Naël (4)

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C'est quand j'ai vu la montgolfière arc-en-ciel que j'ai compris que c'était un rêve.

Trop gay pour être réel.

Pourtant, ça avait plutôt bien commencé. Je me promenais, par un bel après-midi ensoleillé, dans un grand champs d'un vert captivant sur lequel tranchait le rouge vif des coquelicots et le jaune instable des abeilles butineuses.

Pour ce qui est de savoir ce que je pouvais bien foutre là, je n'en ai pas la moindre idée. L'essentiel c'est que ça avait l'air très vrai, assez pour que je ne me doute pas, à ce stade, que j'étais en train de rêver. Même le fait que la prairie semble s'étirer à perte de vue ou que je sois parfaitement seul dans ce désert de verdure.

Le chant des oiseaux et une légère brise fraiche venait compléter ce paysage bucolique (oui, je sais ce que des mots tels que bucolique signifient).

Donc, je me promenais, bras dessus bras dessous avec moi-même. Je marchais, les mains dans les poches, sans trop savoir quel était mon point de départ ni celui d'arrivée.

Au bout d'un moment, je distinguai au loin une silhouette en plein milieu de la prairie. Elle était tournée vers moi et me faisait signe.

Naturellement, j'aillai vers elle. En m'approchant, je reconnus rapidement un des membres de mon équipe de hand. Enfin... J'ignorais son nom, et je n'étais pas sûr de l'avoir déjà vu, mais j'avais la solide intuition qu'il faisait partie de mon équipe de hand.

- Salut, lançai-je d'un ton hésitant. Tu... fais quoi planté ici ?

- Enfin, me répondit le garçon avec un large sourire. Depuis le temps que j'attendais ça...

Son sourire me faisait penser à celui d'un type qui se soulageait après avoir ingurgité deux ou trois tonneaux de bière.

- Attendre quoi ? fis-je.

Il s'approcha de moi et prit mes mains – premier indice : éveillé, j'aurais certainement réagi, en le mordant ou en rougissant par exemple.

Mais là, je me laissai faire et le regardai approcher son visage du miens, les yeux écarquillés.

J'étais incapable de dire si je le trouvais beau ou laid, grand ou petit, attirant ou repoussant. C'est comme s'il était tout ça à la fois.

Je suis timbré.

- Naël, dit-il d'une voix apaisée. C'est moi.

Un silence passa :

- Qui ça ? fis-je d'un ton circonspect.

- C'est moi, répéta-t-il en soupirant. Samuel.

Je le regardai. Il me regarda. Je regardai nos mains, puis lui à nouveau.

- Euh..., fis-je au bout d'un moment. Nan, sérieux ?

C'est bizarre, j'avais du mal à y croire. Après tout ce temps passé à le chercher, je ne pouvais pas croire que le garçon qui hante mes pensées débarque comme une fleur et me balance « c'est moi » avec le regard d'un type sous LSD.

Comme quoi, je reste quelqu'un de lucide !

Avant qu'il ne puisse répondre, une voix nous parvint sur la gauche.

- Hey, Naël !

Je fis volte-face et aperçus un autre garçon qui arrivait vers nous en me faisant signe de la main. Comme l'autre, j'avais la ferme intuition qu'il faisait partie de mon équipe de hand.

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