Instants fugaces

LVII

Je reprends ma respiration et déballe ce que je garde sur le cœur depuis trop longtemps. Kris ne me regarde pas mais je n'ai pas besoin de sentir ses iris posés sur moi pour savoir que toute son attention m'est dévouée.

- Tu n'as aucune idée de ce qu'il se passe dans ma tête, depuis que tu m'as envoyé ton message en étant pété ! Tu m'as avoué tes sentiments sur un coup de tête, tu avais fumé, tu étais à côté de tes pompes et j'ai reçu un coup. Tu m'as dédié une chanson dont les paroles sont putain de profondes. Tu...

Je serre les poings puis ferme les yeux pour reprendre mon calme.

- Tu m'offres toujours tout de toi, de ta personne, de tes sentiments, de ton cœur. Tu ne m'appartiens pas et pourtant, dès que je suis avec toi, je sais que moi, je suis tout à toi. Que ce soit mon âme, mon corps, mes désirs, mes peurs, mes motivations, mes sentiments, tout tient entre tes mains. J'peux pas faire autrement.

Ma langue glisse sur mes lèvres alors que je lève les yeux vers lui mais les siens restent braqués au sol.

- J'ai jamais aimé personne, Kris. L'amour, ça ne signifie rien pour moi. Je ne sais pas ce que je dois ressentir, ce qu'il doit se passer dans ma tête pour comprendre que je suis amoureux de quelqu'un. Ce n'est pas pour te blesser que je... que tes questions restent sans réponse, que ton cœur ne trouve pas le chemin du mien.

Au même moment, son regard plonge dans le mien, bousculant l'entièreté de mes mots dans tous les sens. La flamme qui danse au fond de ses prunelles éveille ce sentiment si fort, celui qui me consume quand il est avec moi. J'ai toujours cru que c'était ça, l'amitié fusionnelle. Ce besoin oppressant d'être avec la personne, de la voir sourire et s'épanouir à nos côtés, de partager son bonheur, ses peines.

Mais peut-être que non. Peut-être que c'est tout autre chose et que j'ai préféré mettre ça sur le compte d'un sentiment qu'il était plus facile d'apprivoiser.

- Apprends-moi ce que c'est, l'Amour.