Chapitre 18 - Joie ou déception ?

2.4K 360 333
                                    

— Veuillez m'excuser pour le retard.

Cette voix grave tira Alisée de sa rêverie. Perdue dans les chandelles qui brillaient sur le lustre du grand hall, elle ignorait exactement depuis combien de temps elle patientait. En début de nuit, Nessa était venue à sa chambre pour sa prise de sang quotidienne, puis l'avait informée qu'elle devait se rendre dans l'entrée du palais. Un garde était censé l'y attendre, mais à son arrivée, personne ne s'y trouvait.

— Ce... Ce n'est pas grave, répondit-elle alors qu'elle pensait tout l'inverse.

Il lui avait été impossible de fermer l'oeil de la journée. Désormais, il ne lui restait plus que quelques heures avant d'enfin obtenir les réponses qu'elle cherchait. Même son livre n'avait pu suffisamment la captiver pour la déconcentrer de ses pensées.

Cependant, le soldat qui lui faisait face réussit à lui faire songer à autre chose qu'à son frère et sa soeur.

Il s'agissait du garde aux si troublants yeux bleu-vert, qui s'était battu en duel contre Beatricia. L'un de ceux qui suivaient comme son ombre la princesse Isabella.

— Je suis chargé de vous escorter jusqu'à la capitale, déclara-t-il d'un air bourru. À partir de maintenant, vous êtes sous ma protection.

Au froncement de ses sourcils bruns et à la certaine lassitude qui planait dans sa voix, on devinait clairement que personne ne lui avait demandé son avis au sujet de cette "mission". Et la belle vampire ne pouvait que compatir à son sort : si d'ordinaire il était assigné à la sécurité de Son Altesse, pourquoi se retrouvait-il à jouer les chaperons auprès d'une pauvre réserviste ?

Afin de te surveiller, murmura une voix dans l'esprit d'Alisée. Après tout ce qu'elle avait appris la veille quant à la manière dont était gouverné ce royaume, il aurait été embêtant qu'elle s'échappe pour crier ces informations sur les toits. Il devenait évident que lorsqu'elle chercherait à quitter le palais, cela ne s'avérerait pas une mince affaire...

Mais elle aviserait le moment venu.

Sans plus faire de discours, le garde lui indiqua de la suivre. Il s'engagea dans de petits couloirs étroits, qui rappelèrent quelque chose à l'immortelle. Quand une odeur d'humidité lui parvint au nez et qu'elle commença à repérer des toiles d'araignées, elle comprit qu'ils traversaient la partie du château réservée au "public". Celle où se rendait le peuple afin d'assister aux Conseils d'Attribution, ainsi que pour peut-être réclamer des audiences au souverain. Le mirage, comme elle l'avait compris la nuit de son arrivée.

Sauf qu'en réalité, la laideur de ces lieux représentait bien plus la pourriture qui rongeait les dirigeants que les jolis lustres et les sublimes bibliothèques.

Le garde poussa une affreuse porte métallique, puis ils se retrouvèrent à l'extérieur. Alisée reconnut la triste cour par laquelle elle était passée lors de son entrée au palais. Le lierre grimpait toujours le long des murs gris, nulle eau ne coulait dans la fontaine de granit... Après avoir vu la splendeur des jardins royaux, ce petit espace lui paraissait d'autant plus maussade.

Quand le soldat ouvrit les grilles sculptées en motifs de roses, leur grincement troubla le silence. Un carrosse tiré par quatre chevaux noirs attendait de l'autre côté.

— Je vous en prie, fit le garde en tirant la portière.

Il ne lui proposa pas sa main pour l'aider, mais la réserviste ne fit aucun cas de ses manières. Elle bondit presque dans le véhicule, pressée qu'il se mette en route. Ce fut ce qu'il fit une fois les deux passagers montés à bord.

Sang de Rose [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant