L'île aux Gemmes

Chapitre 19

                 J'étais allongée sur une pierre glaciale dans une salle dont l'odeur de moisissure devenait étouffante. Tout mon corps me faisait mal et ouvrir les yeux demandait encore trop d'effort. Je n'avais aucune idée de l'endroit où je me trouvais et les souvenirs de la veille me revenaient peu à peu. La bataille. La Tour Blanche. Le port. Kémie. J'étais sûre que c'était elle, en personne qui m'avait assommé. Je n'imaginais pas cette femme mettre sa vie en danger dans un combat, je pensais qu'elle était plutôt du genre à envoyer ses soldats à sa place. Apparemment non. Après une série de rapprochement, je finis par en déduire que j'étais à Furio Camillo, sûrement dans ce grand bâtiment qui devait être leur centre. À partir de l'odeur environnante je misais aussi sur le sous-sol, probablement de vieux cachots extrêmement mal conservés. Je finis pas ouvrir les yeux en douceur. J'étais effectivement dans une petite cellule de prison mais celle-ci n'avait rien à voir avec celle de l'île. Si j'avais trouvé celle du Centre peu accueillante, celle-là était un enfer en comparaison. Mal entretenue, de la mousse commençait à envahir les murs, il y avait seulement un matelas ultra-fin et un drap jaunis en guise de lit, un seau remplit d'eau ainsi qu'une bouche d'évacuation d'eau. C'était tout. J'aperçus derrière les barreaux un homme qui gardait ma porte. Il ne semblait pas très menaçant : il ne dépassait pas les un mètre soixante-cinq, un peu rondouillé, presque la soixantaine et les cheveux hirsutes. Je pourrais facilement le battre... S'il n'était pas armé et moi enfermée... Au bout quelques minutes, il sembla s'apercevoir que j'étais réveillée puisqu'il partit chuchoter quelque chose à l'oreille d'un autre garde quelques mètres plus loin. Il revint se poster devant ma cellule sans m'adresser la parole. J'aimerais bien que l'on m'apporte quelque chose à manger. Je ne savais pas depuis combien de temps je m'étais évanouie mais je sentais mon estomac vide grouiller sous ma combinaison de chez les Invisibles. Cependant, je n'osais demander quoi que se sois. Je m'approchais finalement du seau d'eau pour boire un peu.

« Ne la bois pas, entendis-je dire mon gardien. Il y a du savon dedans. C'est l'eau pour nettoyer le sol. »

Donc cette cellule était nettoyée ! Je n'osais pas imaginer comment elle était en état normal. Ce fut les premiers et les derniers mots que l'homme m'adressa et il ne se donna pas la penne de répondre lorsque j'osais finalement lui demander un peu d'eau. Après tout, ils auraient pu me tuer avant s'ils l'avaient souhaité. Kémie avait donc sûrement un quelconque intérêt à me garder en vie.

Une porte claqua lourdement au bout du couloir sombre et des j'entendis des talons claquer tout en se rapprochant de ma cellule. Ma curiosité m'intimait à m'approcher des barreaux pour découvrir l'identité du nouvel arrivant mais ma fierté m'en empêcha. Je reculais m'asseoir sur le matelas en prenant soin de tourner le dos au couloir. Les talons cessèrent de claquer sur le sol et le couloir revînt au silence complet. Plus un seul bruit, plus un seul mouvement, on aurait pu croire que le temps s'était figé. Je finis par me retourner et tombait nez à nez avec Kémie Black. Contrairement à l'autre soir je la détaillais soigneusement de haut en bas. Elle était extrêmement grande d'autant plus que ses talons lui faisait gagner dix centimètre et on aurait pu croire que sa maigreur la ferait paraître frêle mais au contraire, il s'en dégageait une puissance étonnante tout comme effrayante. Elle utilisait sa posture comme une arme, et son visage dissuadait quiconque de la défier. Elle aurait pu être belle mais ses traits étaient tirés en un rictus provocateur et ses cheveux étaient si noirs qu'il ne faisaient que ressortir la pâleur vampiresque de son visage. Même son nez fin et droit ajoutait à la sévérité de son visage. Je comprenais à présent pourquoi rare étaient ceux qui osaient la défier. Cependant la haine que j'aspirais pour elle suite à la bataille me poussais à lui faire face, je voulais la provoquer. Elle était responsable de la mort de je ne sais combien de personnes, sûrement certaines que je connaissais. Je priais pour que Lucien ne fasse pas partie d'entre eux et si c'était le cas, je me battrais jour après jour pour détruire cette femme.