Chapitre 1

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Ginny avait peur. Elle la reconnaissait, cette sensation désagréable qui s'insinuait en elle, lui gelant les entrailles, la faisant douter. Car oui, Ginny doutait !

Et si jamais cette guerre incessante, tous ces dangers et cette tension insupportable ne se finissaient jamais ! Pire, si sa famille, ses amis et tous les gens qu'elle aimait mourraient ! Et Harry ! Jamais la jeune fille ne pourrait vivre sans lui, elle en avait la certitude.

Non, elle ne pouvait penser à ça, pas aujourd'hui. Elle ne pouvait pas gâcher le bonheur de sa famille et surtout celui de Bill et Fleur. Leur mariage était la seule bonne chose qui avait redonné vie à la maisonnée. Ginny se devait de garder ses pensées enfouies au plus profond d'elle-même. 

"Mais tu as eu un mauvais pressentiment ce matin. Dès que tu t'es levée, tu l'as senti"

- Tais toi !

Ginny ne voulait pas l'écouter, cette voix qui lui portait malheur. Aujourd'hui tout se passera bien, pensa-t-elle. Elle releva la tête et réarrangea sa tenue, puis lança un pauvre sourire à son reflet : on aurait dit une grimace. Pas très convaincante. Il fallait qu'elle fasse semblant, semblant de s'amuser et d'être heureuse.

- GINNY !

- Oui, j'arrive maman, répondit celle-ci, lançant un dernier coup d'œil désespéré au miroir.

- Je t'ai déjà appelé au moins quatre fois. Où étais-tu donc passée ? lui demanda sa mère, Molly Weasley.

- M'an ne t'inquiètes pas, j'étais juste dans ma chambre en train de réfléchir.

- Hum. Bon arrêtes de réfléchir et viens plutôt m'aider à porter ces plats ! Les invités ne vont pas tarder à arriver et je veux que ce mariage soit parfait.

- Oui, mais je dois...

- Tout de suite Ginevra Molly Weasley !

- Mouais d'accord, marmonna la jeune fille, légèrement déçue de ne pas pouvoir rejoindre Harry qu'elle avait aperçu, ou plutôt repéré, dehors. Toujours aussi beau, comme à son habitude, il aidait son père à mettre en place le chapiteau, un sourire aux lèvres.

Depuis que le jeune sorcier avait rompu avec elle, parce qu'il devait soi-disant sauver le monde, Harry l'évitait comme la peste. C'est vrai, la jeune fille lui en voulait beaucoup mais elle essayait au moins de discuter avec lui comme une personne tout à fait normale ! Mais non, il agissait comme un gamin, s'arrangeant toujours pour l'éviter en prétextant une quelconque tâche à exécuter. Finalement elle était plus blessée par ses agissements actuels que sa décision d'arrêter. Le pire étant que malgré son comportement infantile et désespérant, il lui manquait affreusement !

- Ginny, tu m'écoutes ?

- Oh ! Pardon Maman, tu disais ?

- Ginny ma chérie, dit alors tout doucement Molly, tu... tu as oublié de mettre ton charme ce matin.

- Quoi ! Personne ne m'a vue, j'espère ? Oh mon Dieu, il faut que j'aille le mettre tout de suite ! cria-t-elle paniquée, en se retournant brusquement. Sa mère sursauta, surprise par la vivacité de son mouvement inattendu. Elle voulu lui dire quelque chose, un simple mot rassurant, mais sa fille ne lui en laissa pas le temps.

Sans attendre de permission, Ginny partit en courant telle une furie jusqu'à sa chambre, grimpant les marches des escaliers chancelants quatre à quatre. Déboulant dans sa petite chambre, elle s'y enferma à clef puis se regarda à nouveau dans le miroir. "Fichus yeux", pensa-t-elle. Lorsque la rousse avait voulu se donner du courage, elle n'avait absolument pas remarqué la différence : cela prouvait à quel point intérieurement elle y croyait à cette histoire de faux-semblant. Si elle n'arrivait même pas à se regarder correctement, comment était-elle supposée faire face aux autres ?

