Traqués

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Un sentier conduisait vers les hauteurs d'une colline dont la belle couverture verdoyante s'affadissait en cette saison. Essoufflé, Thor gravissait la montée en admirant les rochers escarpés qui émergeaient du sol en défiant les nuages bas et blancs qui remplissaient le ciel.

« Sommes-nous encore loin du passage ?

— Encore quelques mètres, répondit Heimdall de sa voix chaude et rassurante. Là-haut se trouve une grotte. Le passage est à l'intérieur. »

Quelques minutes s'écoulèrent avant qu'ils n'atteignent un plateau forestier. Les chênes perdaient leurs feuilles emportées par le vent. Fraîche et légère, la brise les détachait de leur port somptueux pour les balayer au loin. Elles n'étaient plus que des danseuses frivoles parées des couleurs de l'automne. Dans une dernière valse insouciante, elles se laissaient porter avant de reposer sur la terre, lourde et noire, qui composerait leur linceul.

Les deux guerriers firent une courte halte et s'assirent sur quelques rochers. Thor en profita pour poser son barda qui contenait encore quelques précieuses pommes d'Idunn. Tourné vers l'horizon, Heimdall observait la vallée de son unique œil désormais. Au loin, les tours de la cité s'élevaient telles des lames dorées . Cela faisait des siècles qu'elles défiaient la voûte céleste et courtisaient les nuages avec orgueil.

Près de lui, en retrait, le dieu du tonnerre baissait le regard d'un air coupable. Par un acte déraisonnable, il avait mis Asgard en danger. Son gardien, qui voyait tout, avait perdu un de ses yeux précieux, volé par la reine des Nornes. Qu'avait-elle l'intention d'en faire ? Elle allait sûrement s'en servir pour influer sur le destin de chacun ou bien le garderait-elle en trophée pour ne peut-être jamais utiliser ses pouvoirs ? Qui pouvait bien le savoir ?

« Parviens-tu à voir quelque chose ?

— Mes sens ne sont plus aussi aiguisés qu'avant. Ma vue est moins infaillible ce qui, pour mes oreilles, me rend la tâche plus ardue. Il me devient plus difficile d'isoler visuellement un individu pour entendre ses paroles. Toutefois, si je me concentre et reprends ma longue contemplation silencieuse, je perçois à nouveau les choses mais elles sont plus fragmentées.

— Je suis terriblement désolé pour ton œil, confia-t-il. Je n'aurais pas dû. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. »

Tourné vers la cité, Heimdall ne répondit pas. La contrariété minait son âme. Il aurait pu dire que Thor avait été inconscient, qu'il serait probablement responsable des conséquences qui en découleraient. Pourtant, il n'en fit rien.

« Comment vont-ils... au palais ? fit le dieu du tonnerre d'un ton hésitant. Comment va Sif ? fit-il la tête basse.

— Elle vous manque, n'est-ce pas ? Elle va bien », ajouta le gardien en souriant.

Thor baissa la tête d'un air gêné devant un Heimdall amusé. Puis, un sourire niais illumina le visage du dieu alors que ce dernier se frottait les mains avec anxiété. Il se demandait comment la guerrière au bouclier avait-elle réagi après son départ ? Connaissant son caractère revêche, il se doutait bien que la rancœur et la colère devaient désormais animer tous ses sentiments à son égard. Elle lui en voudrait, férocement, mais il serait prêt à affronter sa fureur. Et nul doute que leurs retrouvailles se feraient au son des armes. Elle n'hésiterait pas à l'attaquer pour lui donner une bonne leçon.

En l'imaginant déjà, le regard furieux et les armes à la main, le dieu du tonnerre esquissa un sourire. Il avait toujours admiré sa bravoure et ses ambitions qui avaient fait d'elle l'une des plus grandes guerrières d'Asgard. Intrépide, déterminée, parfaite combattante, elle avait de quoi séduire le fils d'Odin.

Un Nouveau Départ (Loki - Tome II)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant