Chapitre 12

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« Gabriel est un garçon exceptionnel et nous avons beaucoup de chance de l'avoir avec nous. Il sait comment réconforter les gens alors qu'il semble tout aussi meurtri qu'eux. »

— Quetzali Ribeiro


Ouvrir les yeux ce matin est une réelle torture parce que je ne suis couché que depuis trois heures.

« Quetzi, debout. »

Je la secoue doucement avant de couper mon réveil pour éviter de réveiller tout l'immeuble. Je ne sais pas comment j'ai eu l'idée de le programmer aussi fort, mais j'ai eu raison parce qu'on ne se serait jamais réveillés.

« Encore cinq minutes...

— On est mardi. On n'a pas cinq minutes. »

Elle râle mais elle finit par se bouger.

« Rappelle-moi pourquoi on a fait la bringue hier ?

— Pour Marisol. Elle a obtenu son diplôme aux Etats-Unis.

— On connaît Marisol ? »

J'éclate de rire lorsqu'elle pose la question parce que, non, on ne connaît pas Marisol. Dis comme ça, c'est étrange, mais c'était tellement important pour l'école qu'on a été embarqué dans cette soirée comme si on vivait ici depuis des années.

« On a un groupe de combien de personnes aujourd'hui ?

— Quinze. Magne. Si on est en retard, Graziella va nous démonter. »

À partir de là, on ne parle plus et on slalome entre les gens qui dorment encore dans la pièce pour atteindre la salle de bain et nous préparer.

« J'me douche, ok ?

— Putain non Quetzi, c'est à moi d'abord ! Tu mets trois heures !

— Non. Cinq minutes, j'me lave pas les cheveux ! Regarde ! »

En deux secondes elle s'est déshabillée et elle file sous la douche. Je ferme la porte à clé et je râle dans mon coin en préparant ses affaires et sa serviette. Cette pièce est tellement petite qu'on est obligés de rentrer le ventre quand on se croise pour échanger nos places sous la douche.

C'est Graziella qui m'a trouvé un endroit pour dormir. J'ai pas à payer, je dois simplement me démerder pour trouver à manger tout seul et c'est assez simple avec les pourboires que nous laisse les touristes. On est quatorze à vivre dans un deux pièces dans lesquels sont entreposés quatre lits superposés. C'est comme ça que j'ai connu Quetzali : je partage son lit et vu sa taille, ça rapproche forcément. Elle aussi, elle est bénévole à la La Petite Ecole d'Amérique et y organise des excursions. Elle m'apprend l'espagnol, je lui apprends l'anglais et c'est comme ça qu'on est devenus un binôme. ; je dois avouer que je suis heureux de faire équipe avec elle parce qu'on rigole bien. Quetzali est une guatémaltèque de 25 ans, elle n'a pas fait beaucoup d'étude et c'est pour ça qu'elle se bat pour que d'autres ait de la chance. C'est une petite brune un peu rondouillette qui n'a pas sa langue dans sa poche et c'est comme ça que Graziella l'a repéré.

Graziella, fait partie des fondatrices de La Petite Ecole d'Amérique et j'ai eu la chance d'être installé à côté d'elle dans l'avion. C'est elle qui a su trouver les mots pour me calmer. Elle m'a ensuite parlé de son école et lorsqu'elle m'a dit qu'elle était toujours à la recherche de bénévoles, j'ai embarqué sans me poser de question. Je n'ai appris que plus tard que c'était une école clandestine au cœur de la jungle et qu'on risquait vraiment très gros si on était un jour découvert par une milice, mais ça ne m'a pas fait fuir pour autant. Cette école donne leur chance à une trentaine de jeunes filles de faire des études jusqu'au niveau lycée, puis Graziella se bat pour leur obtenir des bourses aux Etats-Unis et leur offrir des études supérieures qui assureront leur avenir.

GabrielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant