Chapitre 15.

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Yoongi guettait Jimin et il arrivait à lui adresser quelques mots en toute discrétion de temps en temps, dans les toilettes par exemple. Il faisait tout pour que leurs rencontres aient l'air d'être le fruit du pur hasard. Ce n'était bien entendu pas le cas. Mais Yoongi avait un peu peur que son ami soit gêné d'observer tous les efforts qu'il faisait pour qu'ils s'échangent trois mots dans la journée. Parfois c'était une heure d'attente pour un bonjour. Rien de glorieux en somme.

Yoongi ne pouvait pas s'adresser à lui frontalement et exposer leur « relation » au grand jour. Il voulait faire tout ça en cachette de la maison de disque car quelque part, il avait l'impression qu'ils auraient pu s'en servir contre eux. C'était bien une chose qu'il ne voulait pas. Une intuition sans doute. Une bonne intuition, peut-être.

Mais à vrai dire, Jimin n'avait jamais été stupide - comme on le faisait croire - et il avait déjà relevé le phénomène. Comment ne pas le voir ? Yoongi, pendant toutes les années où il avait travaillé auprès du chanteur, il ne lui avait jamais offert que des regards morts ou, au mieux, des regards assassins, dégoûté par tout ce qu'il était et représentait. Jimin avait d'ailleurs fait de même, en réponse, ne sachant que faire de cette détestation.

À vrai dire, ce changement brutal ne mettait pas vraiment à l'aise le cadet. Jimin n'avait pas envie de remuer le passé avec Yoongi. Il trouvait étrangement rassurant de l'avoir avec lui dans la compagnie même si cela ne lui épargnait guère la violence de son quotidien. Mais s'asseoir plus longuement aux côtés de son ancien ami pour bavarder alors que tant de temps était passé lui donner la chair de poule. Il y avait tellement de nombreux morceaux à recoller entre eux... Et puis, Jimin était-il seulement capable d'être encore le Park Jimin que Yoongi voulait voir ? Le voulait-il seulement? Savait-il qui il avait été?

Cependant, un jour, le rappeur le rejoignit sur un balcon sur lequel Jimin se reposait en regardant la route en contrebas et il lui tendit un morceau de papier :

- Tiens, c'est mon numéro. Si un soir tu as envie d'une pizza, tu m'appelles. Tu m'appelles et tu me commandes une pizza, d'accord?

Jimin avait pris rapidement le numéro, l'avait caché dans sa petite paume et avait observé le rappeur en fronçant les sourcils d'incompréhension. L'autre lui avait adressé un sourire en coin malicieux avant de repartir. La façon dont il avait agrippé rapidement la boulette de papier lui avait suffi pour savoir qu'il appellerait.

Jimin s'efforçait d'être « Sexy Jimin » à présent. Il avait retrouvé des cheveux foncés et pris une nouvelle injection dans le menton. Ils ne l'habillaient plus qu'en costumes sombres très ajustés, les yeux charbonneux. Les chorégraphies étaient centrées sur des mouvements langoureux du bassin et Hoseok s'était bien bidonné en voyant Jimin rougir devant son reflet lorsqu'il les interprétait. Il n'avait jamais fait des choses pareilles. Il avait fait remarqué « Et dire que mes parents vont me voir faire ça à la télévision... ». Hoseok n'avait ri que plus fort en entendant la remarque. Jimin avait tout pour être "Sexy Jimin" physiquement... Mais il avait toujours ce putain de sourire trop gentil, s'exaspérait le directeur. Ils avaient beau tout essayé pour le rendre sexuel et désireux, il avait encore cette aura ingénue qui transparaissait. Le Directeur Oh en était désemparé.

Le photoshoot du comeback commençait et ils n'avaient toujours pas de solution pour ça. Ça faisait maintenant deux heures qu'ils étaient arrivés sur la plage qu'ils avaient privatisés pour l'occasion et qu'ils avaient installé le matériel. Le directeur, emmitouflé dans sa grosse doudoune avait tenu à être présent pour voir comment sa pouliche allait s'adapter à son nouveau personnage et lui remettre un coup de cravache s'il ne faisait pas assez d'efforts. Il serrait à présent sa tasse de café brûlant entre ses doigts rougis par l'après-midi glacial et nuageux qui se profilait. Évidemment, l'air marin n'arrangeait rien à la météo. Mais ça promettait de belles photographies, ce temps mouvementé. Les vagues se roulaient avec exaspération sur le sable humide mais personne ne leur prêtait attention. Jimin, assis sur une chaise en tissu, claquait des dents dans son blouson alors qu'on ajustait son maquillage profond et sombre et qu'on essayait de dompter les épis que le vent ébouriffait. Il discutait avec les maquilleurs, rigolant poliment à quelques remarques que les membres de l'équipe lui adressaient. Le photographe pesta au côté du directeur :

MoonChildOù les histoires vivent. Découvrez maintenant