Chapitre 5

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- Asano.

Gakushu se tendit à l’entente de son nom. Il tourna lentement la tête vers Karma et le rouge put lire la détresse dans son regard.

- Qu’est ce qu’il y a ?

- Tu tremble. Tes mains tremblent, je veux dire.

Le roux regarda sa main gauche et vint la lier avec sa main droite pour la dissimuler.

- T’a quand même pas peur de moi ?

- Non.

- Alors quoi ?

- Rien.

- Ça se voit que tu rêves de dire quelque chose alors vas y, lâche toi.

- C’est juste que… Tu crois vraiment que c'est normal, de se parler, là ? Après… Oh tu sais quoi laisse tomber.

- Attends, t'essaie quand même pas de remettre la faute sur moi ?!

- Non mais… Je l’ai pas voulu !

- Encore heureux que tu l’aies pas voulu ! Et maintenant, on est sensé faire quoi, comme si de rien n’était ?!

- C'est ce qu’on a toujours fait, non ?! On fait ça tous les jours, et ça t’a jamais posé de problème !

- Ce qui t’a pas posé de problème, c'est de m’insulter et de me dénigrer l’année dernière ! Et quoi ? D'un coup tu la ramènes plus du coup t’es le saint esprit ?! Hein, pourquoi d'un coup t'a décidé de la fermer ?!

Asano, qui jusqu’ici lui avait tourné le dos, tourna son visage vers Karma. Ses yeux violines étaient au bord des larmes, ses ongles étaient enfoncés jusqu’au sang dans son bras et bien que Karma ne puisse pas la voir, il se mordait la langue le plus fort possible. Il s'humidifia les lèvres et ouvrit doucement la bouche.

- Parce que ça ne sert à rien de jouer la comédie si il n’y a pas de spectateur.

Et il partit d’un pas rapide en s'essuyant les yeux. Karma se mordit la lèvre et donna un violent coup de poing dans la table la plus proche de lui, faisant tourner les regards des personnes aux alentours vers lui. Il envoya un regard noir à une bibliothécaire qui s’approchait de lui avec un air réprobateur et suivit Asano. Il sortit donc de la bibliothèque, et vit Asano dans les bras de Ren Sakakibara, de violents spasmes secouant ses épaules. La vision du roux pleurant déchira le cœur de Karma. Asano pleurait à cause de lui. Combien de fois l'avait il fait pleurer ? Sans doute plus d'une fois. Ren jeta un regard surpris vers le rouge, puis entoura les épaules du roux de son bras et l’entraîna vers sa voiture.

Il resta planté là, regardant la voiture s’éloigner dans la rue. Il s'en voulait. Il s'en voulait terriblement de l’avoir fait souffrir. Et malgré tout, il repensait aux dernières paroles de Gakushu. Bien qu'il se doutait que d’une certaine manière, le roux jouait la comédie, l’entendre le dire clairement lui faisait du bien. Lui aussi avait toujours fait semblant. Ses insultes, ses provocations, tous les mots qu’ils avaient échangés étaient faux, inventés pour dissimuler ce qu’ils pensaient réellement.

- Karma, qu’est ce que tu fais dehors ? Vous avez déjà fini ?

Il se retourna et vit la gérante devant lui.

- Ah, heu, oui, on a déjà fini. Asano vient de rentrer.

- Vous avez été rapide ! Vous formez une bonne équipe, tous les deux, je vais finir par t'engager avec lui !

C'en fut trop. Il s’enfuit en courant, et courra dans toute la ville. Il arriva près du lycée et monta la colline remontant au bâtiment de la classe E. Il cassa le cadenas et ouvrit la porte du bâtiment. Il entra dans la classe et alla automatiquement vers sa place. Il caressa la table du bout des doigts, et se laissa tomber contre le mur. Il replia ses jambes contre lui et enfouit sa tête dans ses bras. Et lui, combien de fois avait il pleuré ?

Il resta longtemps assis au fond de son ancienne salle de classe. Cet endroit était apaisant pour lui. Il y avait tellement de bons souvenirs. Il avait été heureux. En 3E, il avait été heureux pour la première fois depuis des années. Et maintenant, toute cette joie avait disparu. Il était perdu. Il ne savait plus ce qu’il devait faire ou ne pas faire.

