Orphésya, le manoir, la maison, maman... Tous ces souvenirs derrières nous m'empêchaient d'avancer. Je restais là, bouche bée à admirer ce calme qui, j'espère, règnerait à tout jamais. Soudainement, je me rappelais de la cause de notre visite et emboitais le pas derrière les autres. Les minces ruelles nous compressaient et une atmosphère lugubre nous envahit. Je jetais un rapide coup d'oeil inquiet à Maxence qui me répondit en me lançant un charmant sourire. Je pris une profonde inspiration et le suivit. Il avait l'air déterminé. Le regard posé sur la carte, il avançait sûr de lui et de l'endroit où il nous faisait passer. Les ruelles se ressemblaient tellement que j'eus crues de nombreuses fois que l'on tournaient en rond. Les rares habitants qui peuplaient ce villages avaient leurs visages meurtris par la vieillesse. Il n'y avait pas d'enfants, ni d'adolescents et lorsqu'ils nous vîmes traverser leur territoire, ils nous regardèrent avec un air de surprise. Certains étaient froids et filaient la chair de poule tandis que d'autres étaient plus chaleureux et souriants.
Maxence s'arrêta devant un vieux bâtiment en pierres et nous indiqua :
" Je pense que c'est ici."
Les vitres cassées laissaient transparaître l'intérieur d'une vieille pièce, sans lumière. Maxyne s'approcha et d'un geste courageux, frappa à la porte. Sous la force du martèlement causé par ma sœur, la porte grinça. J'eus un mouvement de recul, pensant qu'elle l'avait cassé. Heureusement, la rue que l'on avait empruntée était déserte et personne ne pouvait témoigner de cette éventuelle casse. Mais alors que j'allais dire à mes compagnons de faire marche arrière, un petite voix chevrotante susurra :
" Oui ? Qui est ce ?
- Nous sommes de passage, expliqua Maxence d'une voix apaisante. Nous avons une question à vous poser au sujet d'une gravure que vous auriez pu inscrire sur un manche en bois. Pouvons nous entrer s'il vous plait ?"
Un silence s'installa puis une petite tête dépassa de l'encadrement de la porte. Un monsieur de petite taille dont les cheveux et la barbe blanche encadraient sont visage marqué par des rides, apparut. Lorsqu'il nous aperçut, un sourire timide se dessina sur ses lèvres pincées. Il ajouta :
" Entrez, ne restez pas là. Il me semble avoir quelque chose pour vous les enfants."
Il avait l'air ravi de notre visite et j'eus peur qu'il ne nous reconnaisse. Nous entrâmes dans la pièce, méfiants. De nombreux tableaux peuplaient les murs couverts de papiers peints. Au fin fond de la pièce se tenait un petit bureau en bois au dessus duquel un chandelier éclairait la salle d'une faible lueur. A ma droite, une grande bibliothèque recouvrait le mur devant lequel se proclamait un vieux fauteuil me paraissant confortable.
Le vieux monsieur partit chercher quelque chose dans son bureau, brassant la paperasse envahissant celui ci. Après un long moment, il s'esclaffa :
" Ah, la voilà !"
Il s'approcha de Maxence et lui tendit une petite enveloppe. Mon camarade resta figé un moment, ne sachant pas quoi faire. Le veil homme recula, me laissant la place. Je m'adressai à Maxence, d'un ton le plus rassurant possible :
" Tu veux que je l'ouvre à ta place ?
-Non. J'ai seulement peur de découvrir ce que c'est. Après tout, on ne le connait pas ce monsieur !"
Je l'encourageais et il finit par ouvrir l'enveloppe. Un petit papier était plié en quatre. Maxence le déplia et commença à le lire. Ces yeux parcouraient le papier d'une vitesse fulgurante. Il finit par me tendre la feuille, le regard perdu dans ses pensés. L'écriture était italique et l'encre bavait légèrement. Le papier contenait ses paroles :
Tout va bien, vous êtes sur la bonne piste.
Restez tous ensembles.
Mathis et Rose
Rose était le prénom de ma maman, prénom que je n'avais pas entendu prononcé depuis des lustres. Pleins de questions poussaient dans ma tête mais je préférais ne rien dire. Je m'avançais alors vers Maxence, accroupit au sol. Je m'assis à mon tour, pensive. Petit à petit, toute la bande prit connaissance du mot.
