L'idée même d'être séparée de Léo, de le perdre m'était intolérable, insupportable. Aussi, quand le moment se présenta, je m'éclipsai de la soirée.
Je courus à perdre haleine jusqu'à rejoindre la boutique d'antiquités... et la panique me gagna pour de bon. Il n'y avait pas le moindre signe de vie. Porte verrouillée, lumières éteintes. Je n'avais aucun moyen de contacter Léo, nous n'avions pas encore échangé nos numéros.
Je tapai du pied, agacée, lorsqu'un petit carré blanc attira mon attention.
- Tiens ?
Je m'accroupis pour ramasser le bout de papier plié en deux dépassant de sous la porte. Le cœur battant, je découvris le message qu'il contenait.
« Je suis navré pour ce soir. Rejoignez-moi sur le toit
de l'immeuble Berlioz demain à Minuit. 0905. »
Intriguée, je glissai le petit mot dans la poche intérieure de ma veste. Je reconnaissais l'écriture de mon ami mais ne valait-il pas mieux se méfier d'un rendez-vous mystérieux donné à une heure aussi tardive ? Qu'avait-il bien pu se passer aujourd'hui même qui l'oblige à me parler en dehors de sa boutique ? À quoi correspondaient ces quatre chiffres ? Était-ce une date ? Un code quelconque ? Je ne pouvais faire autrement que de suivre ces indications si je souhaitais obtenir des réponses.
Je repris le chemin de la maison à la fois déçue et intriguée.
J'entendis des éclats de voix à peine arrivée devant mon portail. Bien que les volets soient fermés, on entendait distinctement mes parents se disputer mais si je n'en comprenais pas la cause.
Je fis donc le tour de ma demeure et escaladai l'échelle rouillée pour monter m'asseoir sur le toit en tuiles rouges. J'avais fait le moins de bruit possible dans l'espoir qu'ils ne me remarquent pas. Une fois installée, il m'arrivait de rester immobile pendant des heures, de peur que la toiture ne s'effondre sous mon poids.
J'avais appris par expérience qu'intervenir lors d'une dispute ne faisait qu'envenimer les choses alors je me taisais. Mieux valait attendre que l'orage passe et patienter le cœur serré en attendant.
Je fouillai dans ma besace à la recherche de quelque friandise. La seule denrée qu'il me restait était un paquet de chewing-gum à la mangue.
Tandis que je mâchai avec application, je laissai le goût chimique et exotique imprégner ma bouche.
Des questions tournaient en boucle dans ma tête.
Où était Léo ? Que faisait-il ? De qui voulait-il se cacher et pourquoi ?
Lorsqu'une goutte de pluie tomba sur ma joue, je n'eus d'autre choix que de me résigner à rentrer.
La porte à peine refermée derrière moi, ils m'encerclaient déjà. Mon père, ma mère, mon frère. Avalant ma salive, je les défiai du regard. Je me sentais comme une proie prise au piège par des prédateurs prêts à se jeter sur moi d'un instant à l'autre.
- Où étais-tu, Léona ? demanda ma mère.
Ses yeux lançaient des éclairs et elle avait les bras croisés sur la poitrine, comme à son habitude. Elle paraissait à la fois élégante et hautaine dans son tailleur-pantalon.
- Je travaillais.
- Nous sommes passés au cabaret et tu n'y étais pas.
Ces paroles venaient de mon père. Brandon et lui portait un costume noir et blanc identique. Une famille de pingouins.
- Pourquoi vous me surveillez ? demandai-je, poings serrés.
Les deux hommes de la maison jetèrent un coup d'œil à ma mère dont les lèvres restèrent obstinément scellées.

VOUS LISEZ
Anomalies
ParanormaalCroyez-vous à l'impossible ? Notre héroïne y croit et pour cause : c'est une Anomalie. Après avoir survécu à un coup de feu tiré à bout portant, Léona se découvre un don exceptionnel qui fait d'elle la cible potentielle d'un tueur en série. Elle d...