CHAPITRE 26

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CHAPITRE 26

   Lorsque Sam ouvre enfin les yeux au bout de cinq longs jours d'attente, le soleil commence à se lever. Je suis en train de raconter n'importe quoi comme d'habitude. Je lui dis que lorsqu'il se réveillera nous irons vivre sur une île et qu'il fera sans doute craquer toutes les filles mais qu'il ne faudra surtout pas qu'il me laisse seule sur la plage trop longtemps car c'est toujours lui qui me rappelle quand je dois mettre de la crème.

   Alors que je regarde son visage, très fatigué et creusé mais toujours avec les mêmes traits si charmants, ses paupières tressaillissent. Je ne réagis pas immédiatement car dans l'état où je suis, par moment, j'ai carrément l'impression qu'il me parle. Ses paupières bougent de plus en plus et ses yeux finissent par s'ouvrir.

   Son regard se pose immédiatement sur moi et je lui dis le plus naturellement du monde :

   — C'est l'île qui t'a donné envie de revenir parmi nous ou bien les filles ?

   — La crème solaire, me répond-t-il la voix fatiguée mais pétillante de vie.

   J'explose de rire et me jette dans ses bras.

   Le temps semble s'arrêter pendant un moment puis je me dis qu'il faut peut-être prévenir un médecin que mon frère vient de se réveiller.

   Après plusieurs examens tout semble normal. La douleur est bien présente mais les anti-douleur aident Sam à rester éveillé. Nous ne parlons pas, ce n'est pas nécessaire.

   Bizarrement, pendant tout le temps où j'attends que l'on m'annonce qu'il va bien, je ne ressens aucune joie alors que ça fait des jours et des jours que je n'attends que son réveil. Au début, je me sens coupable et je remets ça sur le fait que mon corps et mon esprit ne sont plus capables de ressentir quoi que ce soit à cause de la fatigue. Mais en fait ce n'est pas seulement ça. Le fait est qu'au fond de moi, je savais pertinemment qu'il se réveillerait. Ce n'était qu'une question de temps.

   J'en étais convaincue depuis le début, depuis le moment où il s'est enfui dans les bois je savais que nous serions réunis à un moment donné car je savais pertinemment qu'il ne me laisserait jamais seule, tout comme jamais je ne l'aurai laissé. Malgré tout ce que j'ai pu me dire, lui en vouloir quand je pensais qu'il ne voulait pas rentrer à la maison, au fond de moi je savais qu'il ne m'abandonnerait jamais. Et il ne l'a pas fait, il a tenu sa promesse. C'est mon double, mon tout, l'unique personne dont j'ai besoin dans ma vie et aujourd'hui, pour la première fois depuis un temps qui ma paru infiniment long, je revois enfin ses magnifiques yeux bleus.

   Nos parents arrivent assez rapidement et je peux voir la joie dans leurs yeux. Ma mère semble plus heureuse que jamais. Ça faisait tellement longtemps que je ne l'avais pas vu sourire.

   À la fin de cette première journée auprès de mon frère, les infirmières nous amènent le repas dans la chambre. Sam a passé beaucoup de temps allongé, nourri par des tuyaux alors ses premiers repas doivent rester liquides et en faible quantité le temps de réhabituer son système digestif. Pour ma part, cela fait plusieurs jours que je n'ai pas mangé un véritable repas mais le fait de retrouver mon frère m'a ouvert l'appétit. Je me jette sur mon plateau repas qui n'a pas l'air si bon que ça mais la faim l'emporte sur le reste, pendant que Sam mange ce qui ressemble à de la purée de brocoli. La couleur et l'odeur ne donnent pas du tout envie.

   — Fais attention, ne mange pas autant tu vas grossir, me lance Sam.

   — C'est bien dommage que ce ne soit pas de la purée de carotte, ça t'aurait peut-être rendu plus aimable.

   Nous sommes pris d'un fou rire, nos parents nous observant depuis le fond de la chambre.

   — Ça fait longtemps que je ne vous avais pas vu vous chamailler comme ça, comme quand vous étiez petits, dit notre mère.

   — Nous faisons ça tout le temps maman, c'est juste que tu ne faisais plus assez attention à nous pour t'en rendre compte.

   Ma réponse jette un froid dans la pièce et Sam fait mine de s'intéresser à ce qui se trouve dans son assiette.

   — Bon, je pense que l'on ferait mieux d'y aller, nous allons vous laisser vous retrouver, dit mon père en se levant de son fauteuil.

   Ils embrassent Sam puis sortent de la chambre et je sens le regard de mon frère peser dans mon dos.

   — Quoi ?

   — Tu étais vraiment obligée de lui parler comme ça ?

   — Écoute Sam, tu ne sais pas ce qu'il s'est passé à la maison pendant ton absence et...

   — Je m'en fou Mélo. Nous sommes enfin réuni depuis... depuis je sais même pas combien de temps alors s'il te plaît, mets tout ça de côté.

   Il a raison, peu importe tout ce qu'il s'est passé pendant qu'il n'était pas là. Maintenant il est de retour et en bonne santé, c'est tout ce qui compte.

   — D'accord.

   Nous passons le reste de la soirée dans les bras l'un de l'autre à parler de tout et de rien. Je n'ose pas trop évoquer toute cette histoire alors je préfère plaisanter sur la chemise horrible qu'il porte.

   Pour la première fois depuis plus de deux semaines maintenant, non seulement je ne me sens plus seule, mais je me sens moi. J'ai enfin l'impression de reprendre pleinement le contrôle de mon esprit et de mon corps. Sam est de retour à mes côtés, je suis enfin complète.

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