📖 Recueil d'Histoires Courtes & autres Délires ✍️ 📚

Luffy & Vivi

MODERNE CENDRILLON

Luffy soupira : ses frères et sa belle-mère étaient encore partis sans débarrasser leur petit-déjeuner. Et personne n'avait sorti le chien. Ni nourri les chats. Ni vider la machine à laver. Ni fait la vaisselle d'hier. 7 heures, sa journée commençait !

Le temps que l'eau de son thé chauffe, il fit sortir le chien, donna du lait aux chats, alla étendre le linge dans le jardin, aéra la maison, nettoya la table et fit la vaisselle. Seulement après, à 8h30, il déjeuna. Il était tout seul pour toute la journée et avait un nombre incalculable de tâches à faire, qui changeaient chaque jour : courses, ménage, repassage, services, cuisine... Cela faisait presqu'un an qu'il faisait tout dans la maison et n'avait pas le droit de s'en plaindre : ses frères et sa belle-mère travaillaient dur pour assurer leurs avenirs. Mais Luffy travaillait aussi et en plus de se charger de son avenir à lui, il devait également s'occuper du confort de toute sa famille ! Il était le plus jeune d'une fratrie recomposée de 3. Ses grands frères, Ace et Sabo, étaient des jeunes hommes pleins d'avenir... Un peu paumés ! Chacun d'eux suivait mollement une formation qui ne leur plaisait pas trop, en attendant de trouver ce qu'ils avaient envie de faire dans la vie.

L'année dernière, son diplôme de Lettres Contemporaines en poche, il s'était mis à la réalisation de son rêve : écrire un roman ! Hélas, depuis, on ne lui avait pas laissé le temps de s'y mettre correctement : comme il restait à la maison pour travailler, sa famille en profitait et lui refilait toutes leurs tâches. S'il y avait un colis à aller chercher, c'était à Luffy de le faire, avec pour raison «T'es à la maison, tu fais rien !». Luffy se sentait particulièrement incompris. Il avait besoin de calme et de temps pour trouver l'inspiration, et personne ne le lui permettait. Et quand il osait évoquer ce sujet, il se prenait des «T'façon, c'est pas un vrai travail», «T'as fait quoi aujourd'hui ? Écrire ? Ah, t'as glandé, quoi», «C'est qu'une lubie, l'écriture», «Oh, ça va, tu peux bien faire ça, t'écriras plus tard, c'est pas pressé», «Tu travailles pas ; t'écris», «Toi, t'as rien à rendre pour demain» et autres remarques désagréables... Mais que répondre à ça ? Luffy s'écrasait. 

En plus de ça, Luffy n'avait plus aucune vie sociable : du haut de ses 19 ans, tous ses copains avaient évolués : alors que lui s'était retiré des études pour se consacrer à son roman, tous ses plus fidèles amis avaient pris un chemin différent. Zoro était parti au Japon (faire quoi, il n'en savait rien, soi-disant pour ''étudier'', un mot que ne connaissait pas son ami). Nami était partie avec sa belle-sœur faire un tour du monde en voilier. Usopp avait déménagé, s'était fiancé et allait bientôt devenir papa. Sanji avait ouvert un restaurant, Le Lagon des Sirènes, avec sa petite amie sur la côte. Chopper était en train de décéder en études supérieures de médecine. Robin était enfin devenue professeure et s'épanouissait complètement. Franky faisait des extras dans tous les garages du département. Et Brook et son groupe avait fini par percer et partir en tournée ! Il se sentait d'autant plus seul... Sabo, lui, avait une petite amie avec qui il rompait tous les quatre matins, et Ace faisait le rebelle célibataire alors que tout le monde lui tournait autour.

L'année dernière, alors que Luffy brillait et s'épanouissait dans ses études, ses deux frères avaient tous deux traversé une crise existentielle, les faisant abandonner leurs cursus, leurs jobs et les forçant à rester sur le canapé pendant des jours, des semaines, sans bouger, à déprimer. Luffy les avait-il jugé ? Jamais. Avait-il osé leur dire «Comme vous n'avez rien de prévu, faites un peu de ménage et le dîner !» ? Non. Les avait-il encouragé, sans les presser, à se remotiver ? Bien sûr. Et ils étaient incapables de lui rendre la pareille...

Bien sûr, il aurait pu se comporter comme eux et envoyer paître le ménage ! Mais il n'aimait pas vivre dans une maison sale et désordonnée. Quand on vit en communauté, on se gêne pour les autres ! Sa belle-mère travaillait en tant qu'éducatrice dans un centre pour enfants en difficulté donc, en plus d'être coriace, elle avait des horaires difficiles et Luffy était prêt à tout pour ne pas l'entendre râler quand elle rentrait. Alors il astiquait la maison et préparait les repas, pour ne pas être traité de fainéant... Ses frères ne l'aidaient jamais et avaient tendance à le considérer comme leur bonniche. Le plus triste dans tout ça, c'est qu'il s'était habitué à cette situation...