Chapitre 45

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— Du lait crétin, pas de la crème pour faire un latté, s'exclama Raphael qui le regardait faire avec un soupir. Tu es comme Lili, pas capable de faire un latté, un latté...

Et Alec lui aurait bien foutu son latté dans la figure à cet Espagnol bien arrogant.

Cela faisait maintenant presque un mois que le jeune homme travaillait dans le café et depuis deux semaines déjà, Raphael avait décidé de le former pour la préparation des boissons du café. Ces deux semaines s'étaient avérées à ne pas être aussi bonnes qu'il le pensait. Oui, il arrivait à faire un café ou un thé, mais dès qu'on ajoutait toutes sortes de surplus, des sirops, des noix ou arachides ou de l'essence, ça devenait la catastrophe (bien grand mot pour la situation).

Un café glacé avec une once de goyave.

Qui prenait une once de sirop au fruit avec du café?

Mais, aujourd'hui, c'était différent. À sa maladresse s'ajoutait de la nervosité, une grande nervosité puisque après son chiffre, il irait chez sa mère souper. Ça l'angoissait, car pour cela, il avait du décliner l'offre de Simon où tout le monde se serait rejoint pour une soirée entre amis en cette journée d'avril étonnement très chaude et sans pluie. Magnus avait bien sûr compris et au grand soulagement d'Alec, Isabelle serait aussi chez son petit-ami pour la fête. En vérité, il craignait encore d'être vu en sa compagnie même si maintenant, Maryse et lui, c'en était presque devenu une relation mère et fils.

— Regarde une dernière fois, grommela Raphael en prenant un nouveau verre et refaisant une série d'actions pour contacter le latté.

Les minutes passèrent et Alec fit semblant de comprendre, en réalité, il commençait à peine à comprendre comment le faire. Latté. Café. Lait.

Voilà.

Il suffisait de les répéter pour qu'il puisse être capable de concocter la boisson dans les jours suivants.

À dix-huit heures, son chiffre terminait et donc pour l'heure restante, il ne faisait que prendre les commandes et Raphael se chargeait de préparer les boissons. Ce dernier n'hésitait pas à lui jeter des regards furieux comme un enfant à qui on avait confisquer son jouet préféré. Le jeune homme l'ignorait carrément et quand son chiffre termina, il rangea son tablier dans son casier, lança un au revoir fort et haut à ceux qui l'entendraient, puis sortit dehors sous un coucher de soleil chaleureux.

Il marcha dans les rues jusque dans la station d'autobus et entra dans le premier qui passa. N'ayant plus place pour s'asseoir, Alec s'accrocha à la barre et attendit en regardant par la fenêtre pour contrôler sa nervosité et aussi sa respiration. Il détestait prendre l'autobus. Les odeurs et l'humidité lui levaient un peu le cœur, mais après une trentaine de minutes, il débarqua à quelques rues de la demeure de sa mère.

Le ciel devenait sombre et lui marchait seul dans les rues guidé par la lumière des lampadaires. Les mains dans les poches de sa veste de cuir, il regarda des deux côtés de la rue avant de la traverser rapidement. D'un côté, on entendait les voitures passées dans le boulevard, mais de l'autre, le silence se développait un peu plus à chaque pas.

Alec était nerveux, mais soulagé en même temps de revoir sa mère, ça faisait quelques jours qu'il ne l'avait pas vue. Maryse était devenue sa confidente même si le jeune homme n'avait pas encore raconté la partie obscure de son passé. Ils parlait de tous et de rien sans voir le temps de passer. Dans ces moments, il se surprenait à espérer que le temps s'arrête.

La maison de Maryse, après quelques minutes de marche, apparut dans son champ de vision toujours aussi immense. Malgré le ciel sombre, la demeure était éclairée par de petites lampes placées à intervalles régulières proche de plantes encore gelées par la température froide et sec d'avril. En trois pas seulement, une jambe pour chacune des marches du perron, il se retrouva devant la porte d'entrée et toqua quelques coups sur la vitre avant de se réchauffer en soufflant sur ses doigts. Si il faisait chaud le jour, la soirée était une autre chose.

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