Epilogue

849 73 9
                                    


« Avant j'avais peur de mettre des émotions ou des sentiments dans les choses que je faisais ; parfois, il m'arrive encore d'être incapable de le faire, d'ailleurs, et j'ai manqué de tout lâcher à plusieurs reprises. Mais, finalement, avec Naël à mes côtés, il n'y a rien d'insurmontable. »

— Gabriel Saint-Clair


Aujourd'hui, c'est le grand départ. Mes parents sont morts d'inquiétude à l'idée de laisser partir leur fils unique, mais j'ai réussi à les convaincre que c'était une bonne chose – pour moi, pour eux, pour Gabriel.

« T'as bien ton téléphone ? Ton chargeur ? Ton passeport ?

— Mais oui, maman. Ça va aller, d'accord ? Je vais revenir.

— Je sais, c'est juste que vous avez eu votre diplôme hier et que vous partez déjà, ça semble précipité...

— Pas quand on prépare le voyage depuis des mois...

— C'est vrai, oui. C'est arrivé trop vite, c'est tout. »

Je sais qu'on pourrait débattre pendant des heures alors j'écourte la conversation avec un énorme câlin auquel mon père se rajoute. C'est Gabriel qui y met fin en sonnant à la porte : il est en avance. Gabriel est toujours en avance, qui aurait pu croire ça possible ?

Après des au revoir interminables, on se retrouve dans la voiture de Marie en direction de l'aéroport.

« Ça va, c'était pas trop dur ?

— Plus pour eux que pour moi. »

Je lui réponds, tout en signant pour Gabriel ; même s'il est installé à l'avant, il s'est retourné pour pouvoir suivre la conversation avec mes traductions.

Jamais je n'aurais imaginé que j'avais l'âme d'un aventurier et, pourtant, je m'apprête à partir une année entière pour parcourir le monde. Parce que Gabriel a eu cette idée, parce qu'il ne voulait pas le faire sans moi et parce qu'on a besoin l'un de l'autre pour avancer. Lui m'ôte les œillères que je me mets pour ne pas sortir des sentiers battus et moi je l'aide à vivre aussi normalement que possible.

Notre premier arrêt sera l'Australie où nous allons travailler dans une ferme tout l'été. C'est fou, non ? Jamais je ne me serai pensé capable de faire ça. Jamais Gabriel ne se serait pensé capable de faire ça. Pourtant, à deux, ça semble être une évidence.

Après l'Australie, nous avons prévu plusieurs autres pays que nous aimerions découvrir et nous avons fait toutes les recherches nécessaires pour savoir où nous mettons les pieds, même si nous n'avons pas d'ordre particulier défini. D'après Gabriel, il faut qu'on se laisse porter, d'après moi, il faut tout organiser : on a donc trouvé un juste milieu.

Les au revoir avec Marie sont difficiles – bien plus que je n'aurais pu l'imaginer.

« Vous téléphonez souvent, ok ?

— T'inquiète pas. On va tout filmer, rassure Gabriel. Tu sauras ce qu'on fait. A chaque seconde.

— Ok. Bon... je vous laisse filer, vous avez la sécurité à passer. Ça peut-être long. »

Malgré tout, elle a du mal à abandonner Gabriel ; ils se sont beaucoup rapprochés cette année et je sais très bien qu'ils ont tous les deux peur de perdre ça à nouveau. Je n'ai pas de frère, pas de sœur – et encore moins un jumeau – alors je ne peux pas comprendre et je n'aime pas m'interposer entre eux, mais l'heure tourne et, à un moment donné, on va se mettre en retard.

Je pose une main sur l'épaule de Gabriel et, après un dernier vrai câlin, on quitte Marie pour passer la sécurité. Au début, c'est bizarre de se retrouver seuls. On est silencieux en faisant la queue ; je me demande si je suis vraiment prêt pour ça, si on va vraiment tenir une année. Je suis inquiet de la tournure que peuvent prendre les choses, est-ce que nos familles ne vont pas trop nous manquer ? Est-ce qu'on va se supporter tous les jours ?

« Naël ? Chéri ? J'ai besoin de toi. Je comprends pas ce qu'elle me dit. »

Un sourire se forme sur mon visage et je reviens à moi ; bien sûr qu'on va se supporter tous les jours. Peut-être en se chamaillant parfois, mais quand on a la chance de vivre une histoire comme la notre, on évite de se poser trop de questions : on vit notre histoire et puis c'est tout.

Au début, j'avais peur de n'être qu'un traducteur dans sa vie ou quelqu'un qui acceptait de lui accorder l'attention qu'il voulait. Parce qu'il était comme ça, Gabriel : toujours à penser à son confort en premier. En fait, j'ai passé des mois à ne pas lui faire confiance, à attendre qu'il fasse un faux pas qui me confirmerait que j'avais eu tort de lui laisser une seconde chance. Puis le temps passait et il était gentil sans rien attendre en retour, il faisait même des choses qui ne contentaient que moi pour me faire plaisir. Il lui est arrivé de se confier à moi, de me parler de ses insécurités et de ce qui l'avait poussé à choisir Will plutôt que moi plus d'une fois. Plus le temps passait, plus je réalisais que j'étais injuste envers lui et que, si j'avais accepté de lui donner une seconde chance, alors il méritait que je sois sincère, moi aussi. J'ai pris du recul pendant plusieurs semaines et Gabriel m'a attendu. Depuis, on prévoit ce tour du monde à deux.

Je ne saurais pas dire si Gabriel a changé, s'il a mûri ou s'il a simplement cessé de se mentir à lui-même pour être pleinement ce qu'il tentait de cacher aux autres : un garçon sensible avec une mauvaise estime de lui-même. Ce que je sais aujourd'hui c'est que j'ai toujours aimé Gabriel, ses qualités et ses défauts, et qu'aujourd'hui je crois que les autres arrivent enfin à voir ce que j'ai toujours vu en lui.

Gabriel est certainement la personne avec qui je vais passer le reste de mes jours et ça ne m'effraie même pas de le penser parce que, si je suis en train de vivre le meilleur, je connais déjà le pire – et ça ne m'impressionne plus du tout.

« Ça y est, t'es prêt à vivre la plus grande aventure de toute ta vie ?, je signe alors que notre avion décolle enfin.

— Elle a déjà commencé depuis longtemps. Mon aventure. »

En public, on signe de plus en plus. Ce n'est pas qu'il entend moins bien – son audition n'a plus baissé depuis des mois – c'est juste que ça nous offre une intimité dont tout le monde ne dispose pas : pouvoir s'exprimer librement sans que personne ne nous comprenne. Finalement, son monde à lui est devenu notre monde à nous et je crois que c'est ce qui fait toute la base de notre relation, ce qui la rend solide et unique.

« Ah ? Et c'est quoi ton aventure, alors ? »

Il m'adresse un sourire rayonnant avant de signer :

« C'est toi. »


#GabrielFIC

Ça y est, cette histoire touche à sa fin et j'espère que vous avez aimé partager la vie de Gabriel durant ces quelques chapitres ! J'ai adoré partager cette histoire avec vous. Merci à toutes les personnes qui ont pris la peine de laisser des commentaires pour exprimer leur ressenti, c'est toujours agréable d'avoir des retours. À très vite. 

Amicalement, LT.  

GabrielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant