Chapitre 4.

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« La Mort — la Mort dont je te parle — n'est pas celle qui suivra ta chute, mais celle qui précède ton apparition sur [scène]. C'est avant de l'escalader que tu meurs. Celui qui dansera sera mort — décidé à toutes les beautés, capable de toutes. Quand tu apparaîtras, une pâleur — non, je ne parle pas de la peur, mais de son contraire, d'une audace invincible — une pâleur va te recouvrir. Malgré ton fard et tes paillettes tu seras blême, ton âme livide. C'est alors que ta précision sera parfaite. Plus rien ne te rattachant au sol tu pourras danser sans tomber. Mais veille de mourir avant que d'apparaître, et qu'un mort danse sur le [devant de la scène]. » , Le Funambule, Jean Genet

Jimin sortit de scène tremblant et livide

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Jimin sortit de scène tremblant et livide. Il s'appuya contre le mur pour marcher alors qu'on s'agitait autour de lui pour lui faire de l'air. Il finit par glisser accroupi, contre un mur, la tête ballottant sur ses genoux. Son costume de scène lui avait scié les hanches pendant qu'il dansait. Avec l'adrénaline, il n'avait pas senti la brûlure mais maintenant c'était autre chose. On lui releva la tête pour éponger son front avec un linge froid. Il respirait fort, ça tournait autour de lui et les bruits des gens qui courraient à droite et à gauche finissaient de l'épuiser. Il referma les yeux:

- Ça va comment ? Tu veux de l'oxygène ? Demanda une voix féminine.

Comme il ne répondait pas, on lui appliqua directement le masque sur le visage pour l'aider à reprendre ses esprits. Il sentit qu'on le relevait en tirant sous ses aisselles pour l'emmener jusqu'à sa loge. Il se laissa faire, les membres flasques. On l'assit sur un canapé. Il plia sa nuque, laissant l'arrière de son crâne taper le mur et quelqu'un tira sur ses chaussures et ouvrit sa veste.

Au bout de quelques minutes, il reprit ses esprits et retira le masque. Un membre de l'équipe lui tapota l'épaule :

- Beau boulot, Jimin. Tu as été parfait.

Il remercia sans comprendre, complètement groggy. Sa tête roula, sur le côté, comme si ses muscles n'avaient plus aucun tonus. Pendant quelques secondes, on crut qu'il avait fait un malaise mais sa petite main se posa sur l'assistance respiratoire qu'il écarta de son visage pour parler, les yeux toujours clos :

- Il y avait des chaises vides au fond... Je... Je les ai vu...

Un silence gênant s'installa avant qu'il n'y ait un concert de paroles rassurantes qui emplissent la salle : « Mais non, ne t'inquiète pas pour ça. », « Tu es toujours aussi doué. » , « La performance va énormément plaire ! », « C'est juste un petit coup de mou. ».

Un coup de mou ? Il savait ce qu'il faisait sur scène et ça n'avait rien de mou. Il enchaînait des mouvements de plus en plus techniques, sur des rythmes de plus en plus rapides. Il avait les poumons d'un marathonien putain. Et maintenant la souplesse d'un gymnaste. Lui et Hoseok s'étaient dit que ça plairait de rajouter du sensationnel aux mouvements de danse. Ils avaient passés des mois à l'écarteler dans tous les sens. Parfois ils s'étaient mis à trois sur Jimin, deux maintenant ses chevilles en grand écart et un troisième tirant sur les bras pour amener son torse au sol. Il avait tellement souffert pour gagner en souplesse... Il espérait au moins que dans les mois qui viendraient on parlerait de son corps pliable comme d'un vrai talent :

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