Que voulait-il dire ? Le parrain de Maxence et maman se connaissait alors ! Mais comment savaient-ils que nous nous pointeront ici, tous ensemble ? Comment se vieux monsieur avait-il eu ce papier? Etait-ce une blague? Qui était-il vraiment et qu'allions-nous faire ? Je me retournais vers l'homme, me relevant et lui demandai :
" Qui vous a donné cette lettre ?
- Un client et une charmante demoiselle qui vous ressemble étrangement d'ailleurs ! Ils sont venus me voir et m'ont donné cette lettre. Ils m'ont également demandé de la transmettre à des enfants qui risqueraient de passer me voir un jour ou l'autre pour une histoire de gravure. Aucuns enfants ne vient me voir habituellement alors quand je vous ai vu, j'ai su qu'il s'agissait de vous !"
Mon coeur tambourinait dans ma poitrine et j'avais besoin de fuir, fuir à toute vitesse. Partir et ne plus jamais revenir. Tom ne parlait pas, ne pleurait pas, ne souriait pas non plus. Il était comme vidé, inexpressif et le coeur vidé, en miettes. Je le prit dans mes bras et nous suivîmes Maxence, main dans la main, quittant le bâtiment. Le soleil tombait dangereusement et il était trop tard pour dormir dans les bois. Tout espoir s'était envolé. La réponse, tout le monde l'avait. On savait ce qu'il s'était passé à présent. Il n'y avait plus de mystère. Mais pourquoi avaient- ils fait ça. Pourquoi nous demander de continuer si on sait déjà tout ?
" Ils savaient pour la gravure, commença Maxence énervé. Ils savaient que l'on allait passer par ici. Ils savaient pour leurs morts aussi, mais pourquoi ?
- Vous êtes sur la bonne piste... Ça signifie quoi pour toi ? Lui demandai-je
- Je pense qu'ils se sont suicidés pour une raison précise. A cause de quelque chose.
Mon corps fut parcourut d'un frisson lorsqu'il prononça ce mot cruel :Suicide. C'était dur, mais c'était juste. Il n'était plus question d'un meurtre à présent mais bien d'un suicide organisé. On en avait la preuve. Je continuai :
"Quelle raison précise ? On ne sait même plus ce que l'on cherche !
-Jade... Prononça t-il simplement."
Un hoquet me traversa lorsque je me rappelais de l'accident passé quelques heures plus tôt. J'avais tout foiré, tout. Cette journée avait été catastrophique. Trop d'éléments fleurissaient dans ma tête, prenant trop de place et éliminant les mots. Suite à ça, un silence assourdissant prit place. Je sentais la main de Tom trembler au creux de la mienne. Il avait peur. Mais en même temps, n'était-il pas normal d'avoir peur ? Nous avions atteint la limite du village lorsque Pauline s'arrêta. Nous comprîmes que nous étions arrivés. Il n'y avait plus de maisons. Seulement un banc éclairé par un réverbère dont la lumière grésillait de temps à autre. Je pris place sur celui ci et me rongeais les ongles en silence. Parfois, des gouttes salées glissaient sur mon visage, trahissant mon chagrin. Je les essuyais d'un revers de manche et reprenais mes occupations. Je réfléchissais à un plan pour retrouver Jade demain, mais mon esprit me criait qu'il était trop tard pour un retour en arrière et qu'à l'heure qu'il était, elle devait surement plonger dans un éternel sommeil. Cette nuit là tout espoir s'était envolé. Même les étoiles avaient décidé de me quitter puisqu'elles aussi avaient disparut, cachées par d'épais nuages.
La nuit fut longue mais le sommeil finit par emporter mon insomnie et je finis par sombrer dans le monde de l'inconscience.

VOUS LISEZ
Les enfants au médaillon d'argent
AventuraUn meurtre, un médaillon d'argent, des inscriptions mystérieuses et deux familles un peu différentes des autres. Mais, quel est le point commun entre tous ces mystères ? Que cache cette étrange famille et qui est ce jeune garçon ayant lui aussi soif...