22. Appréhension

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Better off - Thunder and Snow
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17 mars 1946, quinze heures

Alexander et moi sortons seulement de la chambre. Aucun de nous deux n'avait particulièrement envie d'en sortir plus tôt. Pendant tout ce temps, nous avons beaucoup discuté, nous nous sommes embrassés jusqu'à en avoir mal aux lèvres et ses caresses sur ma peau ont suscité bien plus que de simples frissons en moi. Alors que nous nous rejoignons dans l'un des grands salons, je viens faire sécher mes cheveux mouillés auprès du grand feu qu'abrite le foyer. Le silence qui nous entoure est apaisant, d'autant plus que la pluie battante qui heurte les carreaux résonne en fond. Les crépitements du feu nous accompagne également. Je sens le regard d'Alexander sur moi et tourne la tête vers lui, fronçant les sourcils d'un air perplexe. Il est debout, une main posée sur le dossier d'un fauteuil en Chesterfield marron.

— Pourquoi me regardez-vous de cette façon ? lui demandé-je en remarquant ses yeux pétillants.

Il s'avance vers moi, arrange une mèche de cheveux derrière mon oreille et vient coller ses lèvres contre mon front. Ce geste m'arrache un frisson. Ce dernier remonte le long de ma colonne vertébrale et termine sa course à la base de mon crâne. La chaleur de sa bouche contre ma peau m'électrise. Ses larges mains se posent délicatement sur mes joues, je ferme les yeux et le sens s'écarter. Cependant, ses doigts demeurent sur mon visage. Son souffle caresse subtilement mes lèvres.

— Rien. Vous m'impressionnez de jour en jour, Mademoiselle Wilson.

Je rouvre les yeux puis hausse un sourcil, étonnée.

— Oh. Et qu'est-ce qui vous sidère tant à mon sujet ?

Il esquisse un doux sourire, les flammes dansent dans ses yeux, réchauffent mon dos.

— Votre détermination, votre gentillesse et votre générosité. La guerre ne vous a pas enlevé ce courage qui vous permet de vous lever à chaque aube et cet amour qui fait battre ce cœur brisé, tambourinant sous votre poitrine. Vous restez honnête avec vous-même et c'est ce qui m'attire chez-vous.Vous ne reculez devant rien. Guerre, deuils, rumeurs, peines. Rien ne vous arrête.

Je déglutis et recule, sentant les larmes me monter. En me détournant rapidement, je pousse un long soupir et contemple le feu d'un air vide. Les flammes deviennent sauvages, engloutissent le bois qui craquelle, léché par ce brasier tantôt orangé tantôt rougeâtre. Tout. Les paroles qu'il vient de prononcer. Tout est vrai. Et pourtant, une petite voix me pousse à penser le contraire.

— Si. Il y a bien quelque chose qui m'arrête, le contredis-je en posant mes prunelles sur lui. Magdalena mérite tout le bonheur du monde. Si je suis réellement honnête avec moi-même, comment se fait-il qu'elle ne soit pas là, avec nous ?

Il s'approche, caresse ma joue du bout des doigts puis baisse les yeux et se pince les lèvres. Je peux voir qu'il souffre, que les mots qu'il s'apprête à prononcer ne sont pas ceux qu'il veut dire.

— Parce qu'elle ne le souhaite pas... Je pense qu'elle ne voudra pas venir. Ou il sera difficile de la faire changer d'avis. J'ai déjà tenté...

— Je n'y crois pas une seule seconde. Elle pourrait m'écouter, moi.

Agacée, je m'éloigne pour venir me poster devant une des fenêtres. J'observe la pluie tomber dehors et l'imagine s'abattre sur les épaules de Magdalena, plaquer ses cheveux blonds sur son crâne, transpercer ses vêtements immaculés et creuser de plus gros sillons sur ses joues rebondies. Je ne supporte pas cette vision. Non. Déterminée à la ramener ici, je quitte la pièce d'un pas pressé et décidé. Alexander ne cherche pas à me stopper, il sait que ça ne sert pas à grand-chose. Je dois trouver mon père, je sais qu'il est rentré il y a peu, je l'ai entendu. J'ai besoin de lui en parler. Et lorsque je le trouve dans l'autre salon, un verre de whiskey entre les mains, je me stoppe net. Ce verre d'alcool me coupe le souffle : a-t-il recommencé... ? Ou est-ce pour une simple détente ? Il se tourne vers moi, un sourcil arqué.

Passion EnnemieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant