Trois semaines plus tôt.
Il avait suffi d'un coup d'œil à son dossier pour que Juliette Joke, la directrice du Centre des Anges, accepte Zara Boqdam. La grande dame avait conscience que son lycée n'avait rien d'angélique et que ses élèves étaient loin d'être des anges à défaut du nom de son établissement. Elle avait pour mission de protéger les enfants et adolescents malades de la société. Société qui cherchait à les plier selon leurs idées. Le Centre des Anges avait ouvert sept ans plus tôt et accueillait déjà soixante-trois jeunes. Aujourd'hui, Juliette réinsérait quasiment trois enfants dits "fous" dans une vie "normale".
— Alors ?
Une voix inquiète fit relever la tête de Juliette Joke. La directrice rencontra de manière brutale un regard remplit de stress et de peur.
— C'est bon, on lui prépare une chambre et elle s'installe dès demain.
La grand-mère de Zara, Olympe Bruni, hocha rigidement la tête, un œil inquiet et les mains moites de se séparer de l'enfant de sa fille.
— Merci, madame Joke.
— Ne me remerciait pas, je fais ça de bon cœur.
— Elle ne sait pas ce qu'elle fait et oublie très vite ses actes, confia la vieille femme.La directrice approuva d'un mouvement de tête et se leva pour accompagner cette femme vieillie par les problèmes jusqu'à l'entrée du centre. Les deux femmes marchaient en silence, seuls les pas de la proviseure claquaient contre le sol bruyamment.
Quand la grand-mère fut à l'extérieur, Juliette monta jusqu'aux dortoirs pour prévenir les deux surveillantes en service de la prochaine arrivée de Zara. En passant devant les chambres fermées, elle se rendit compte qu'elle devrait bientôt faire des travaux pour aménager l'étage supérieur, puisque celui-ci ne pourrait plus accueillir d'autres malades après Zara et un autre garçon. Ce dernier devait arrivé au cours de la semaine prochaine.
— Sally ? Vanessa ?
Une tête rouge sortit de la chambre 47, celle de Landry.
— Oui ? Répondit Vanessa.
— Sally n'est pas avec vous ?
— Elle est avec Faustine.La bouche fine et stricte de la directrice forma un "o" parfait avant de s'étirer en un sourire professionnel.
— Bref, demain une nouvelle arrive, on l'installera à la quatorze. Venez avec moi pour faire la chambre.
Vanessa hocha la tête, retourna dans la chambre du garçon, expliqua quelque chose que Juliette n'entendit pas puis rejoignit sa supérieure dans le couloir. Les deux femmes passèrent devant une vingtaine de chambres avant de déverrouiller la bonne. En entrant, une odeur de désinfectant envahi les narines de la directrice.
— On masquera cette odeur, déclara clairement Juliette.
Ensuite, durant une heure les deux femmes s'activèrent à faire le lit, la poussière et elles aérèrent la chambre. Vanessa aimait sa patronne car elle n'était pas de celles qui donnait des ordres sans bouger le petit doigt. Tout à l'inverse, elle n'hésitait pas à mettre la main à la pâte pour aider ses employés. La pièce était petite et les murs étaient tous peints en blanc. Celui qui était à la droite de la salle de bain avait un trou.
Vanessa se rappela très clairement l'origine de ce trou. C'était un jour où elle était de service et surtout l'auteur de ceci était un de ses protégés. Il s'appelait Lucas et avait le syndrome d'Alice au Pays des merveilles. Un jour de crise, il avait décidé d'exploser le miroir, puis le mur. À l'aide unique de ses poings.
— Vous pensez à lui ?
La voix douce de sa patronne sortit la surveillante de ses souvenirs sombres.
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Un ange en enfer
General FictionTrois semaines pour guérir Zara Boqdam ? C'est la mission et la promesse de Juliette Joke, directrice d'un hôpital psychiatrique pour moins de vingt ans. Dans une société malade où des enfants en deviennent fous, une société qui pourrait être la nô...