Chap4

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Adèle détestait arriver en avance. Elle préférait se pointer en même temps que tout le monde, pour éviter d'avoir une conversation gênante avec ses amies en attendant dans le couloir que le prof arrive.

Ce jour-là, arrivée cinq minutes trop tôt, elle s'assit sur un banc pour attendre la sonnerie. Elle ne consulta même pas son téléphone au cas où elle aurait pu recevoir une quelconque notification, elle ferma les yeux en écoutant les oiseaux couiner au-dessus de sa tête, dans le chêne.

Elle avait de la chance que son lycée soit très vert. La cour était un parc naturel immense où le bitume apparaissait sur quelques allées qui menaient aux bâtiments. Sinon, les arbres étaient partout, l'herbe et les fleurs aussi.

Adèle se sentait plus à l'aise avec les oiseaux que ses amies. C'était peut être la preuve qu'il y avait un problème. Elle n'était pas une fan de la nature dans l'âme, mais elle trouvait l'herbe plus agréable que la nonchalance des filles qu'elle fréquentait.

Elle se demanda si on choisissait vraiment ses amis dans la vie. Elle avait l'impression de s'être trompée sur toute la ligne avec elles. Mais au fond, elle les aimait bien quand même, alors quoi? C'était quoi le problème?
La sonnerie retentit et elle en profita pour chasser ces idées bizarres de sa tête. Elle croisa un groupe de gens de sa classe qui l'ignorèrent complètement. Elle se demanda comment elle avait pu devenir aussi invisible à leurs yeux.

Pourtant, ils avaient l'air sympa.
Très certainement dû au cercle fermé. Qu'elle s'était imposée elle-même.

Lorsqu'elle entra dans la salle de classe, juste derrière le groupe de gens de sa classe, elle ne fit pas attention aux autres, comme d'habitude. Certains étaient déjà là, en train de discuter assis sur les tables en attendant l'arrivée du prof.

Adèle se décida quand même à relever la tête pour chercher du regard ses amies.
Lorsqu'elle croisa le regard de la brune aux lunettes assise à côté de celle aux yeux verdorés, elle se rendit compte que la brune au téléphone n'était pas encore arrivée. Elle alla s'asseoir à la dernière rangée vide, à côté de deux garçons un peu à l'écart de la classe eux aussi.
Ils ne la saluèrent même pas, alors elle s'installa et sortit ses affaires.

Le prof n'était toujours pas arrivé. Elle en profita pour relire le cours, au cas où elle serait interrogée, et ne se rendit même pas compte que la place à côté d'elle qu'elle avait réservé pour la brune au téléphone venait d'être dérobée. Elle reçut un coup de coude qui la fit sursauter, et tourner la tête vers son interlocuteur.

Elle fronça les sourcils.
« T'as une gomme? » demanda-t-il.
Elle le regarda incrédule, mais ne répondit rien. Il la dévisagea et reposa la question en articulant. Elle dit « non » de la tête.

Bien sûr qu'elle avait une gomme. Mais elle ne donnait pas sa gomme à n'importe qui.
« Je suis désolée mais tu vas devoir changer de place, rétorqua-t-elle à la place. »

Il haussa les sourcils, et elle se stupéfia elle-même. D'où lui venait cette agressivité? Visiblement elle n'était vraiment pas dans son état normal depuis quelques temps.
« Et pourquoi? »

Elle se rappela que le garçon aux yeux clairs était toujours là. Celui qui avait piqué la place de sa pote qui arriverait d'une minute à l'autre.
« Parce que mon amie va venir s'asseoir à côté de moi. »

Il plissa les yeux et jeta un vague regard sur l'ensemble de la salle de classe. Le prof entra à ce moment là. Tous les élèves se levèrent.

« Je pense pas qu'elle va venir, murmura-t-il à Adèle en regardant le prof leur ordonner de se rasseoir. »

Adèle se rassit dans un grincement de chaise. Ce Romain commençait sérieusement à l'agacer.

Elle aurait adoré lui répondre : je m'en fous de ce que tu penses, pars c'est tout.

Mais au lieu de ça elle soupira :
« Tu peux aller t'asseoir ailleurs, s'il te plaît? »
Il lui sourit, taquin:
« Je suis désolé, mais il n'y a plus de places en fait. »
Adèle vérifia par elle-même et fut déçue d'admettre qu'il avait raison.
Le cours venait de commencer, la brune au téléphone ne viendrait sûrement pas.

Elle soupira. Elle allait devoir passer une heure d'histoire à côté de lui.

Satisfait, Romain attrapa la trousse d'Adèle.
Elle le fusilla du regard.
« Te gêne pas.
- Je prends juste ta gomme, répliqua-t-il semblant avoir anticipé sa réaction. »

Elle ne dit rien et commença à recopier ce que le prof projetait au tableau. Au bout de cinq minutes, Romain lança :
« T'es vraiment bizarre comme fille. »

Adèle se tourna vers lui, intriguée.

« Je réserve plus de place pour mes potes depuis la sixième, expliqua-t-il légèrement amusé. »

Adèle préféra ne rien répondre et reporta son attention sur le cours. Pourtant, sa remarque lui trotta dans la tête.
Ils n'échangèrent plus rien jusqu'à la fin du cours. Au moment de quitter la salle de classe, alors qu'il s'apprêtait à partir dans le couloir, Romain revint sur ses pas pour ajouter à Adèle avec ironie :
« J'imagine que tu vas pas me garder la place au prochain cours? »

Elle sourit sans se retourner pour ne pas le lui montrer.

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