince qui se demandait si un souverain honorable existait en ce monde. Sa mère lui avait commandé d'exécuter tous les traitres sans exception. De chaque côté de la guerre, seules les victimes étaient innocentes.

Du haut d'une colline, Shalith, le clair de la lune verdâtre et une bannière à l'image de sa maison pour compagnons, Serfantor sondait les environs, analysant les mouvements des ennemis. Il avait été conclu entre commandants qu'ils attaqueraient à l'aube, quoique l'aube ne signifiait pas la venue de rayons de soleils en ce royaume voilé par la noirceur. Nerô jouissait de remparts massifs renforcés de quatre tours de défense. On accédait à la cité par des tunnels sombres et en son centre était érigé un château intimidant. C'était une vision d'horreur pour n'importe quelle armée normale, mais un dragon volait et cette architecture stratégique n'allait pas les arrêtés.

Serfantor avait eu sa dose de barbarie pour une vie entière en si peu de temps. Son esprit était fatigué, rongé par la culpabilité et le regret. Il avait été témoins d'atrocités de toutes sortes, incluant la mort de jeunes enfants qui avaient la malchance d'avoir été né en l'une de ces familles traitresses. Il en avait que faire de ses compagnons de guerre : Lizria, la prêtresse vouée aux espiègleries que lui dictait son dieu, Thaïnan, le seigneur de guerre à la soif de sang inextinguible, Erurawin, le chaman aux valeurs aussi indésirables qu'un fléau, Seveth, la mage à l'âme aussi corrompue que sa mère la reine et enfin, Maroth, le loup au physique maladif, mais à l'esprit aussi durcie qu'une armure de plaque.

Maroth et Erurawin avaient annoncés le retrait de leur armée puisque Gosform semblait en état stable, affirmant que leur attention était requise ailleurs. Thaïnan et ses barbares refusaient de partir, attirés au carnage comme les rapaces qu'ils étaient. Seveth jugeait qu'elle méritait des vacances alors, elle confia l'armée de la reine à Dame Lotharie qui, d'après Serfantor, agissait avec le plus de dignité qu'elle le pouvait avec les circonstances données. Lizria était déterminée de témoigner à la gloire de Noktow et s'était engagée à demeurer avec l'armée du début à la fin.

La coalition qu'était la Légion Ancestrale fonctionnait à merveille, pour le moment. Les bardes chantaient leurs victoires, hululant leur puissance au travers les terres. Le message était clair : abaissez-vous ou périssez. Pour l'instant, leurs ennemis n'avaient pas répondu, sûrement confiants que les dragonniers suffisaient pour se débarrasser d'eux si nécessaire. C'était exactement ce que les seigneurs de la Légion désiraient : être sous-estimés pendant qu'ils s'attardaient aux préparatifs.

Il devait y avoir environs mille militaires derrière les grandes murailles qui préparaient leurs défenses. Leur dirigeante devait être prise d'une folie si sa décision était de se battre contre les bataillons réunis de la reine et du Sang du Dragon, sans oublier les prêtres noirs de Lizria et d'un dragonnier avec sa dragonne. Serfantor espérait pour le bien des innocents de la cité qu'elle allait venir à ses sens.

3 - Sang, os et dagueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant