Arrest Me - T2

32. Mal

ZOÉ

Je suis sur le point de faire quelque chose de mal.

Je suis sur le terrain de papa. Encore.

Je me suis tuée à faire des entraînements qui m'ont décapé le corps et le cerveau en essayant de me tirer cette putain d'idée débile de la tête. Mais à chaque foulée, chaque pompe, chaque respiration, ça s'est ancré dans ma tête.
Profondément ancré. Impossible à retirer.

Ce sentiment de culpabilité écrasant.
Ce sentiment d'avoir abandonné mon amie au moment où elle avait peut-être le plus besoin de moi.

Ils lui ont fait du chantage pour qu'elle me passe le message et rien ne me garantit qu'ils ont arrêté de le faire. Rien ne me garantit qu'elle est vivante dans son appartement à l'heure actuelle. Rien ne me garantit qu'elle est même chez elle. Tout peut se produire.

Si faire affaire avec quelqu'un comme Greyson m'a appris une putain de leçon, c'est que tout est possible. Rien n'est garanti. Tout peut s'envoler en une seconde, en un claquement de doigts, et je ne veux pas que Naomi disparaisse parce que je suis trop égoïste pour me préoccuper d'elle. Parce que j'ai trop peur d'aller le voir et d'écouter ce qu'il a à me dire.

Je ne veux pas y aller.

Je dois y aller.

Même si Naomi fait des choix dont la validité reste à questionner, je ne peux pas l'abandonner. Abandonner notre amitié.

Elle a longtemps été la seule chose qui me gardait les deux pieds ancrés dans le monde réel et qui me donnait envie de me battre pour survivre. Si je ne me suis pas ouvert les poignets jusqu'à maintenant c'est parce qu'elle a toujours été là pour moi.

Et là, je ne suis même pas là pour elle.

C'est tordu.
C'est mal.
Je n'ai pas le choix.

Je vide ma bouteille d'eau en reprenant mon souffle. Mon cœur bat trop fort, ma respiration est haletante et je sais que ce n'est pas seulement à cause de la course de vingt minutes que je viens de me taper.
C'est bien plus que ça.

À contrecœur, je me dirige vers ma voiture garée de l'autre côté de la chaussée. Je prends de grandes inspirations après m'être assise derrière le volant et avoir mis ma bouteille dans mon porte-gobelet pour cesser le tremblement dans mes mains. Je cherche l'adresse de la prison sur le GPS de mon téléphone.

Connecte mon téléphone au haut-parleur de la voiture.

La démarre.

Prends le chemin.

Espère en finir le plus vite possible.

Mais je connais Greyson par cœur et je me leurre en me disant qu'il devrait s'agir de deux mots échangés et basta. Il va me faire tourner en rond, va me faire mariner. Va jouer avec les mots, va me bouleverser.
Je n'ai pas le choix.
Je vais le laisser dire tout ce qu'il a à dire avant de repartir comme je suis arrivée. Je ne compte pas prononcer une syllabe devant lui. Je ne veux pas volontairement entrer dans son jeu, me laisser faire. Il faut que je fasse attention.

Donovan m'a envoyé un message que je n'ai pas eu la force d'ouvrir.
Je ne veux pas faiblir maintenant.

Je ne veux pas... me sentir encore plus coupable. C'est déjà assez difficile.