Épilogue

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• Cinq ans plus tard •

— Où est-ce que je vous dépose ça ?

Le livreur peinait à traîner son chariot, sur lequel était juchée une caisse en bois. Cette dernière devait peser le poids d'un ours, s'il fallait s'en tenir à la grimace du pauvre jeune homme.

— Devant cette table, cela ira très bien, lui indiqua Alisée en s'empressant de venir à sa rencontre.

Occupée au fond de sa librairie, elle avait à peine entendu la clochette tinter au-dessus de la porte d'entrée. Elle lui désigna un étal chargé de livres colorés, où subsistait une petite place pour les précieux ouvrages qu'elle attendait.

— Ne vous embêtez pas, je me débrouillerai, assura-t-elle au garçon qui entreprenait d'ouvrir la caisse. Vous allez prendre du retard et...

— Ne vous en faites pas, cela ne m'embête pas du tout, l'interrompit-il de son accent chantant. Il ne faudrait pas que vous vous fassiez mal pour votre premier jour de reprise ! C'est un plaisir de vous revoir, d'ailleurs !

Elle lui sourit, touchée. Les derniers mois l'ayant contrainte à ne plus être très présente à la boutique, les clients et livreurs qu'elle connaissait bien lui avaient incroyablement manqué. Tout en retirant les clous du couvercle de bois, le jeune homme prit la peine de s'enquérir de son état. Elle lui indiqua qu'elle se portait à merveille, bien qu'elle soit toujours quelque peu fatiguée. Il lui proposa même de l'aider à ranger les livres contenus dans la caisse, ce qu'elle refusa après l'avoir remercié.

Une fois les formalités de livraison réglées, le garçon s'en alla et elle contempla les magnifiques ouvrages à la couverture rouge foncé. Elle attrapa un premier exemplaire, dont les dorures scintillèrent sous les rayons du soleil, qui transparaissaient depuis la vitrine. La Dernière Rose, lut-elle en réprimant un petit sourire. Le nom de l'auteure était inscrit juste en dessous d'une belle illustration, représentant la fleur éponyme.

Elle ne put s'empêcher de feuilleter les premières pages de ce roman qu'elle connaissait déjà, curieuse de voir ce que donnait une telle version éditée. Elle s'attela ensuite à soigneusement empiler les livres sur la table consacrée aux nouveautés, qui se logeait juste devant l'entrée. Quand la caisse se retrouva vidée de moitié, elle essaya de la soulever pour l'emmener dans la réserve, mais manqua de se coincer le dos. Elle se contenta donc de la pousser sous l'étal, en prenant garde à ne pas trop rayer le parquet.

En règle générale, elle aimait que sa librairie soit la mieux tenue possible. L'endroit était de taille plutôt moyenne et s'étirait en longueur jusqu'à un petit coin bibliothèque, situé au fond de la salle et éclairé par quelques bougies. Des livres aux dos multicolores s'alignaient sur les étagères qui tapissaient les murs, créant une douce ambiance chaleureuse dont Alisée ne se lasserait jamais. Elle doutait aussi d'être un jour blasée par la rassurante odeur de papier, qu'elle respirait pourtant depuis plus de trois ans.

Elle s'arrangea pour dissimuler la disgracieuse caisse de bois au-delà des pans de la nappe blanche, puis entendit une petite cloche sonner derrière elle. La porte s'ouvrit sur une jeune fille blonde, qui poussa une exclamation en découvrant la libraire.

— Vous êtes revenue ! s'exclama-t-elle en tapant dans ses mains.

Antonella était l'une de ses plus fidèles clientes, qui passait la voir au moins une fois par semaine. Âgée de quinze ans, elle était souvent accompagnée par sa mère, qui justement faisait son entrée.

Sang de Rose [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant