Chapitre 38

1.8K 62 0
                                    

Je me réveille le lendemain matin de très bonne humeur. Lorsque je m'étire je m'attends à rencontrer le corps de Seth, mais c'est l'oreiller que je touche. Je me redresse et balaie la chambre du regard pour l'apercevoir en vain. Il a dû sortir. Je retire la couverture et enfile un de ses t-shirts qui m'arrive jusqu'au bas des cuisses. Son parfum y est imprégné et je prends un malin plaisir à le humer.

Je traverse toute la maison pour trouver Seth sans succès. Alors je rejoins l'extérieur et me dirige vers l'abri. C'est le dernier endroit où il pourrait être. Lorsque j'ouvre la porte, je trouve mon homme assis dans un coin, la tête collée contre le mur et les yeux fermés. Je m'appuis contre la porte en bois et le fixe en souriant. Ses cheveux bruns sont en bataille et ses yeux cernés par la fatigue.

« – T'as pas réussi à dormir ? lui demandai-je.

– Non...

– T'aurais dû me réveiller, lui dis-je en m'asseyant en face de lui.

– T'es tellement belle quand tu dors, comment veux-tu que je puisse te réveiller ?

– Alors dis-moi maintenant. Qu'est-ce qu'il se passe ? »

J'entoure ses genoux de mes bras et laisse ma tête s'y poser. Seth joue avec une mèche de mes cheveux tout en regardant dans le vide. Je sais que lorsqu'il agit de cette façon, il ne va vraiment pas bien. Mais malgré ma question, il reste silencieux.

« – Chéri ? C'est par rapport à ton père ?

– Quoi ?! Non pas du tout je m'en fous de lui.

– Alors dis-moi ce qui te tracasse.

– Je ne sais pas... soupira-t-il. J'ai l'impression d'être un monstre comme tu me l'as dit tellement de fois.

– Tu ne l'es pas mon amour. C'est vrai au début je le pensais, mais c'était parce que je ne connaissais pas bien.

– C'est la vérité, j'en suis un. Avec toi, mais surtout avec le peuple.

– Ce n'est pas vrai.

– Mais bien sûr que si arrête d'essayer de me préserver ! s'énerva-t-il. Tu penses comme moi, alors ne mens pas ! J'ai instauré l'Alrithia, je les ai laissé souffrir et se tuer au travail tout ça parce que j'étais aveuglé par mon passé. Je leur ai fait tellement de mal et ce n'est que maintenant que je m'en rends compte.

– C'est une bonne chose Seth.

– Je veux m'excuser auprès d'eux.

– D'accord. Dans ce cas je vais appeler un journaliste.

Je me redresse, mais la poigne de Seth sur ma main me ramène vers le sol.

– Tu ne comprends pas, dit-il en me fixant tristement. Je veux leur parler directement.

– Quoi ?! Mais tu es fou enfin ! Ton identité et ton visage seront dévoilés c'est trop risqué.

– Je m'en fous je ne veux plus me cacher. Et puis c'est bien trop facile de s'excuser à la radio. Lorsqu'on ne voit pas le visage d'une personne, c'est comme si les paroles partaient dans le vide.

– Mais...

– ...j'en ai besoin Mallory. S'il te plaît... »

Je secoue la tête tout en levant les yeux au ciel. À ce moment-là je regrette de l'avoir fait autant changer. Je n'ai absolument rien contre le fait qu'il s'excuse, mais pas de la façon dont il veut se faire pardonner. À la télévision, son visage serait découvert et son identité démasquée. Sa seule protection véritable était cet anonymat. Mais si on lui retire cela, il sera vulnérable et ne pourra plus jamais quitter le Castel. Le perdre, je ne le supporterai pas. J'ai déjà perdu le premier homme que j'aimais, je suis séparée de ma famille depuis deux ans et ma fille a failli se faire tuer. Je n'en peux plus de cette pression continuelle. Mais je vois dans son regard qu'il se sent coupable de ses actes passés. Tout ce qu'il veut c'est se racheter auprès de ceux à qui il a fait du mal et je ne peux pas le priver de cela. Je caresse sa joue et plaque mes lèvres sur les siennes. Notre baiser dure longtemps. Même lorsque je n'ai plus de souffle je ne veux pas me défaire de ses lèvres si délicieuses.

« – D'accord, murmurai-je mon front collé au sien.

– Merci...

– Tu le feras quand ?

– Le plus tôt possible. Demain serait parfait.

– Non, attends une semaine pour moi s'il te plaît.

