Obsession irrésistible

Attaque de rhinocéros

Tout Poudlard avait remarqué que Harry Potter était isolé. La rumeur allait bon train, beaucoup se demandaient ce qui avait pu se passer pour que le trio s'éloigne à ce point.

Cependant, comme le Survivant agissait comme si tout était normal et qu'il ne semblait pas affecté de la situation, personne ne s'aventurait à s'adresser directement à lui pour en savoir plus. De la même façon, personne ne se décidait à profiter de son apparente faiblesse - sans ses amis pour faire barrage, il semblait vulnérable au premier abord.

Jusqu'à présent, c'était Drago Malefoy qui avait toujours lancé les hostilités contre Harry Potter. Depuis leur toute première année, le Serpentard avait systématiquement été le premier à réagir et les autres élèves le suivaient ou se rangeaient derrière Harry.

L'absence brutale de Drago avait changé la dynamique, autant que le comportement étrange du Gryffondor.

Harry Potter était donc dans le couloir, avançant perdu dans ses pensées pour se rendre en cours de métamorphose. Si pour beaucoup il avait l'air de mauvaise humeur, ce n'était pas le cas : il réfléchissait simplement à une façon de subtiliser les cours d'arithmancie d'Hermione pour les faire passer à Drago.

Il savait que s'il demandait de but en blanc les parchemins de son amie, elle serait immédiatement suspicieuse et se poserait des questions auxquelles il ne voulait pas répondre. Pas encore.

Il croisa un groupe de Serpentard qu'il ignora, ne se rendant même pas compte de leur présence. Il ne vit pas le regard furieux de Pansy Parkinson sur lui, ni le froncement de sourcils de Théodore Nott. S'il avait fait attention à ce qui l'entourait, il n'aurait probablement pas plus réagi, ne se doutant pas que le Serpentard se posait beaucoup de questions quand à son soudain changement de comportement depuis la sortie à Pré-au-Lard et l'annonce de la disparition de Drago...

Il n'entendit pas plus le grognement furieux de Goyle, et ne vit pas la charge - comme une attaque de rhinocéros. L'air quitta brusquement ses poumons lorsqu'il fut violemment plaqué contre le mur.

Harry était d'un gabarit bien plus fluet que Goyle, même s'il s'était musclé avec la pratique du Quidditch. Cependant, face à face, il n'avait aucune chance de repousser l'assaut avec de la force brute.

Le Survivant ne paniqua pas. Il ne prit même pas le temps de réfléchir. Ce fut sa magie instinctive qui prit le relais, avant qu'il ne comprenne ce qui se passait.

Une vague de magie brûlante déferla sur le couloir, faisant hoqueter tous ceux qui étaient aux alentours. Quand à Goyle, il fut éjecté avec violence pour percuter le mur d'en face.

Un silence de mort régnait dans le couloir, observant les deux opposants. Harry, le regard noir de colère fixait Goyle, comme s'il le mettait au défi d'attaquer de nouveau.

Le Serpentard quand à lui ne semblait pas apte à réfléchir à quoi que ce soit. Il bandait déjà ses muscles pour se jeter sur le Gryffondor face à lui, semblant décider de l'accuser de la mort de Drago.

A l'instant même où Goyle allait se jeter à nouveau sur Harry, dont la magie bouillonnait pourtant de façon menaçante, une voix doucereuse interrompit l'affrontement.

- Et bien, Messieurs. Que se passe-t-il ici ?

Harry ne détourna pas le regard vers Rogue qui venait d'arriver, restant focalisé sur Goyle et la menace qu'il représentait à ses yeux. En entendant son directeur de maison, le Serpentard hésita puis capitula. Il grommela vaguement quelque chose d'incompréhensible sous le regard narquois du professeur.

Rogue observa attentivement les deux belligérants et fronça le nez en détaillant Potter. Il pouvait sentir la magie incontrôlable du Gryffondor, et il prit conscience qu'il n'avait jusqu'à présent jamais vu une telle puissance se déployer.

Il fusilla du regard Goyle, faisant se recroqueviller le gros garçon stupide puis eut un rictus amusé. L'occasion était trop belle pour ne pas en profiter.

- Potter. Retenue ce soir pour avoir provoqué une bagarre dans les couloirs.

Il ignora les protestations virulentes des élèves autour d'eux, qui assuraient que le Gryffondor n'avait rien fait.

Harry leva ses yeux verts vers lui, le dévisageant d'un air pensif, mais il ne protesta pas. Avant de partir dans une envolée de cape, Rogue lança un regard d'avertissement à Goyle qui baissa le regard, vaincu.

Le soir même, Harry se rendit dans les cachots en traînant les pieds, furieux d'être privé de sa soirée avec Malefoy. Il était passé le voir pour lui apporter à manger et le blond avait ricané en apprenant qu'il avait récolté une retenue - une de plus - avec Rogue.

Il entra dans la salle de potions, et se plaça devant le bureau de Rogue, silencieux mais les yeux pleins de défi.

Rogue l'observa longuement puis esquissa un rictus moqueur. Cependant, il entra directement dans le vif du sujet, faisant sursauter Harry.

- Monsieur Potter. Que s'est il passé avec Monsieur Malefoy ?

Le Survivant se reprit rapidement, cependant Severus avait noté son hésitation et la lueur de panique qui était passé dans son regard. Il fronça les sourcils et haussa les épaules.

- Je n'étais pas à Pré-au-Lard Monsieur. Je suis resté à Poudlard.

Severus se leva, surplombant son élève.

- Je sais pertinemment que ce n'est pas parce que vous aviez l'air à Poudlard que vous y étiez réellement. Bien entendu je n'ai pas de preuves formelles, mais je sais que vous êtes toujours mêlés aux mauvais coups.

Harry plissa les yeux, furieux.

- D'après ce qu'on m'a rapporté, ce sont les Mangemorts qui ont tué Drago Malefoy. Comment pourrais-je y être mêlé ?

Severus se pencha légèrement et détailla Harry. Il renifla d'un air méprisant.

- Étrange. Voyez-vous Monsieur Potter, aucun Mangemort ne semble être responsable de la disparition de Monsieur Malefoy, sans compter que son corps n'a pas été retrouvé.

Harry s'obligea à rester calme, tête haute, ne cillant même pas aux mots de son professeur bien qu'il soit dangereusement proche de la vérité.

Ils s'affrontèrent du regard un long moment puis Severus renifla et recula.

- Méfiez vous, Monsieur Potter. Je vous aurai à l'œil, et si jamais vous êtes mêlé de près ou de loin au décès de Monsieur Malefoy, vous ne vous en tirerez pas. Pas cette fois.