"Que ta solitude, paradoxalement, soit en pleine lumière, et l'obscurité composée de milliers d'yeux qui te jugent, qui redoutent et espèrent ta chute, peu importe : tu danseras sur et dans une solitude désertique, les yeux bandés, si tu le peux, le...
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Jimin avait bénéficié d'une loge resplendissante pour ce soir si spécial. Ce soir, il participait à un grand show rediffusé sur la chaîne nationale. Ce soir, il se révélait de nouveau. Il avait enfin l'occasion d'exposer son nouveau personnage et ses performances aux yeux exigeants du public. Il était nerveux. Le mot était faible.
Depuis son réveil, ce matin, jusqu'à cette fin d'après-midi, les poussées de trac lui sautaient à la gorge, le faisant frémir, transpirer et stopper tout geste pour passer une main fébrile dans sa chevelure. Il n'avait jamais été dans un tel état. Il jouait sa carrière. Et sa carrière, pour Jimin, c'était question de vie ou de mort. À ses yeux, rien n'était plus crucial.
Il s'était levé aux aurores pour laisser Hoseok le contorsionner dans tous les sens. Puis, en fin de matinée, ils étaient arrivés dans l'immense stade réquisitionné pour l'occasion. Avait commencé le carrousel incessant des longues listes d'instructions et des pauses techniques qui allaient de paire avec ce genre d'évènement. Il écouta sagement, attroupé sur scène, avec tous les autres artistes. Jimin observait l'immensité du stade. Tous ces sièges encore inoccupés, il les voyait déjà, plongés dans l'obscurité quand, ce soir, il se tiendrait à cet endroit même. Il eut l'impression que le murmure hurlant des milliers de spectateurs lui courait dans le dos. Et si... Et si il était ridicule ? Et si ça ne marchait pas, si on disait qu'il en faisait trop ? Si on le trouvait vulgaire ? À côté de la plaque ? Si on le tournait au ridicule ?
Il secoua la tête et reprit discrètement le contrôle de sa respiration. Le petit chanteur regarda d'un coup d'œil bref que personne ne le regardait. Autrefois, Jimin avait toujours un mot avisé, pour tout le monde, et profitait de ces occasions pour prendre des nouvelles de tous ses collègues. Aujourd'hui, il avait enfoncé sa casquette sur ses traits tirés et gardait les yeux baissés sur ses chaussures. Il les craignait. Il craignait leur gentillesse surjouée. Il craignait qu'ils ne viennent à lui que pour l'encourager. Il ne voulait pas de ça, Jimin. Il voulait être leur pair, leur égal. Il voulait lire dans leur indifférence, l'évidence de qui il était, en tant qu'artiste, et sa légitimité. Il jeta un regard bref vers le vide du stade : un regard blessé. Pourquoi ? Pourquoi, un jour, l'avait-on oublié ? Qu'avait-il fait ? Que devait-il faire pour récupérer cet amour qu'il pensait infaillible ? Parce que Jimin, il était prêt à tout.
Il se concentra de nouveau sur sa respiration pour éviter à la sueur fièvreuse de lui coller dans le dos. Il avait déjà pris deux douches depuis son lever. L'angoisse l'épuisait et il devait s'économiser.
Alors qu'une femme donnait des explications d'un ton pédagogue, entamant gravement sur la pause déjeuner, une main affectueuse se posa contre son bras et il se retourna en sursaut. Taehyung venait d'arriver, il avait bien deux heures de retard. Il sourit à Jimin et tout le monde le pardonna aussitôt d'avoir passé autant de temps à se pomponner. Il était rayonnant :
- Salut, Jimin.
- Tu as eu une panne de réveil, ce matin ? Coupa son ami, sarcastique.
Taehyung eut un rire grave, taquin. Il jouait la carte de la séduction pour faire passer ses caprices de star :
