CHAPITRE 25 | Mâcon et proposition.

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On pense parfois que le temps efface les douleurs, les traumatismes et les souffrances. Mais je commençais à penser que tout cela n'étaient que des phrases préfabriquées, servant à réconforter les petits tracas du quotidien.

Voilà quinze jours déjà que Demoiselle avait quitté les écuries, je n'avais aucune nouvelle. Où était-elle ? Nora l'avait-elle vraiment gardée ? Qu'allait-elle devenir ?

Je montais Solista presque chaque jour, déterminée à aller toujours plus haut, toujours plus vite. Si Nora pensait m'avoir ôté le goût de la compétition, elle s'était trompée : jamais je n'avais eu ce goût de victoire aussi fort. J'étais désespérée d'avoir du quitter Demoiselle, comme je l'avais été pour Shamrock. Mais cette fois ci, j'avais la hargne, je voulais prouver de quoi j'étais capable.

J'étais engagée pour le week-end dans un trois étoiles à Mâcon-Chaintré, à plusieurs heures de route des écuries. J'avais donc prévu de partir deux jours avant, avec Edouard au volant et Lucille nous rejoindrait la veille pour me coacher le jour J. Nous arrivâmes dans l'après-midi aux écuries, j'installais Solista dans son box, dans le calme. La météo était clémente, je n'avais jamais vraiment visité la Saône et Loire, et je proposais de profiter des deux jours libres à venir pour mieux connaître le coin.

Je m'étais considérablement rapprochée d'Édouard ces dernières semaines, il me soutenait tous les jours et j'étais même parvenue à lui redonner l'envie de monter à cheval. Il avait donc emprunté un cheval à son père, Orka Du Lac, une jument de quinze ans, qui avait été mise à la retraite quelques mois auparavant. Édouard la montait simplement pour reprendre confiance et ressentir les nouvelles sensations. Orka avait eu une carrière exemplaire et méritait sa retraite plus que tout, il n'était donc pas question de l'épuiser à la tâche.

Mais malgré notre bonne relation, l'idée du couple officiel ne me convenait pas et il semblait l'avoir accepté et même s'être fait à l'idée que je ne tombais pas facilement dans les bras de quelqu'un.

Adam n'avait jamais répondu à mon message envoyé le jour du départ de Demy, j'avais mis ça de côté, préférant oublier tout ce qui ne me convenait pas.

J'étais simplement déterminée, j'avais placé mon cerveau sur des rails et je traçais mon chemin, sans me perdre dans des considérations inutiles. Je n'avais pas perdu espoir, bien au contraire : j'étais plus motivée qu'auparavant. Mes pensées étaient triées, organisées, elles avaient cessé de m'envahir.

Nous passâmes un premier jour formidable, je détendais Solista le matin à la fraîche dans un warm-up à cent vingt centimètres avec d'autres cavaliers, participants ou non au concours du week-end. L'ambiance était bonne, les coachs des concurrents nous donnaient aussi des conseils. Nous faisions ainsi la connaissance de nouveaux professionnels, chose qui pouvait n'être que bénéfique pour ma situation. En observant la détente des autres depuis le bord de la carrière je rencontrais un jeune éleveur de selle-français que je ne connaissais pas et qui semblait pourtant m'avoir déjà rencontré :

"Mais si, je me souviens très très bien de toi. Tes résultats à Chantilly il y a quelques années m'avaient impressionné...avec, comment s'appelait ton cheval déjà ?

- Shamrock.

- C'est ça ! Il t'accompagne toujours en concours ?

- Non...j'ai malheureusement du le vendre."

Il semblait déçu et finit par dire :

"Ce sont des choses qui arrivent. Mais généralement, lorsqu'un cheval de coeur s'en va, c'est pour laisser plus de place à un nouveau."

Je souriais doucement, essayant de me convaincre de la véracité de ces propos.

"Il y a des cafés sympas à Mâcon, je peux me permettre de t'inviter ? Me demanda soudain l'éleveur.

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