Instants fugaces

LX

On arrive enfin à l'étape de la recette la plus drôle. Kris met une pincée de sel dans ses blancs d'œuf puis attrape le fouet que je lui tends.

- Et évite d'en mettre partout.

Il grogne avant de se mettre à la tâche. Je ne peux pas nier qu'il a de la force mais dans une minute, il se rendra compte que c'est chiant. Et que c'est sportif, de faire la cuisine. Ca ne loupe pas : trente secondes plus tard, il repose le plat et me lance un regard noir.

- Surtout, ne dis rien.

Je passe mes doigts sur ma bouche et fais semblant de jeter la clef par-dessus mon épaule. Mais mon sourire me trahit. Kris roule des yeux et jette un regard dédaigneux aux blancs d'œufs.

- De toute façon, je suis sûr que ça sert à rien, cette merde.

- Si, ça rend les pancakes plus moelleux et gonflés. Allez, pousse-toi, je vais le faire.

Une dizaine de minutes plus tard, on commence enfin à faire cuire les mini crêpes. Kris termine de s'essuyer les mains et se faufile dans mon dos, humant l'odeur.

- Ca sent trop bon, j'ai faim.

- Va falloir attendre.

Il ricane et je me crispe en reconnaissant ce timbre. Ce fourbe a une idée derrière la tête. Ses mains se posent alors sur mes hanches et il se colle à moi. Mes joues prennent feu : maintenant que mon esprit a pris conscience de ce qu'il se passe réellement entre nous, je ne sais plus comment me comporter.

- J'ai besoin de te l'entendre dire Chad. Un simple signe de tête ne me garantit pas que tu acceptes de me laisser libre de faire ce que je veux.

Je me lèche les lèvres alors que ma bouche s'assèche. Putain, je perds mes moyens, c'est affreux ! Et le fait de me rendre compte que ce n'est pas la première fois que ça arrive me donne une claque en pleine tronche. Plus d'une fois j'aurai dû avoir la puce à l'oreille que ce qu'il se passe entre nous n'a rien d'amical. Mais je suis resté aveugle aux signes que m'envoyait mon corps.

- Si... si je te dis oui, est-ce que... qu'est-ce que...

- Mais c'est que tu as perdu ta langue de vipère !

J'enfonce mon coude dans son torse quand il resserre ses doigts sur mes hanches, riant contre mon oreille. Bordel, je suis incapable de prononcer une phrase censée. Je capitule et soupire alors que Kris passe ses bras autour de moi, ses mains sur mon ventre.

- Tu me fais confiance ?

- Plus qu'à n'importe qui.

Ma réponse le fait sourire contre mon cou. Je n'ai pas besoin de réfléchir une seconde pour ça. Et c'est en en prenant conscience que je sais qu'accepter de lui laisser les rênes ne sera pas un problème : Kris fera toujours attention à moi.

- Montre-moi à quel point tu m'aimes.