Chapitre 20

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« S'accrocher alors que tout ce qu'on a construit s'effondre, c'est prendre le risque qu'une pierre de l'édifice nous tombe dessus et nous blesse à jamais. »

— Flynn Higgins


J'ouvre à peine la porte de chez moi pour balancer mon sac à dos dans l'entrée, puis je ressors immédiatement. Ce matin je travaillais à l'épicerie de 6 heures à 9 heures. Je le fais un ou deux dimanches par mois, simplement pour dépanner et me faire un peu d'argent de poche.

« Naël ! Attends ! Où est-ce que tu vas ? »

Ma mère me court après dans l'allée, alors que j'enfourche déjà mon vélo.

« À l'église !

— À l'église ? À cette heure-ci ? Mais c'est l'heure de la messe !

— Justement, maman ! »

Je lui tourne le dos, près à prendre la route, mais elle m'interpelle encore.

« Attends !

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Tu es à peine rentré et tu repars déjà !

— J'ai fini en retard, c'est pour ça. Je voulais y aller aujourd'hui. J'ai besoin de—

— Ecoute... j'aimerais assez que tu rentres, s'il te plaît. Cinq minutes, au moins.

— Maman, mais j'ai pas le temps ! Il faut que j'y aille, j'ai...

— Naël ! »

Dans un soupir profondément agacé, je balance mon vélo dans l'allée et je fais demi-tour. Je traverse l'allée dans l'autre sens pour rentrer chez moi, ma mère sur les talons.

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

Je pose la question, sans masquer mon mécontentement, alors qu'elle attrape doucement mes épaules pour me diriger jusqu'au salon.

« Surprise ! »

Je reste sans voix et découvrant une grande table dressée, mes grands-parents, ma tante et ma cousine, ainsi que Flynn.

« On n'a pas pu fêter ton anniversaire en famille entre votre voyage à Paris et... tout ce qu'il se passe en ce moment. On s'est dit qu'un brunch en famille pour rectifier le tir te ferait plaisir. »

J'ai envie de leur hurler que non, ça ne me tente pas, que j'avais autre chose à faire ce matin, que je voulais prouver à Gabriel qu'il se trompait. Qu'il avait besoin qu'on lui montre qu'il était entendu, écouté, que ses choix n'étaient pas mauvais et que s'il ne voulait pas se faire opérer alors il pourrait toujours trouver un moyen de s'adapter – seulement si son entourage lui venait en aide. Mais je me tais parce que je ne peux pas leur dire que j'ai autre chose à faire alors qu'ils ont roulé des heures pour venir jusqu'ici.

« C'est super. Merci. »

Tout le monde est content de me voir, de rencontrer mon copain officiellement. Parce qu'il est beau, attentionné, drôle. Parce qu'on va bien ensemble et que, lui au moins, n'est pas une mauvaise fréquentation.

« Maman !, soupire ma mère à l'attention de ma grand-mère.

— Je suis désolée mais ce Gabriel était un petit délinquant.

— Ce n'était pas mon petit ami.

— Non, bien sûr. », elle répond en levant les yeux au ciel.

GabrielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant