Chapitre 12

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Arrivé à sa hauteur, je pose fermement ma main sur l'épaule d'Antoine. 

Moi (chuchotant presque)
« Ca va aller mec. Respire. Tu dois pas avoir honte de pleurer. »

Il garde sa tête dans l'oreiller. Il ne me rejette pas, il n'en a probablement pas la force. Mon pouce lui caresse frénétiquement l'épaule, d'une manière rassurante (et non pas érotique). Il se relâche et s'effondre de plus en plus. On le dirait vraiment inconsolable, j'ai rarement vu quelqu'un dans cet état. Je m'assois à côté de lui sur le lit, mon dos me tue, le sol n'était vraiment pas confortable. Je reste là quelques temps, la situation semble s'apaiser. Je l'entends encore respirer par à-coups, comme après un profond chagrin. J'ai encore du mal à comprendre la situation, il me déteste et je suis là à le réconforter, en lui caressant l'épaule, sans me faire jeter. Mon cerveau a du mal à tout gérer je crois. Le temps défile. Il semble s'être endormi. J'entends des respirations profondes, il ne bouge pas, il semble aller un peu mieux. 

23h

Je commence à bouger discrètement la chambre. Je me retourne en sortant et me prends le mur du couloir. Pas super fort, mais assez pour provoquer un nouveau saignement du nez. « Putain » dis-je un peu trop fort. 

Antoine (émergeant)
« Quoi, qu'est-ce qu'il se passe? T'es encore là? Attends, c'est moi qui t'ai fait ça? Désolé mec, vraiment, j'étais pas conscient. »

Moi (me tenant le nez)
« Non, ta chambre est pas configurée comme la mienne, je me suis pris le mur. Désolé de t'avoir réveillé. »

Antoine
« Ça va, c'est pas grave. Viens, je vais te réparer ce nez. Encore une fois. » (Il me fait un sourire timide)

On est dans sa salle de bain. Il a tout ce qu'il faut, il refait la même combine que la dernière fois.

Antoine
« J'ai souvent pris des ballons pleine tête, donc souvent eu des saignements. Faut bien apprendre à maîtriser tout ça! » (Il sourit)

Je n'ose pas vraiment parler, je lui réponds par un sourire.

Antoine
« Je suis désolé. Je n'aurais pas dû te juger sur ta vie sexuelle. Ca me dégoûte, mais tu es bien au-delà de ça. Je reconnais mes torts. Merci de m'avoir assisté ce soir, même sans discussion, ta présence m'a fait beaucoup de bien. »

C'est atrocement ambiguë ce qu'il me dit là. Et pourtant, il me rejette son homophobie à la gueule. Je comprends rien, donc je souris. 

Moi
« Je suis là pour t'entraîner, mais aussi te supporter. Comme tout le monde, encore une fois. »

Antoine
« Ouais... Mais t'as su garder ton calme, prendre le temps, je pouvais rien faire au final. A part t'écouter. Merci. » (Il me sourit à nouveau, toujours timidement)

Il me propose d'aller chercher un truc à manger, avant d'aller dormir. On descend, j'espère le faire un peu plus parler pour le soulager. Les gars nous avaient préparé deux plateaux, à réchauffer. Il y a vraiment un bon état d'esprit ici. On passe à table.

Antoine
« J'ai pas mangé un truc depuis 1 jour environ. Désolé de pas avoir été au top ce matin »

Moi
« J'avais vu ton état, je l'avais pris en compte. »

Antoine (mélancolique)
« J'te jure, je peux rien avaler.. Mon ex va me prendre ma fille. Je ne peux rien faire. J'aurais à peine le droit de la voir les week-ends, mais je suis toujours en matchs, en déplacements... » (Ses yeux se brouillent, son regard redevient fixe)  

Moi (gêné)
« Ah.. Je vois.. Je peux te proposer de finir de manger et d'aller en parler à l'extérieur? On reprend des petites forces avant demain. »

Antoine
« D'accord.. »  

Le repas se fait dans le silence. Chacun est un peu sur son téléphone, je vois qu'il regarde à nouveau les photos de sa fille. Son ex n'y apparaît pas. Elle est vraiment mignonne, une bouille d'ange, comme son papa. Malgré son fort caractère, on ne peut pas nier la beauté de cet homme. Ses yeux, plus particulièrement. Enfin bref, je m'écarte du sujet. Nous finissons le repas, et nous posons dans la véranda. Je peux fumer, c'est aéré, et il ne fait pas trop froid avec cette sorte de flamme dans un tube qui réchauffe la pièce. La discussion commence doucement, puis il se lance.

Antoine
« J'ai reçu un appel de l'avocat de mon ex. Je n'ai plus le droit de la contacter, ni de contacter ma fille jusqu'à nouvel ordre. Elle déforme la réalité pour en tirer profit et me faire perdre la garde de ma fille. Elle n'a jamais supporté que je la quitte, il y a un mois maintenant. Je ne peux pas me défendre. On m'arrache tout. Je n'ai plus rien... » (Il commence à pleurer)

Moi (recrachant ma fumée loin de lui)« C'est horrible comme situation. Elle n'a pas le droit de faire ça! Tu ne peux pas perdre la garde de ta fille si tu n'as jamais rien fait Antoine! »

Antoine (reniflant)
« Elle ment! Elle a dit que je la battais, devant notre fille. Je n'ai jamais levé la main sur quiconque. Même toi, c'était un coup de tête. Je suis impulsif, ok, mais jamais vis à vis de ceux que j'aime. Jamais, putain. Les médias vont s'emparer de l'affaire, ma carrière est finie. »

Moi
« Dans un premier temps, te soucie pas des médias, du monde du football et de tout ça. Ta famille c'est ta priorité. Il faut que tu contactes un avocat. Il faut que tu anticipes tout ça, comme sur le terrain Antoine. Toujours anticiper pour mieux frapper. Déstabilise sa défense. »   

Antoine
« Mais comment? Je dois être sûr que c'est quelqu'un de confiance, que l'affaire ne fuitera pas, je n'ai pas le temps avec ce stage.. » 

J'ai une idée, mais elle est totalement stupide.

Moi (soupirant)
« Je connais quelqu'un Antoine... Elle pourra peut-être t'aider..» 

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