Elle mit son charme dans un geste rageur et, lentement, ses beaux yeux verts redevinrent illuminés de cet habituel marron chocolaté. "Je déteste cette couleur de serpent si froide ". Ginny tomba à terre, les genoux tremblants, contre le miroir, et laissa couler des larmes retenues depuis bien longtemps. Elles étaient pleines de colère et de dégout, dévorant ses pommettes blanchies par les émotions, tandis que tous les souvenirs de sa première année lui revinrent en mémoire. "Maudit sois tu Tom Jedusor", pensa-t-elle, n'osant pas l'exprimer à voix haute. 

Ce dernier lui avait laisser ce cadeau si détestable, marque ignoble de son passage, afin que la jeune fille se souvienne à jamais de ses propres crimes et de son imprudence, qui avait causé tant de torts. Ainsi, Ginny portait depuis ses onze ans ce bout de son pire ennemi, du cauchemar le plus récurrent qui hantait ses nuits. Seuls ses parents étaient au courant du changement de couleur et pour Ginny, ça en était déjà trop. Ils avaient essayé ensemble tous les sorts possibles et inimaginables mais rien n'avait fonctionné. Les médicomages avaient été formels : elle était destinée à garder des yeux verts pour le restant de sa vie. Ginny était donc réduite à se mettre un charme depuis bientôt 5 longues années de labeur et de secret. Et cela n'empêchait pas la haine qu'elle éprouvait à chaque fois qu'elle croisait son propre regard, révélation de sa vraie personnalité et de cette face d'ombre qu'elle avait toujours tenté d'enterrer. 

Encore une fois, les pensées de Ginny se tournaient vers Harry "Au moins, nous aurons toujours un point commun : la même couleur des yeux"

- Qu'est-ce que tu as dit petite sœur ? demanda Ron, en entrant dans la chambre qu'elle avait pourtant bien fermée à double tours. Habillé d'une élégante robe de sorcier, il avait tellement l'air endimanché qu'on aurait pu le comparer à un pingouin tentant de se fondre dans un désert de sable.

- Rien qui ne te concerne en tout cas, ne te fait pas de soucis, répondit un peu trop vite Ginny, en se relevant précipitamment de sa position recroquevillée. Elle se dit aussitôt "Non mais quelle idiote, tu as parlé à voix haute. En plus de ça, Ron aurait pu découvrir ton secret".

- Ginny, tu es sûre que ça va ? Tu ne m'as même pas crier dessus parce que j'ai ouvert la porte de ta chambre avec de la magie et sans ton autorisation en plus !

Celle-ci hocha vigoureusement la tête en guise de réponse, sachant qu'il ne fallait pas rendre la situation encore plus suspecte qu'elle ne l'était déjà. Alors elle prit le bras de son frère tout en lui susurrant d'une voix implacable :

- Pour la porte, crois-moi, tu vas le regretter amèrement dans les prochains jours. Maintenant allons rejoindre la famille et les invités, ils sont sûrement en train de nous attendre. Et maman va aussi sûrement nous crier dessus : elle ne veut pas qu'on gâche ce "jour parfait".

Ron se mit à rire puis déglutit avec un long frisson en croisant le regard diabolique de sa cadette. Soudainement il avait peur pour sa propre santé et il savait qu'il allait devoir bien faire attention à son derrière dans les prochains jours. Le rouquin l'entraîna à sa suite dans l'escalier, ne voulant pas se poser plus de questions sur ce sujet légèrement terrifiant. Après tout, sa petite sœur avait toujours été jalousement protégé par les jumeaux, et cela ne l'étonnerait même pas qu'elle y apprit quelques petits tours vicieux par la même occasion. 

Lorsque Ginny sortit de sa chambre, ce même pressentiment de danger lui enserra la gorge, faisant battre son cœur à tout rompre. Même si elle aurait voulu l'ignorer, elle en était étrangement incapable. Un malheur allait arriver, elle en était sûre et c'est précisément ça qui lui faisait le plus peur.

Ginny EvansOù les histoires vivent. Découvrez maintenant