Nos deux mondes... [𝐑𝐢𝐯𝐚𝐢𝐥𝐥𝐞 𝐗 𝐑𝐞𝐚𝐝𝐞𝐫]

Chapitre 39: Prisonnier, gardien, et confiance

Cependant, ce n'était pas le temps de penser à ces interrogations pour l'instant: j'avais un captif à interroger.

Dès que mes pieds passèrent la porte, toutes mes questions s'évaporèrent d'un seul coup. La nervosité me prit alors le ventre, et je réalisai soudain que j'appréhendais le moment où le regard de Nicholas Rovoff allait croiser le mien. Après tout, la dernière fois que je l'avais aperçu, il avait tenté de m'enlever, et n'avait pas une seconde hésité à entrer dans le QG du bataillon pour venir à ma rencontre. Il n'y avait pas à dire, cet homme était dangereux, et il fallait s'en méfier. De toute manière, tout ce que m'avait révélé Rivaille, Hansi et le document à la pochette verte et bleue me mettait encore plus sur mes gardes. Oui, cet homme me cachait des choses, et j'étais décidée à le faire parler, de gré ou de force.

Je m'approchai prudemment de la cellule qu'Hansi m'indiqua d'un signe de tête, en retenant ma respiration. Qu'allais-je donc y découvrir ? Un homme au regard vif et trompeur utilisant la manipulation comme tactique première ? Un homme épuisé et déchiré par les remords ? Un homme dévoré par la folie à l'état pur ? Avançant avec toutes ces interrogations en tête, ma vigilance baissa d'un cran. Je ne vis donc point dans l'immédiat les énormes mains qui essayèrent de m'empoigner le corps à travers les barreaux de métal de la cellule, manquant de peu leur prise. Hansi m'agrippa et me tira vers l'arrière brusquement.

Hansi (suffoquant, d'un regard réprobateur): [T/P] ! Es-tu donc si insensée ?! Je t'avais pourtant mise en garde contre cet homme !

Je l'écoutai d'une oreille distraite, occupée à observer l'homme qui se tenait à présent devant moi dans toute sa grandeur. Il portait des haillons en guise de vêtements, et de la suie recouvrait son visage. Ses yeux trahissaient une certaine nervosité, la même qui devait transparaître dans mes propres pupilles. Il semblait las, fatigué d'avoir poireauté tout ce temps dans ce cachot, et pourtant, lorsqu'il me reconnut, un sourire illumina son vieux visage ridé.

Rovoff (s'exclamant): [T/P] ! Tu m'as tellement manqué... Place ton visage à la lumière pour que je puisse au moins voir à quel point tu as grandi !

Je regardai Hansi, qui arborait le même air étonné que le mien. Ne sachant pas trop comment réagir, j'acquiesçai, et me dirigeai vers la source de lumière qui émanait d'une bougie.

Rovoff (ému): Que tu es devenue grande, mon enfant ! Ton vieux père est fier de toi !
[T/P] (explosant, ne pouvant se contenir plus longtemps): Mais vous mentez ! Vous n'êtes pas mon père ! (puis, les larmes aux yeux) Le mien est mort, il y a de cela des années ! On ne peut pas faire revivre les morts !

Il y eut alors un long silence. Puis, Nicholas Rovoff secoua la tête, l'air réellement désolé.

Rovoff: Il y a tellement de choses qui t'échappent, mon enfant... C'est fou.
Hansi (prenant le relai sous l'air chamboulé de [T/P]): C'est justement pour cela que nous sommes venues ici. Nous voulons que vous nous éclairez un peu sur les mystères de ce « portail inter-dimensionnel ».
Rovoff (secouant la tête): Je regrette, mademoiselle aux lunettes, mais je ne parlerai qu'en tête-à-tête avec ma fille. Le bataillon n'est pas autorisé à avoir ces informations.
Hansi (en jetant un regard de biais à [T/P]): Oh, si ce n'est que cela ! Pas de problème !

Hansi hocha la tête à l'intention de Rovoff et, alors que ses pieds s'apprêtaient à quitter la salle, elle me fit un clin d'oeil en mettant sa main sur mon épaule. Ce geste voulait probablement signifier qu'elle s'attendait à ce que je lui raconte tout une fois l'interrogatoire terminé. Elle me faisait confiance. Mais je ne pouvais en dire autant de moi, me remémorant les paroles de Tristan: « Tu ne peux faire confiance à personne ». J'étais consciente que les informations que j'allais apprendre, considérant qu'elles ne soient pas empreintes du mensonge, pouvaient me faire renier le bataillon.