Mon ange [terminée]

Chapitre 17

Il s'approche de son frère, qu'il soulève par le cou et vient plaquer au mur. Ce dernier ouvre les yeux, paniqué dans un premier temps.

–Espèce de traitre !

Lorsqu'il se rend compte de qui le tient par le cou, il se détend et étrécit les yeux.

–Est-ce que c'était ton plan depuis le début ?! Hein ?! Tu as dénoncé notre planque à Méphisto pour rejoindre son armée dans le but de la sauver pour te la taper après ?!

Méphisto ? C'est qui lui ? Azaël ricane. Il arbore un visage machiavélique qui me fait beaucoup penser à celui de mon géniteur. Il saisit le poignet de son frère et, comme si de rien n'était, le tord et l'éloigne de lui. Le visage de Sam se tord de douleur. Azaël s'écarte de lui, furieux.

–Ne t'avise plus jamais de me toucher. Jamais, t'as compris ? Toi et moi on sait très bien que tu fais pas le poids contre moi.

Sam revient néanmoins à la charge et lui décroche un coup de poing à la mâchoire. Là, Azaël, d'ordinaire effrayant à la base se transforme. Ses traits sont déformés par la colère, ses yeux encore plus noirs que d'habitude, et une aura sombre se dégage de lui. Il se jette sur son frère, le prend par le col et le plaque contre une des bibliothèques, ce qui fait tomber plusieurs livres à leurs pieds, et commence à le matraquer de coups de poings. Suis-je réellement à l'origine de cette baston qui n'a pas lieu d'être? Je m'approche d'eux tout en ayant peur de recevoir un coup par accident. J'appelle Azaël, je tente de le sortir de l'état second dans lequel il se trouve. Sam, lui, est à deux doigts de perdre pied, le visage tuméfié. La panique m'envahit. J'ai peur. J'ai beau tirer Azaël en arrière, rien n'y fait. Alors, je hurle de toutes mes forces:

–Stop !

Et c'est à ce moment-là que Azaël est propulsé contre le mur d'en face. Est-ce Samaël qui a fait ça ? Même dans son état ? Sous le choc, ils m'observent tous les deux.

–Quoi ? leur dis-je.

Ils se regardent et un flot d'informations semble passer entre eux sans que je n'y comprenne rien.

–Tout s'explique. Voilà pourquoi il veut autant ta mort, énonce Sam tout bas.

–Pourquoi ?

–Emmy, as-tu conscience de ce que tu viens de faire ?

Je les regarde à tour de rôle.

–Bon, vous arrêtez les énigmes oui ?

–C'est toi qui as propulsé Az là-bas.

–Et tu as fait pareil avec ton père. C'est pour ça qu'il avait une blessure à la tête et qu'il paraissait paniqué et encore plus déterminé à t'éliminer... reprend Azaël.

C'est vrai que ce moment m'était complètement sorti de la tête. J'avais crié et ensuite je l'ai vu contre le mur, la tête en sang. J'ai cru que c'était Sam mais non, puisqu'il n'était pas là. Je fronce les sourcils et ris jaune.

–Bien sûr. Comme si j'avais les capacités de le faire !

–Réfléchis Emmy. Tu es la fille d'un archange et d'un ange déchu. Ce n'est pas improbable que tu aies des pouvoirs. D'ailleurs, ça me rappelle une histoire qui se serait déroulée il y a des milliers d'années.

Sam fait un pause et sonde sa mémoire.

–Dans les mythes les plus anciens, on trouve l'histoire d'amour entre l'ange déchu Danel et l'archange Ariel. Ils s'aimaient passionnément malgré l'interdiction qui planait au-dessus de leur couple. Et, apparemment, cet amour était tellement fort qu'un jour, en serait né un petit garçon. Ce dernier aurait hérité des pouvoirs mélangés de ses parents, sans les ailes, ce qui en a fait tout de même un ange assez puissant. Malheureusement, ses parents ont vite commencé à se rendre compte de l'étendue de ses pouvoirs, ainsi que les archanges. Alors ceux-ci les ont tués tous les trois. Ils auraient évité que la nouvelle ne se propage et aucun bébé miracle n'est né depuis. Mais, ça reste un mythe, rien n'indique que c'est vrai.

–L'enfer, le paradis, les anges, ça aussi ce sont normalement des mythes, déclaré-je. Vous croyez vraiment que c'est moi qui ai expulsé Azaël ?