– Comme tu veux mon amour. Je savais que tu me soutiendrais. »

Je lui souris alors qu'il se rapproche de moi pour m'embrasser encore une fois. Je me sens un peu rassurée qu'il attende. Même si je continue de penser que cette idée est dangereuse et stupide, je la respecte. Parce que comme il l'a dit, il en a besoin.

« – Il faudrait tout de même prévenir des journalistes pour la télévision. Et puis, où est-ce que tu veux le faire ?

– Sur la Grande place. »

Mes jambes se mettent à trembler en entendant ça. Il n'est pas sérieux ? Moi je pensais qu'il voulait faire venir des journalistes et passer à la télévision dans NOTRE MAISON. Un endroit où il serait tout de même en sécurité. Mais s'il va sur la Grande place, il sera exposé à la foule en colère qui je sais ne l'écoutera pas.

« – Sur la Grande place ?! Mais tu as perdu la tête ?!

– Tu croyais quoi ? Que j'allais juste passer à la télévision dans mon bureau bien au chaud ? Ce ne sont pas des excuses sincères pour moi ça !

– Personne ne t'écoutera. Ils seront bien trop en colère pour même entendre tes paroles ! Ils essaieront de te tuer !!

– J'en suis sûr que non, ils m'écouteront.

– Mais tu ne les connais pas !! Moi je sais parfaitement comment ils réagiront ! Et ils ne t'épargneront pas. Au contraire ils se feront un malin plaisir à te lancer un couteau en pleine figure jusqu'à ce que tu tombes au sol et c'est là qu'ils porteront le coup de grâce.

– Alors quoi ? s'énerva-t-il en se levant brusquement. Tu veux que je reste ici à ne rien faire ?!

– Je te demande de rester en sécurité à la maison oui. Mais tes excuses tu peux les transmettre...seulement pas comme tu le désires.

– Non ! Je le ferai comme moi je le décide. Et si tu n'es même pas capable de me soutenir c'est que finalement tu joues encore avec mes sentiments !! »

Il pousse la porte de l'abri et traverse le jardin. Mais je ne veux pas le laisser s'en aller comme ça. Il ne se rend pas compte du danger qu'il pourrait courir s'il se met à découvert de cette façon. C'est beaucoup trop dangereux. Je lui cours après pour le rattraper tout en l'appelant. Lorsque je me poste devant lui, mes yeux sont mouillés de larmes. Il y en a tellement que je vois trouble.

« – Seth écoute-moi. Je ne veux pas te perdre...je t'en prie. Imagine s'il t'arrive quelque chose qu'est-ce que je deviendrai moi ? Et Oriane ? Tu as pensé à elle ? Tu la vois vivre sans son père ? Tu ne veux plus souffrir et bien moi non plus. Et notre fille endurera la même douleur si elle perd son père. Ne fais pas ça je t'en conjure... »

Des sanglots m'échappent alors que Seth m'attire contre son torse. Je ne veux pas qu'il y aille. S'il lui arrive quelque chose je ne me le pardonnerai jamais. Et j'en voudrai à tous ces gens que je connais et qui me connaissent depuis ma naissance. Je sais qu'ils ont supportés énormément de choses, mais ils ne connaissent pas Seth. C'est quelqu'un de bien et je l'aime tellement. Seth plonge son visage dans mon cou et me couvre de baisers.

« – Pardon...murmura-t-il près de mon oreille. C'était une idée stupide.

– Tu ne le feras pas alors ?

– Non, je ne le ferai pas, dit-il en essuyant mes larmes. »

Je soupire de soulagement. J'avais peur qu'il ne change pas d'avis. Mais à présent je suis soulagée. Seth ne sera pas exposé au danger et tout ira bien. Nous continuerons à vivre heureux avec notre fille. Seth place sa main au creux de mes reins et me ramène à l'intérieur. Je sais qu'il tient à présenter ses excuses, mais ce n'est pas cela qui arrangera les choses. Le peuple ne le croira pas et profitera de sa vulnérabilité pour l'anéantir. Mais il peut se rattraper autrement. En montrant qu'il est quelqu'un de bon et compréhensif, comme il a su le devenir avec moi, le peuple l'aimera j'en suis certaine. J'entends Oriane pleurer dans sa chambre. Notre petit trésor est réveillé. Et nous allons nous occuper d'elle toute la journée, comme une vraie famille. Une famille qui ne sera jamais séparée, je le sais. 

Hadès et PerséphoneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant