Obsession irrésistible

Sud

Après la scène désagréable avec Ginny, Harry avait fait un bref aller retour dans son dortoir pour y récupérer sa cape d'invisibilité et les cours qu'il voulait travailler avec Malefoy.

Puis, sans un mot, évitant les regards pleins de colère des Gryffondor, il était reparti.

Il avait pris son temps dans les couloirs, jusqu'à l'entrée de la chambre des secrets. Il essayait de se débarrasser de la culpabilité qu'il ressentait à avoir été aussi cruel envers Ginny.

Il savait qu'elle l'aimait, et lui ne l'aimait pas. Jusqu'à présent, il s'était tenu à l'écart, en essayant de la décourager gentiment. Mais la jeune fille était têtue et n'avait pas l'air de vouloir lâcher prise.

Il aurait probablement pu continuer de l'ignorer comme il l'avait toujours fait. Mais les choses changeaient, et il avait décidé de faire le vide autour de lui, de façon bien plus efficace.

C'était cruel pour Ginny, c'était dur à supporter pour lui, mais il voulait être sûr qu'il serait seul au moment où Voldemort attaquerait.

Il se doutait déjà que son petit spectacle lui coûterait l'amitié de Ron et des Weasley à la seconde où Ginny leur en parlerait. Il s'y était préparé mais ça ne l'empêchait pas d'en souffrir.

Avec un soupir las, il se glissa dans le passage conduisant à la chambre des secrets, essayant d'oublier ce qui venait de se passer.

Lorsqu'il entra, Drago leva à peine les yeux de son livre, en grognant une vague salutation. Loin de s'en vexer, Harry sourit et s'adossa au mur, observant le Serpentard lire, attendant qu'il ne daigne relever la tête.

Finalement, Drago ferma le livre avec un claquement de langue satisfait et s'étira.

- Potter ? Je croyais que tu restais dans ton dortoir ce soir ?

Harry laissa échapper un ricanement gêné et haussa les épaules en détournant le regard.

- Et bien j'ai changé d'avis. Autant avancer sur ce fichu devoir de potions.

Drago le dévisagea d'un air curieux puis eut un demi sourire.

- Ok. Au travail alors.

Harry s'installa et sortit ses affaires sans un mot. Ils travaillaient en silence, mais Drago levait de temps à autres un regard pensif sur Harry.

Ce fichu Survivant était peut être celui qui l'avait enlevé et enfermé, mais en étant honnête, Drago devait avouer qu'il lui avait probablement sauvé la vie et éviter de terminer un jour ou l'autre à Azkaban. Il était désormais convaincu que le Gryffondor viendrait à un moment donné à bout de Voldemort et qu'il ramènerait la paix.

C'était une question de logique : le brun était décidé à survivre à tous les dangers qui croisaient sa route, et il était tenace.

Drago commençait à apprécier Potter et il se demandait parfois ce qui aurait changé s'ils étaient devenus amis au lieu de s'opposer à leur premier jour d'école. S'ils s'étaient serrés la main au lieu de partir en guerre l'un contre l'autre. Si lui n'avait pas insulté la belette, si Potter n'avait pas si vite pris la mouche à ce sujet.

Depuis qu'ils s'observaient mutuellement, il avait appris à bien le connaître. C'était pour cette raison qu'il savait que Potter n'allait pas bien. Il savait aussi que s'il lui demandait de but en blanc ce qui n'allait pas, il n'aurait aucune réponse.

Aussi, il termina de rédiger avec application un paragraphe et posa sa plume sur la petite table.

- Dis moi Potter... Tu n'as jamais pensé à fuir tout ça ?

- Tout ça quoi ?

- La guerre pour commencer.

Une lueur de surprise passa dans le regard vert, et Harry posa à son tour sa plume doucement avant de soupirer.

- Et bien, je suppose que je n'y ai pas vraiment pensé. Il semblerait que je n'ai pas vraiment le choix.

- A ce qu'il paraît, on a toujours le choix.

Harry grimaça un sourire.

- Et tu voudrais que j'aille où ?

Drago prit le temps de réfléchir avant de réfléchir.

- Je ne sais pas. Vers le sud. Loin de la grisaille de l'Angleterre.

Harry gloussa et Drago s'empourpra légèrement.

- Je ne peux pas, Malefoy. Ils comptent tous sur moi. Je suis celui qui doit mettre fin à la guerre tu te souviens ?

- Et qu'est ce qu'ils ont fait, tous pour toi ?

- Ce n'est pas une question de... Peu importe. Ce n'est pas parce que j'attends quelque chose en retour, tu vois ?

- J'avoue que je ne vois pas, non.

- C'est juste parce que je peux le faire. Je suis celui qui peux le faire, et sauver des vies.

Drago hocha doucement la tête, pas vraiment surpris de la réponse de Potter. Il était un héros jusqu'au bout des ongles après tout. Comme cette fois où il était resté pendant la tâche du tournoi des trois sorciers pour essayer de remonter tout le monde à la surface...

Le blond changea abruptement de sujet, fixant les yeux émeraude devant lui.

- Si tu me disais ce qui s'est passé ce soir ? Je ne me plains pas de ta compagnie, mais je vois bien que quelque chose ne va pas.

Harry gonfla les joues et resta silencieux si longtemps que Drago crut qu'il ne parlerait pas. Finalement, il soupira lourdement et avoua.

- Disons que je me suis disputé avec Ginny et que la plupart des Gryffondor me détestent désormais.

Drago manqua de s'étouffer sous le choc.

- Quoi ?

Loin de s'émouvoir, Harry continua ses explications d'une voix monocorde.

- Je fais en sorte de ne pas être... entouré. Je t'ai mis à l'abri en t'enfermant ici, je met mes amis à l'abri en les faisant me détester.

- Tu es stupide Potter ! Ce sont des Gryffondor ! Ils vont te détester, ne plus te parler, mais ils seront derrière toi le jour où tu devras te battre parce que tu incarnes le bien, l'opposé de Tu-sais-qui !

- Moins ils seront proches de moi, moins le danger sera grand qu'ils soient pris pour cible.

Drago secoua la tête en grognant, agacé. Évidemment que Potter dépérissait, s'il était isolé de tous ! Il hésita brièvement puis pinça les lèvres avant de poser plus de questions au sujet de ce qui s'était passé un peu plus tôt.

- Et avec la Belette femelle ? Dispute d'amoureux ?

La grimace de Harry lui réchauffa le cœur, il se rendit compte qu'il aurait détesté que Potter soit proche de la fille Weasley.

- C'est probablement ce qu'elle espère mais je ne l'aime pas comme ça.

Le cœur plus léger, Drago reprit sa plume et recommença à travailler, réconfortant Harry sans le savoir grâce à sa seule présence.