Obsession irrésistible

Désorientation

Narcissa découvrit bien vite qu'elle avait un avantage considérable en tant qu'épouse de Lucius. Les Mangemorts autour d'elle pensaient qu'elle était une petite chose fragile - sentiment probablement accentué par la tristesse qu'elle traînait depuis la mort de Drago.

Elle avait rapidement compris qu'elle pouvait en profiter pour apprendre plus de choses. Elle hantait le Manoir en silence, comme un fantôme, pâle et l'air absent. Les Mangemorts ne faisaient plus attention à elle, et ne prenaient même plus la peine de cesser de parler quand elle arrivait.

C'était l'idéal pour percer les vilains petits secrets de Voldemort. L'homme - la chose - qui l'avait terrorisée ne lui inspirait plus qu'un profond dégoût et une rage sans fin. La peur avait disparu, elle avait déjà perdu ce qu'elle avait de plus cher.

Lucius l'observait d'un air inquiet, parfaitement conscient de ce qu'elle voulait, et craignant ce qu'elle pourrait faire. Il restait en retrait, puisqu'il était en disgrâce, gardant un œil sur sa femme, prêt à faire le nécessaire pour la protéger.

Narcissa découvrit ainsi que Voldemort avait des doutes sur la loyauté de Severus, et qu'il ne comptait pas le mettre au courant pour tous les raids prévus. Il y en avait justement un de prévu sur le chemin de Traverse pour le lendemain, et l'aristocrate se dépêcha de prévenir Severus, priant pour qu'il soit réellement un espion comme Voldemort le soupçonnait.

Son hibou n'eut pas de réponse, mais le lendemain, les Aurors étaient présents en nombre sur le chemin de Traverse et beaucoup de Mangemorts furent envoyés à Numengard. Azkaban n'était plus sûre depuis que les Détraqueurs avaient rejoints les ténèbres et depuis que des Mangemorts avaient été libérés.

Le Manoir résonna longuement des hurlements de rage de Voldemort, et Narcissa se permit un sourire satisfait. Loin de s'effrayer des conséquences de ses actes, sa détermination s'en trouva renforcée.

Elle faillit pourtant se trahir, lorsqu'elle découvrit un des secrets les plus noirs de Voldemort. Elle savait déjà qu'il était répugnant, et qu'il puisait sans vergogne dans la magie noire - le fait de revenir à la vie sous cette forme de monstre était un indice suffisant - mais découvrir comment il s'y était pris la rendit presque malade.

En tant que Sang-pur dont la famille trempait allégrement dans la Magie Noire, Narcissa connaissait beaucoup de sortilèges et de maléfices terribles, dont les effets étaient contre nature. Pourtant, lorsque Voldemort confia à Bellatrix comment il avait pu survivre toutes ces années, il fallut à Narcissa toute son énergie pour ne pas se trahir et laisser échapper un cri de dégoût.

Malgré la désorientation causée par la révélation, elle ne perdit pas une miette de l'échange. Ainsi, Voldemort avait divisé son âme encore et encore pour s'assurer une pseudo-immortalité. Il avait sacrifié son humanité pour ne plus craindre la mort.

Le jeune Potter l'avait anéanti, mais pas totalement. Ses fragments d'âme, disséminés dans des réceptacles cachés un peu partout l'avaient maintenu dans une demi-vie et Queudver - l'écœurant rat - l'avait ramené par un rituel de Magie Noire.

Et voilà que Voldemort remettait à Bellatrix un de ces réceptacles, la coupe qui avait autrefois appartenu à Helga Poufsouffle. Une façon d'humilier Poudlard et Dumbledore que d'utiliser les précieuses reliques de l'école pour s'assurer l'immortalité.

Narcissa, une lueur presque démente dans le regard, avait attendu que sa sœur ne soit seule pour lui jeter un sort d'Oubliettes et lui faire croire qu'elle avait déposé la coupe à Gringotts. Puis, elle s'était emparée de l'objet et avait quitté le Manoir rapidement pour aller le dissimuler.

Elle avait longuement hésité sur l'endroit où cacher un tel objet. Elle voulait que le jeune Potter puisse y accéder avec l'aide de Severus si ça s'avérait nécessaire, parce qu'elle supposait que seul le garçon serait en mesure de détruire ces immondices.

Finalement, elle avait trouvé le lieu idéal. Quelque part où personne ne songerait à regarder. Quelque part où Harry Potter pourrait venir sans mal. Le dernier endroit sur Terre où Voldemort imaginerait avoir à venir.

La tombe de James et Lily Potter.

Elle contempla longuement la tombe des Potter à Godric's Hollow, se demandant si elle aurait eu le courage de Lily. Mais rapidement, elle comprit que oui. Qu'elle se serait sacrifiée sans une seule hésitation pour sauver son fils.

Elle enterra la coupe au pied de la tombe des Potter, et posa une main sur la plaque de marbre où étaient gravés les noms. Elle soupira, et une larme coula sur sa joue.

Elle n'avait jamais été amie avec Lily, mais elle se souvenait d'elle, si lumineuse et si joyeuse. Elle était débordante de vie, et maintenant, elle reposait sous terre en compagnie de son époux. Son fils était destiné à affronter le pire monstre que le monde magique eut engendré...

Elle soupira et chuchota doucement.

- Où qu'il soit aujourd'hui, je suis certaine que mon Drago aidera ton fils, Lily Potter. Même s'ils étaient rivaux, mon garçon ne me parlait que de lui, toujours. J'ai échoué à sauver mon fils... mais je ferais tout pour aider le tien.

Elle se leva, et repartit, la tête haute, le cœur un peu apaisé à l'idée qu'elle venait d'accomplir la première action qui mènerait à la chute des Ténèbres.

Elle se glissa dans le Manoir en toute discrétion, sans que personne ne fasse attention à elle, comme toujours. Elle surprit le regard soucieux de Lucius sur elle, mais elle le rassura d'un léger signe de tête.

Puis, elle se rendit dans sa chambre pour y écrire une longue lettre pour Severus. Elle lui exposa tout ce qu'elle savait, tout ce qu'elle avait découvert. Elle lui révéla qu'elle avait dissimulé le premier horcruxe dans la dernière demeure des Potter.

Elle avait longuement hésité à révéler directement la cachette de l'objet, mais elle devait prendre en compte l'éventualité où elle serait surprise et tuée. Elle prit donc le risque, espérant une fois de plus ne pas s'être trompée sur Severus. C'était un pari risqué, mais elle n'oubliait pas que le parrain de son fils avait accepté de mettre sa vie en danger pour le protéger après tout.

Elle jeta un sort sur le parchemin pour le rendre illisible de tous sauf de son destinataire, et le confia à son hibou. Elle ne quitta la fenêtre que lorsque le rapace ne fut plus qu'un minuscule point noir à l'horizon, en route pour Poudlard...