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La journée de la veille avait fini très tôt. À peine Zara avait passé le seuil de la porte de la psychologue qu'elle était repartie dans sa chambre. À force de lire, elle avait sombré dans le sommeil pour se réveiller seulement au milieu de la nuit. Elle avait découvert un plateau repas sur le meuble de l'entrée qu'elle avait dévoré. Elle avait ensuite regardé l'heure pour constater qu'il était presque trois heures du matin. Zara s'était mise debout sur le matelas pour dessiner une croix sur le mur.

— Encore dix-huit, non dix-sept jours.

Elle avait soufflé ces mots au mur comme s'il pouvait accélérer les aiguilles de l'horloge. Elle savait qu'aujourd'hui sa première thérapie de groupe l'attendait et cela l'effrayait.

Encore debout face au mur, elle se mordit la joue et colla son front contre la surface dure et froide. Elle ferma les yeux et respira avec lenteur. Elle resta comme ça durant un temps indéfini et quand elle se laissa tomber sur le matelas, ses paupières étaient lourdes. Elle s'endormit quelques instants plus tard, la tête au pied du lit. Elle grelottait dans son réveil malgré la chaleur de l'atmosphère et ce fut les mains chaudes d'Hiro qui l'extirpèrent du sommeil.

— Couches toi comme il faut, dit-il comme seule explication à sa présence.

Elle lui obéit mollement en s'agenouillant pour se recoucher dans une position normale.

— Tu n'as pas mangé aujourd'hui.
— Je suis fatiguée Hiro.

Elle lui tourna le dos en attendant qu'il parte. Mais il ne bougea pas.

— C'est important de manger Zara !

Elle ferma les yeux fortement pour se forcer à se rendormir. La rouquine ramena ses genoux contre sa poitrine et attendit le départ du garde. Ce dernier s'en alla enfin au bout de deux minutes. Zara finit par s'endormir pour se réveiller quelques heures plus tard.

***

— Aglaé, tu dois manger.

La blonde se tenait assise en face de la nutritionniste du centre. Cette femme était la hantise d'Aglaé. Elle dévisageait toujours l'adolescente avec ses petits yeux noirs et tordait sa bouche en un rictus crispé à chaque fois qu'Aglaé lui disait qu'elle avait sauté un repas.

— Mais si je n'ai pas faim, je ne vais pas me forcer.

Les mains brunes de la femme se posèrent à plat sur la table tandis que le reste du corps se grandissait. Aglaé, nullement impressionnée, se redressa sur sa chaise.

— Écoute, tu ne veux pas guérir ? Continue à dire que tu n'as pas faim. Pour guérir il faut que tu manges, que tu aies faim ou pas.
— C'est débile, souffla Aglaé.
— C'est débile mais c'est comme ça et ce n'est pas Mademoiselle Aglaé Aziubo qui va changer le monde.

La blonde leva ses billes émeraudes au ciel en croisant les bras sur sa petite poitrine. Cette femme l'horripilait en toutes parts. Elle se croyait plus grande, plus forte et mieux que les autres.

— Quand je n'aurais pas faim, je ne mangerais pas, lâcha Aglaé en ramenant ses yeux sur le visage hâlé de l'autre femme.
— Alors tu ne guériras pas. Ça fait quatre ans que tu sors le même discours et tu ne changes pas. Tu veux être butée, soit le et assumes en les conséquences. Je suis payée exactement pareil que tu soignes ou pas. Je n'y perds rien contrairement à toi.
— J'ai pris du poids depuis décembre.
— Ah oui ? Un kilo en six mois ! Super progrès Aglaé, ironisa la nutritionniste.

Aglaé se pencha à son tour sur la table. Elle sentait le regard de Tristan sur son dos mais n'y prêta pas attention.

— Vous êtes qu'une sale conne qui n'aide personne. Votre plaisir est de nous rabaisser. À cause de vous, Ilona n'a jamais guéri et est décédée. Vous êtes incompétente et idiote ! Je guérirais et je n'aurais pas besoin de votre sale tronche ni de vos conseils pourris pour y arriver !

Un ange en enferOù les histoires vivent. Découvrez maintenant