Le Phœnix Écarlate - [Terminée]

1. L'île d'Alda

L'aube se leva sur l'île d'Alda, reflétant les rayons du soleil dorés sur l'océan calme. La forêt s'éveilla lentement, du bruissement des feuilles sous les pas des biches, au rythme du chant des oisillons dans les nids. Sous l'astre annonçant le début de la journée, les habitants du village de la région forestière se réveillèrent en chœur, sortant de leurs habitats pour commencer leurs tâches quotidiennes.

Dans la chaumière des Jones, tout le monde, ou presque, dormait encore à poings fermés. Seuls deux membres de la famille dérogeaient à la règle : le père, qui migeotait depuis moins d'une heure le petit-déjeuner, ainsi que son fils, un petit bonhomme haut comme trois pommes qui fonça tête baissée dans la chambre parentale, jusqu'à s'écrouler sur le lit.

« Maman ! Debout ! » s'écria-t-il de sa voix enfantine.

Dans un soupir fatigué, la concernée s'étira et se tourna vers lui, les cheveux en bataille et les yeux gonflés. Elle esquissa un sourire, effleurant avec douceur sa main sur le visage de son enfant.

« Doucement Garett, la matinée vient à peine de commencer.

— C'est un grand jour aujourd'hui, répliqua-t-il enthousiaste. J'ai dix ans ! »

Même si elle le souhaitait, elle n'aurait pu oublier. Depuis le début de la semaine, il le répétait sans cesse qu'importait le lieu où il se rendait. Garett était d'un dynamisme incroyable pour son âge, si bien que cela épuisait souvent son entourage. Cependant, il n'avait pas tort : c'était un grand jour.

De toutes les célébrations de naissance qui avaient lieux sur l'île, les décennies étaient celles qui étaient le plus fêtées. Il était de coutume de rassembler le village entier devant un banquet avant le coucher du soleil et de manger bien plus que de raison.

Dans son élan jovial, Garett glissa hors de la chambre de ses parents, s'empressant d'aller répéter les mêmes gestes dans celle de sa grande-soeur. Si cette jeune femme en devenir s'efforçait constamment de tolérer cette petite boule d'énergie d'un mètre vingt-sept, elle était tout de même bien moins matinale que lui. Alors, lorsqu'il s'écroula sur elle pour lui communiquer toute sa joie, elle l'ignora royalement. Vexé, il courut vers la fenêtre et ouvrit les rideaux d'un geste sec, envoyant la lumière agressive droit sur le visage de l'endormie. Il n'en fallut pas plus pour qu'elle se mette en colère.

« Espèce de morveux ! jura-t-elle en se levant péniblement. Tu vas le regretter !

Heureux d'avoir mis sa sœur en pétard, il éclata de rire et se rua hors de la chambre. Il dévala les escaliers, coursé par son aînée. Elle était bien décidée à lui lancer toute une salve d'insultes, même si cela réveilait tout le voisinage en passant. Ils dérapèrent à l'unisson dans la cuisine.

Dans cette pièce habituellement chaleureuse, ils y trouvèrent leur mère, les mains sur les hanches et les sourcils froncés. Garett stoppa tout mouvemen face à son regard accusateur et baissa la tête, soudain penaud. Essayant de ne pas se faire remarquer, sa sœur adressa au gamin une petite tape sur le haut du crâne, ce qui n'échappa pas à la sagacité de la maîtresse de maison.

« Je croyais avoir été claire, Scarlet. Pas de violence dans cette famille !

— Excusez-moi, mère. » répondit l'intéressée, bien qu'un peu statisfaite d'avoir eu le dernier mot face à son cadet.

Ils prirent place autour de la table en bois de chêne, sur leur chaise respective, attendant patiemment que le petit-déjeuner soit servi. Leur père, un homme de petite taille aux cheveux blonds cendrés et mal coupés, suivit le mouvement, un sourire bienveillant étiré sous sa moustache taillée en pointes. D'une voix douce, il interpella sa femme, occupée à chercher les pommes vertes parmi les autres fruits du panier.