–Je suis bien trop blessé pour l'avoir fait, rétorque Sam.

Je sens le regard d'Azaël peser sur moi. Il m'observe fixement.

–Regarde ton cou, me demande-t-il.

Je me dirige dans le hall et m'observe dans le miroir. La petite mais profonde entaille a disparu. Et, je comprends où il veut en venir. J'ai guéri beaucoup trop rapidement. Je les rejoins, incrédule.

–Et ta main, l'autre jour, quand on s'est vu pour la première fois, était entaillée également. Lorsque je t'ai revue dans la forêt, tu n'avais déjà plus rien.

J'ai l'impression que le ciel me tombe dessus. Les preuves sont accablantes. Ma tête pèse une tonne. Je vacille légèrement et décide donc de m'asseoir sur le fauteuil. Je ramène mes genoux contre moi, oubliant ma tenue légère. Je me repasse ces différentes scènes qui prouveraient ce qu'ils racontent. Tout à coup, un autre souvenir étrange me revient en tête ...

J'avais dix ans. Nous étions mes parents et moi invités chez des amis à eux. Ils avaient un fils un peu plus âgé, Cole. Nous étions entrain de jouer à cache-cache lorsque, par le malheur des choses, je suis tombée sur la tête. Il a paniqué, je l'entends encore hurler après mes parents, pendant que moi j'étais allongée à terre, à demi-consciente. Beaucoup de sang s'écoulait de ma tempe et venait colorer les différents galets sur lesquels j'étais couchée. Mes parents m'ont emmenée chez le médecin et, déjà là, je me sentais mieux. On m'a auscultée en urgence mais, constatant que je n'avais absolument rien du tout à la tête, le docteur a crié sur mes parents à propos de leur irresponsabilité de lui faire perdre du temps précieux, et bla bla bla. Et c'est vrai, je ne ressentais plus rien. Tout était guéri. Je m'en souviens car j'ai été punie pendant une semaine car ils croyaient que je leur avais fait une mauvaise blague. Quant à Cole, il est aussi resté furieux contre moi un bon bout de temps. Et dire que maintenant je suis enfin en mesure de comprendre ce qui m'est arrivé. Ce n'est pas pour rien que je ne suis presque jamais malade également.

–J'ai des... pouvoirs ? Mais, comment savoir ceux dont je bénéficie ? Selon vos propos, cela dépend un peu de la sorte de l'ange, non ?

Sam hoche la tête.

–Oui, ça dépend. Il y a moyen qu'on fasse des recherches sur le mythe dont j'ai parlé tout à l'heure. Peut-être que tu as les mêmes dons que l'enfant miracle.

Je me relève et scrute la pièce en silence. La tension est palpable et la situation me procure un sentiment de malaise. Azaël se rhabille discrètement et enfile son nouveau t-shirt noir, un slim de la même couleur, des chaussettes et ses chaussures. Je pose mon regard sur Sam. Il m'observe de la tête au pied, dégouté. Il secoue la tête.

–Bon, je vais aller faire mes recherches de mon côté. Tu devrais te changer Emmy.

Il fait déjà demi-tour mais Azaël le stoppe avant qu'il ne quitte la pièce. D'ailleurs, maintenant que j'y pense, je n'avais jamais autant entendu le son de sa belle voix.

–Arrête de faire l'enfoiré. Il s'est rien passé avec ta nana, les petites prudes dans son genre m'intéressent pas. Je lui ai juste prêté ma chemise pour dormir.

Mon léger sourire s'évanouit face à ce qu'il vient de dire. Il me lance un regard dédaigneux et s'en va. Je devrais m'en ficher de ce qu'il pense de moi, c'est un imbécile. Pourtant, ses mots me vont droit au cœur. Pense-t-il réellement ça de moi ? S'est-il servi de moi hier, étant rempli d'adrénaline ? Une envie de pleurer m'envahit. Je ne m'attendais à rien de sa part mais quand même. Être rejetée, ce n'est pas une sensation agréable. Sans dire un mot, de peur d'exploser en pleurs, je saisis mes nouveaux habits et me dirige vers le hall.

–Je... Je vais me changer dans l'entrée, je reviens.

Je referme la porte derrière moi et glisse à terre. C'était moins une, je fonds en larmes et relâche en même temps toute la pression de ces derniers jours.