Et tous les démons sont ici

Chapitre 5 : Elena

Parmi toutes les choses que Leo aurait pu révéler, Elena doit avouer qu'elle ne s'attendait vraiment pas à celle-ci. Il soupçonne David d'avoir distribué de la drogue à d'autres étudiants depuis la semaine dernière. C'est le genre de réponse qui n'apporte que des questions.

— Tu es sûr de ce que tu dis ? demande-t-elle. C'est lui qui te l'a dit ? Et pourquoi il ferait ça ? Il n'avait pas besoin d'argent, à ma connaissance, et...

— Tu me laisses en placer une ? l'interrompt Leo. J'allais venir aux explications. Je l'ai vu glisser un petit sachet à une fille de première année à la bibliothèque, mercredi dernier. Tout le monde n'était pas encore revenu des vacances d'été et c'était désert là-bas. Je suis allé en parler à David le lendemain, mais il a tout nié en bloc. Il m'a dit qu'il avait juste dépanné une amie avec du paracétamol.

— Et quelle est la probabilité que ce soit la vérité ?

— Très faible, surtout après le message qu'on vient de lire. Je suis presque sûr d'avoir vu la fille lui donner de l'argent en échange du sachet. Le message doit venir du type qui lui fournit la... marchandise.

Ça fait beaucoup à digérer. David, un dealer ? Ça ne lui ressemble absolument pas. Ou plutôt, ça ne ressemble pas à la personne avec qui elle passait tout son temps à l'époque du lycée. Quelqu'un peut-il changer aussi radicalement en un an ?

— Pourquoi tu ne me l'as pas dit plus tôt ? s'interroge Elena.

— Honnêtement, je pensais avoir mal interprété la situation. Surtout après que David m'ait affirmé qu'il ne ferait jamais ça. Il était très convaincant. Et c'est à partir de ce moment qu'il s'est mis à m'ignorer. J'ai cru que je l'avais offensé, ou quelque chose comme ça.

— Ça pourrait expliquer la liasse de billets qu'on vient de trouver. Il n'a sûrement pas eu le temps d'aller donner l'argent à son... son fournisseur ? C'est ça le terme technique ?

— Pourquoi tu me demandes ça ? J'ai l'air d'un narcotrafiquant ?

Elena fait le choix de ne pas répondre à son attaque sarcastique. Elle essaye d'assembler les pièces du puzzle dans sa tête, mais elles semblent tirées de deux boîtes complètement différentes.

— Je ne saurais même pas dire ce qu'il y avait dans le sachet, poursuit Leo. De l'herbe ? Des cachets pour les troubles de la concentration, peut-être ? Ou alors... Tu crois qu'il aurait pu dealer de la... farine du diable ?

Qu'est-ce qu'il raconte ? Face à l'air perdu d'Elena, Leo mime un reniflement exagéré.

— Personne n'appelle la cocaïne comme ça, Leo. Et je ne sais pas ce qui se vend bien parmi les étudiants à la recherche de détente. Ça n'a pas d'importance. C'est juste que je ne comprends pas pourquoi David se mettrait à vendre de la drogue.

— Tu penses qu'on devrait en parler à Malcolm ? demande Leo en se rongeant les ongles nerveusement. Lui donner le téléphone prépayé pour qu'il puisse retrouver l'auteur du message ?

— Non, on ne peut pas lui en parler ! David aurait de gros ennuis si la police découvrait son petit trafic. Et Malcolm est peut-être ton beau-père, mais il est surtout un policier. Il ne pourra pas fermer les yeux sur ce genre de choses.

— David a déjà de gros problèmes ! Il a disparu, je te rappelle. Et le joyeux luron qui lui a envoyé ce message est peut-être responsable.

Elena sait que son cousin a raison, mais elle ne veut pas le montrer. Elle doit avoir l'air sûre d'elle si elle veut le convaincre de protéger David.

— Alors il faut qu'on creuse pour en savoir plus, rétorque-t-elle. Nous, pas la police. On ne sait pas encore si sa disparition est liée à tout cela, on ne peut pas risquer son avenir de cette façon. David serait renvoyé d'Huntington, personne ne lui offrirait jamais de travail, il pourrait même finir en prison, c'est... On ne peut pas lui faire ça.