Perdu dans ses pensées, il ne vit pas le temps s’écouler. L’après midi était déjà bien avancé quand il se releva. Il sortit de l’école et descendit la colline. Il rentra chez lui et monta dans sa chambre, ayant à peine le temps de constater que ses parents n’étaient pas là.

Ils ne rentrèrent que le soir, après leur rendez vous avec le proviseur du lycée. Ce dernier leur avait parlé du comportement de Karma, et que si cela ne changeait pas, il se verrait obligé de le sanctionner. Le baratin typique des profs. Avec tout ce qu’il s’était passé, Karma se moquait totalement de ce que pouvait penser le proviseur. Il avait seulement hâte que tout se termine.

Deux semaines s’écoulèrent. Les Akabane étaient rentrés chez eux et avaient laissés leur fils seul, et souvent plongés dans ses réflexions. Il n’avait pas reparlé avec Asano, mais le roux hantait souvent ses pensées. Ils se voyaient en cours, et le rouge essayait parfois de capter le regard de son rival, sans succès, et dès qu’il y parvenait, Gakushu détournait le regard. Il restait le plus souvent avec Ren, ne laissant aucune possibilité d’approche pour Karma.

Le rouge n’avait plus d’appétit, il n’arrivait pas à trouver le sommeil la nuit. Il avait perdu quelques kilos et avait des cernes violettes qui lui paraissaient grossir de jour en jour. Et après avoir longuement observé Asano, il pouvait décrire son physique sans même le voir, et constater quelques similitudes entre eux. Lui aussi était assez maigre, et avait des traits fins, presque féminin. Karma passait son temps à observer sa peau pâle, ses cheveux roux, son dos, ses mains et leurs mouvements lorsqu’il écrivait…

En gros Karma s’était presque transformé en prédateur sexuel. Mais ça, il ne l'avouerait jamais. Il ne pouvait pas parler de sentiments alors qu’ils ne partageaient rien. Peut être d’une attirance, mais n’était elle pas là seulement à cause de tout ce qu’il s’était passé ?
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La sonnerie retentit, annonçant la fin des cours de la matinée. Karma rangea distraitement ses affaires, puis posa ses yeux sur Asano, qui parlait à leur professeur de maths. Il attendit que la plupart des élèves sortent, jusqu’à ce qu’Asano reste seul en classe, à défaut de Ren, qui était vers l’entrée de la salle, observant son téléphone. Il se dirigea ensuite vers le roux, ayant tout un tas de phrases à lui sortir. Seulement, arrivé au premier rang, il ne trouva rien à dire.

Asano remarqua la présence du rouge et regarda à l’opposé de Karma, rassemblant ses affaires dans son sac.

- Asano, je…

- Laisse le.

Karma se tourna vers Sakkakibara, qui le regardait froidement, avec de la haine et de la méprise qui se mélangeait dans ses yeux.

- Je t’ai pas parlé, ok ? Alors dégage et emporte ton odeur dégueulasse au passage. T’as trop abusé sur le parfum, on peut plus respirer.
Le prodige s’approcha de lui et attrapa son col.

- Redis ça encore une fois et je te bute, est ce que c’est clair ?

- Ah ouais, tu vas faire quoi ?

- Putain, tu vas le regretter.

Il leva son poing et s’apprêta à frapper Karma, qui le regardait toujours avec son air provocateur. Il commença à rabattre sa main sur la mâchoire de l’ancienne épave lorsque…

- Ren. Arrêtes.

Il interrompit son geste et jeta un regard à Asano, surpris qu’il se soit interposé.

- T'es pas sérieux ? T'as vu comment il me parle ?!

- J'ai vu. Mais on doit y aller.

- Je vais pas le laisser s'en tirer !

- S'il te plaît.

Ren soupira et relâcha Karma, qui regardait Asano d'un air étonné. Le roux prit son sac et se dirigea vers la porte, rapidement suivi par Ren. Alors le rouge tenta une dernière tentative, un dernier essai pour faire rester Asano quelques secondes de plus.

- Pauvre petit chien, t'as que ça à faire qu’être tenu en laisse ?

Mon passé, mon présent et mon futurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant