Chapitre 16 : Leo

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Sa mère avait l'air sincèrement heureuse d'entendre sa voix. Leo a beaucoup hésité avant de composer son numéro, mais il se dit qu'il a pris la bonne décision, en fin de compte. À sa grande surprise, Amara ne lui fait aucun reproche et elle le laisse parler sans l'interrompre. Elle ne souffle même pas lorsque le sujet sensible de l'écriture débarque dans la conversation. Rose a vraiment su trouver les mots pour lui remettre les idées en place, visiblement.

— Et je me disais... commence sa mère d'une voix hésitante. Tu pourrais m'envoyer une copie de ton livre ? J'aimerais beaucoup le lire. Malcolm me répète sans cesse qu'il est génial.

Leo s'attendait à tout sauf à ça. L'espace d'une seconde, il se demande si sa mère ne souffre pas d'une forte fièvre.

— Oui, ça me ferait très plaisir, répond-il simplement.

Il ne faut surtout pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, mais Leo apprécie les efforts dont elle fait preuve. S'il y met aussi du sien, ils pourraient rétablir leur relation sur des bases saines. Leo ne s'attend pas à ce que sa mère devienne parfaite, car personne ne l'est, mais si elle peut le soutenir malgré ses inquiétudes pour son avenir, il serait déjà le plus heureux.

— Au fait, reprend-il pour combler le silence, Carolyn te passe le bonjour.

Il doit avouer qu'il manquait d'inspiration sur ce coup-là. Il sait que sa mère n'aime pas particulièrement parler de sa sœur depuis quelques années, mais les mots sont sortis de sa bouche avant qu'il n'ait le temps de les effacer.

— Comment ça ? demande sa mère au bout du fil. Elle est venue te parler ? Où était-ce ?

— Je... On est allé au manoir, Elena et moi. Carolyn voulait nous parler de l'enquête au sujet de la disparition de David. Malcolm a dû t'en parler ?

— Combien de temps es-tu resté là-bas ?

Leo est décontenancé face à l'urgence qu'il entend dans la voix de sa mère. Il a l'impression d'avoir fait une bêtise, sans même en être conscient, comme la fois où il a mangé la moitié d'une assiette de cookies qui était destinée aux invités de ses parents. En toute franchise, ces gâteaux étaient si délicieux qu'il ne peut pas se résoudre à regretter quoi que ce soit.

— Seulement quelques minutes, répond-il. Pourquoi ? Ce n'est pas la première fois que je vais au manoir. Je passais tout mon temps là-bas quand j'étais petit et...

— Le problème ne vient pas du manoir, l'interrompt Amara. C'est Carolyn. Tu devrais rester aussi loin d'elle que possible, Leo. L'idée que tu étudies dans son école est déjà suffisante pour m'inquiéter, alors... Si elle te demande à nouveau de venir, invente une excuse. Ou refuse sans explication. D'accord ?

— Je ne comprends pas vraiment pourquoi...

— J'ai besoin que tu me dises que tu as compris, Leo.

Le ton de sa mère est intransigeant, ce qui signifie qu'elle n'entrera pas dans les détails, pas même si Leo l'assomme de questions. Mais il peut également sentir l'instinct protecteur qui accompagne chacun de ses mots. Pourquoi Leo aurait-il besoin de protection contre sa propre tante ?

— J'ai compris, dit-il tout de même pour apaiser sa mère. Je ne m'approcherai pas de Carolyn.

Sa mère pousse un léger soupir de soulagement. Presque imperceptible, mais suffisant pour lui donner des frissons.


Le crépuscule approche, et Leo se demande encore s'il devrait aller à la fête autour du feu de camp. D'un côté, il serait très heureux de passer une soirée en compagnie d'Ethan. De l'autre, son anxiété vient le faire douter de tout, comme à son habitude. Pourra-t-il être à l'aise au milieu d'un océan d'inconnus ? Aurait-il l'air d'un imbécile si son colocataire venait à le laisser seul quelques instants ? Et si Ethan se rendait soudain compte qu'il n'est qu'un boulet à cause de son manque de sociabilité ?

Et tous les démons sont iciOù les histoires vivent. Découvrez maintenant