68. CEUX QUI FÊTAIENT UN ANNIVERSAIRE

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J-2. Et nous avions officiellement perdu Eden et toute sa troupe. Adel continuait de m'envoyer des messages narquois, m'annonçant qu'il était déjà au courant de tout, de la couleur des guirlandes aux cadeaux que tout le monde allait lui faire. Je savais qu'il exagérait, mais je savais aussi qu'il n'était pas si loin de la vérité. Et plus les jours, non les heures passaient, plus je me rongeais les ongles à essayer de trouver le cadeau parfait pour lui, ainsi que la solution pour passer le plus de temps avec lui. Ainsi, je restais pendu à mon téléphone à papoter avec lui, chaque heure de ma journée. De tout, de rien, mais surtout de discussion qui me rappelait celles que nous avions au lycée, avant de nous mettre ensemble. Et cela me rendait nostalgique d'une époque que je pensais franchement nulle. La veille, nous avions passé notre après-midi entière dans un cinéma, à regarder trois films d'affilés. Et je devais bien avouer qu'il s'agissait plus d'un technique pour passer du temps avec lui, qu'une réelle envie de passer des heures et des heures dans une salle noire. J'aimais le cinéma, mais mes yeux avaient leur limite. Mais lui comme moi ne nous l'étions pas avoué. Et j'avais eu de nouveau cette impression de ne plus savoir quoi dire, ou quoi faire. Comme il y a des années.

– Tu comptes réintégrer l'équipe en jouant comme ça ? me héla Isaac de l'autre bout du terrain.

Et en guise de réponse, je lui renvoyais la balle de toute mes forces. Je ne savais pas vraiment pourquoi j'avais accepté de faire une partie avec lui, Eden, et mon équipe du lycée. C'était des retrouvailles un peu étranges mais... J'appréciais. De voir ce qu'étaient devenus mes anciens coéquipiers, partis à l'autre bout de la France pour certains pendant un ou deux ans. Mon ancien capitaine avait l'air d'avoir pris dix ans, en seulement trois, et je n'étais pas prêt de m'en remettre. Cependant, je devais avouer que je ne m'étais pas senti aussi à l'aise sur un terrain depuis longtemps. Jouer me manquait beaucoup. Les compétitions me manquaient. Les longs trajets en voiture, avec mes parents et ma sœur qui m'accompagnaient à l'autre bout de notre département pour me voir suer sur un terrain et me coacher depuis les gradins...

Mon père ne s'était jamais réellement fait à l'idée qu'il n'était pas un coach, et qu'il n'avait pas le droit de me hurler des consignes depuis les gradins. 

– Je n'ai pas dit que j'étais encore sûr...
– Bien sûr que si..., siffla Eden.

Eden voulait que je revienne. Il me disait qu'un sport m'aiderait à entretenir ma santé (ce qui n'était pas faux), que le volley était ma passion (ce qui n'était pas tout à fait faux non plus) et que j'avais grand besoin de me changer les idées. Ce qui était également vrai.


Après les matchs, et des litres de transpiration plus tard, nous étions tous affalés dehors, dans le parc à côté du gymnase. Et tandis que Isaac venait de lancer une grande discussion avec Jules à propos de leurs études respectives, je ne pus m'empêcher de l'envier. Eden avait une main sur son avant-bras, et le couvait avec un regard que je ne connaissais que trop bien.

J'en avais envie, moi aussi.

Avoir quelqu'un ou non dans ma vie m'avait toujours été plus ou moins égal. En réalité, je n'avais jamais couru après les relations, et ne comptais pas m'y mettre de si tôt. Et pour cause, je savais déjà que personne n'arriverait à la cheville du garçon avec qui j'avais passé les meilleurs moments de ma vie. Je soupirai, perdu dans mes pensées, quand le regard d'Eden se posa sur ma personne. Ses sourcils fins se froncèrent légèrement, comme s'il avait compris que quelque chose me chagrinait, et il me fit un petit signe discret de la tête. Comprenant, son attention, je me levais, et Eden prétexta avoir oublié quelque chose dans le gymnase. 


Quand nous fûmes suffisamment éloignés, et que nous rentrâmes à nouveau dans le bâtiment, Eden s'arrêta devant moi. 

– Quelque chose ne va pas, hein ?

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