Obsession irrésistible

Perdre ton travail

Le bilan de l'attaque de Pré-au-Lard avait été dévoilé dans la Grande Salle par un Dumbledore à l'air grave. Hormis quelques blessures, il n'y avait rien eu de dramatique... Enfin, du point de vue de Harry.

Mais pour tout le monde, l'aspirant Mangemort Drago Malefoy avait été tué accidentellement - probablement pris dans un tir croisé de sorts offensifs.

Ses amis juraient l'avoir vu à un instant, puis il avait disparu brutalement. Il n'était jamais rentré à Poudlard, et personne ne l'avait trouvé sur place, après une fouille minutieuse du petit village sorcier. Que son corps ne soit pas retrouvé n'était qu'un détail. Officiellement il était une victime de guerre.

L'annonce avait choqué tout le monde : même si le Serpentard n'était pas apprécié des autres maisons, il restait un de leurs camarades, un élève de Poudlard, et l'annonce de sa mort avait fait prendre conscience à tout le monde que la guerre n'était pas un jeu, et qu'ils risquaient tous leurs vies.

Harry était resté sans réactions, bien qu'intérieurement il soit soulagé de savoir le blond en sécurité, prisonnier de la Chambre des secrets. Il se doutait que le Serpentard serait furieux contre lui, et qu'il ne le lui pardonnerait peut être jamais mais il avait fait son choix, et il savait que c'était pour le mieux.

Dans son esprit, Drago Malefoy ne devait pas suivre les Mangemorts. Il ne le voulait pas face à lui sur le champ de bataille.

Hermione l'observait pensivement, alors qu'il remuait la nourriture dans son assiette d'un air absent. Si Harry réfléchissait aux conséquences de ses actes, Hermione, elle, voyait son ami touché par la mort du Serpentard qui l'obsédait depuis leur première année. Elle ne comprenait pas vraiment ce qui se passait dans la tête de Harry, mais elle supposa que les choses ne pourraient que s'améliorer maintenant que Drago Malefoy n'entrait plus dans l'équation.

C'était probablement cruel à penser - après tout, il était un de leurs camarades - mais le bien-être de Harry primait sur tout le reste. Et si la disparition brutale de Malefoy permettait à Harry de se ressaisir, alors tout était pour le mieux.

A l'heure où ils devaient se rendre en cours, Harry repoussa son assiette qu'il n'avait pas touchée. Pourtant, il ne perdait pas l'appétit - pas le moins du monde - mais il avait prévu de manger en compagnie de Malefoy, pour adoucir un peu sa solitude.

Il savait à quel point rester seul et enfermé pouvait être pesant - c'était ce qu'il avait vécu chez ses moldus - et son but n'était pas de blesser le blond même s'ils ne s'étaient jamais appréciés.

Ce dernier mettrait sans aucun doute un long moment avant de le comprendre, mais ils avaient tout leur temps pour s'expliquer. Et Harry espérait de tout cœur qu'un jour Drago le comprendrait et se rendrait compte que c'était la seule option qu'il avait eue...

Avec un soupir, Harry prit son sac et sortit en traînant presque des pieds. Ils avaient cours avec Hagrid, et même s'il adorait le demi-géant, il n'appréciait pas le favoritisme envers sa personne dont l'homme faisait systématiquement preuve.

Plus le temps passait, plus la guerre se durcissait, plus son quotidien lui devenait pesant. Il savait qu'il était condamné : il n'était pas stupide et il se doutait qu'un adolescent inexpérimenté avait peu de chances de survivre face à un mage noir cruel comme Voldemort. Le regard larmoyant de Hagrid qui se posait en permanence sur lui le lui rappelait en permanence et le faisait étouffer.

Il arrivait presque à la cabane du professeur de soins aux créatures magiques quand il sentit qu'on le bousculait violemment. Il se retourna vivement, baguette en main. Il avait énormément travaillé sur ses réflexes ces derniers temps... ce qui faisait de lui une arme comme Dumbledore le voulait.

A être aussi nerveux, il avait toujours peur d'attaquer quelqu'un par erreur s'il était pris par surprise. Cependant, il baissa le bras lorsqu'il vit Pansy Parkinson en larmes face à lui. Apparemment il était encore capable de se contrôler...

Il n'avait jamais aimé la brune proche de Malefoy. Il avait toujours pensé d'elle qu'elle était une peste à la voix un peu trop criarde. Cependant, son chagrin évident lui serra l'estomac, et il se sentit un peu plus coupable.

Le visage tordu en une grimace haineuse, ses yeux clairs baignés de larmes, elle le fusillait du regard.

- C'est de ta faute Potter !

Harry se figea, ne comprenant pas. Le voyant immobile et muet, Pansy continua, indifférente à l'attroupement qui se formait autour d'eux.

- C'est de ta faute s'il est mort. Si Drago a été tué !

- Je...

La jeune fille le coupa, sa voix enflant alors qu'elle laissait échapper ce qu'elle avait sur le cœur.

- Le sauveur... le héros du monde magique... Celui qui se cache oui ! C'est toi qui aurait du mourir pas lui ! Tu es un imposteur !

Pansy avait apparemment d'autres choses à dire, mais Hagrid était arrivé.

- Miss Parkinson ! Vingt points en moins pour Serpentard !

L'homme placide semblait hors de lui, et il serrait son parapluie ridicule dans sa grande main comme s'il devait se maîtriser pour ne pas s'en servir. C'était probablement le cas d'ailleurs.

Harry connut un instant de panique, en se demandant si Hagrid n'allait pas faire une bêtise pour le défendre. Aussi le jeune homme s'approcha de son ami et professeur.

- Hagrid ? Calme-toi, tu risques de perdre ton travail.

Les mots avaient été murmurés pour qu'eux seuls ne les entendent. Le demi géant avait hésité puis s'était détendu, haussant les épaules.

Voyant les regards plein de colère des Serpentard, Harry ferma les yeux, en se disant qu'il n'aurait pas la force d'assister à ce cours dans ces conditions. Alors, il soupira et profita du favoritisme honteux dont faisait preuve Hagrid à son égard.

- Hagrid ? Je ne me sens pas bien... je peux aller à l'infirmerie ?

Le professeur fronça le nez et regarda les Serpentard avec suspicion. Puis il haussa les épaules d'un air navré.

- Bien entendu Harry. Si ça ne va pas, mieux vaut que tu ailles te reposer un peu.

Harry murmura un remerciement et s'éloigna à grands pas, tête basse.

Il savait déjà qu'il ne mettrait pas les pieds à l'infirmerie mais qu'à la place il allait se rendre dans la chambre des secrets...