(Fin première partie) 10.4 : Shango contre Saban.

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      Il devait à tout prix maîtriser cette rage et se battre de toutes ses forces contre le dieu, alors il se lança sans un seul cri de guerre, en direction de sa cible. Mais un violent coup de pied dans le torse le fit voltiger dans les airs, son propre corps explosa les mûrs d'une habitation pour ressortir de l'autre côté.

      Il se trouvait à présent allongé au milieu d'une rue, à moitié paralysé par la douleur de ce cette attaque d'une puissance phénoménale, il avait volé tel un boulet de canon. Saban sentit au dernier moment la présence de Shango, il se releva malgré les protestations de son corps et bloqua de justesse le coup de hache du dieu. La lame était maintenue à quelques centimètres de son visage.

      Les yeux de Shango, juste derrière son arme, laissaient paraître sa joie. Le plaisir qu'il ressentait à ce moment précis trahissait sa folie. Saban sentit ses muscles céder petit à petit, malgré les entraînements reçus du dieu de la guerre, il comprit rapidement qu'il n'était pas à la hauteur.

      Il devait tenir le coup jusqu'à l'arrivée de ses mentors, seuls eux sauront faire quelque chose contre Shango.

      D'un coup brusque, le dieu du tonnerre le désarma. La lance qu'avait ramassée Saban, tomba au sol et ce dernier se retrouva sans armes. Autour de lui, les maisons brûlaient, les derniers habitants criaient de peur et d'autres d'agonie. Certains de ses sujets se faisaient dévorer par les hommes-hyènes et parmi tout ce carnage, Saban entendit les pleurs d'un bébé.

      L'ancien roi tomba à genoux devant le dieu du tonnerre, il voulut implorer la grâce de son peuple. Mais toute cette douleur, toute cette abomination lui avait retiré la parole. Il ne pouvait même pas se permettre de joindre les bruits qui accompagnaient habituellement les pleurs d'un individu normale, c'étaient donc des larmes muettes qui coulèrent sur son visage.

      Avec la joie d'un enfant turbulent, devant un jouet qu'il pouvait se permettre de casser, Shango saisit Saban par le col de son habit. Il leva son poing en l'air et l'abattit violemment sur le visage du jeune homme, il recommença à plusieurs reprises et son rire se joignit à sa rage euphorique. Sa démence était troublante, ses yeux lui sortaient de la tête, tandis que celle de Saban se recouvraient d'hématomes, de plaies et de sang.

      Shango était en train de le battre à mort, prenant son temps pour qu'il succombe doucement sous l'impact de ses coups.

      Progressivement, le jeune homme sentait ses forces le quitter, sans qu'il puisse faire quoique ce soit. Mais soudain, l'agressivité du dieu du tonnerre cessa, celui-ci leva brusquement la tête. Saban entendit alors une voix familière, à quelques mètres d'eux, crier :

– Ça suffit !

      C'était Ogun, remarqua le jeune homme encore entre les mains de Shango. Celui-ci avait sa main suspendue en l'air, encore prêt à frapper le pauvre Saban.

      Le dieu de la guerre observait calmement son semblable, comme un dresseur s'approchant d'un cheval trop excité. Mais ce dernier ne semblait pas du tout être le genre de créature que l'on pouvait apprivoiser aussi facilement.

      Shango éclata d'un rire sadique et amusé, à l'approche d'Ogun. Ce dernier s'arrêta net, se rendant compte qu'il mettait la vie de Saban en danger.

– Ne lui fais pas de mal, continua alors Ogun en levant les mains pour lui montrer qu'il n'avait aucune intention de se battre, je te connais très bien Shango. Je sais que tu n'es pas le genre de dieu à se plier à une quelconque autorité. Tu n'as aucune raison d'entrer dans les rangs de Boro.

– La ferme ! S'exclama le concerné en lui jetant un regard noir, tu n'as aucune idée de ce que je veux, ni même de ce qui me motive !

– Toi et moi avons régner ensemble, Shango ! Depuis quand te laisses-tu mener ainsi ?

– Crois-tu que je fais ça parce qu'il me l'a demandé ? Interrogea le dieu du tonnerre, si je suis ici c'est dans l'unique but de m'amuser. Je ressens, à présent, un plaisir qu'on ne me laissait pas assouvir durant le règne d'Olodumare. Mais dorénavant j'ai tout le loisir de laisser libre court à mes pulsions ! Je ne serai jamais le pantin de qui que ce soit, tu m'entends ? Jamais !

– Tu prends une très mauvaise décision, insista Ogun en le regardant cette fois-ci avec un air triste, penses à ta sœur qui...

       Mais le dieu de la guerre n'eu pas le temps de finir sa phrase car la hache de Shango lui fendit brutalement le crâne. Il l'avait froidement lancé, sans même l'ombre d'une hésitation. Saban regarda, à travers ses yeux boursouflés, Ogun s'affaler sur le sol.

– C'est toi qui as pris la mauvaise décision en parlant de ma sœur ! lança sèchement Shango en tendant la main vers sa hache, dont la lame était encore solidement enfoncée dans le crâne de sa victime. Celle-ci revint d'elle même dans sa main. Le dieu du tonnerre redirigea son regard vers le jeune homme qui se trouvait entre la vie et la mort, il lui sourit et lui dit :

– Voilà qui est intéressant, si le dieu de la guerre se trouvait ici, c'était donc pour toi ? Tout porte à croire que tu n'es pas simplement un roi, mais également un dieu ? Et pas n'importe lequel, je me trompe ?

      Son regard scruta celui du pauvre homme, puis avec un nouveau rictus, il lança d'une voix sadique :

– Ma parole, je suis tout excité ! Je m'apprête à tuer l'ennemi juré de l'Empereur Boro !

      Shango leva sa hache au-dessus de sa tête pour se préparer à l'abattre sur Saban, quand tout à coup une lance perfora sa poitrine. Dans un hurlement de douleur, il fit tomber son arme et saisit péniblement celle qui était enfoncée dans son buste, tout en laissant couler un filet de bave et de sang de sa bouche.

      Saban, malgré sa vue trouble, reconnut la lance d'Olokun. Le jeune homme entendit un cri de rage résonner dans la rue et brusquement, l'arme du seigneur des mers se retira du corps de son agresseur. Un violent coup de poing projeta Shango plusieurs mètres plus loin.

      Olokun vint auprès du corps du dieu de la guerre, tandis qu'une pluie forte tomba subitement sur la ville prise par les flammes. Saban vit Ellegua surgir d'une ruelle, le dieu se battait contre plusieurs hommes-hyènes, et il n'eut aucune difficulté à tous les éliminer. Au-dessus de lui, dans les airs, Orula se lança à la poursuite de Shango, ce dernier avait prit ses jambes à son cou.

      Des orbes de lumières provenant des mains luminescentes du dieu de la divination, allèrent s'écraser derrière le fuyard. Mais celui-ci réussit, malgré tout, à s'enfuir en disparaissant littéralement dans un éclair aveuglant et assourdissant.

      Saban sentit finalement ses dernières forces lequitter, il regarda encore une fois Olokun d'un regard affectueux, il lui avait sauvé la vie. Le jeune homme tenta de le remercier, mais il se fit emporter par les profondeurs de son esprit.

L'âge Des Héros : La Prophétie Des Deux FrèresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant