La guerre est terminée. Les neuf Royaumes Unis d'Ebôran ont été vaincus. La maison Beodan, éradiquée. L'Ordre du Dragon, anéanti.
Depuis dix-sept ans, les peuples d'Ebôran, privés de leurs Manipulateurs, sont soumis aux dures lois impériales. Depui...
Légendes parmi les légendes. Leur seul nom suffit à provoquer chez les habitants d'Ebôran les valeurs les plus nobles : respect, honneur, savoir et pouvoir. Les bardes et les poètes chantent leurs louanges depuis des temps immémoriaux.
Mais nous sommes plus que des légendes. Nous sommes les gardiens de la paix. Si un jour notre Ordre disparaît, alors le monde sombrera dans la guerre et le chaos. »
Extrait du journal de bord de Servan Balerion, Chevalier de l'Ordre du Dragon.
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Saren se réveilla avec le goût ferreux du sang dans la bouche.
Le front moite, la respiration saccadée et les muscles douloureux, il comprit qu'il venait de vivre une nouvelle crise et que celle-ci avait été particulièrement violente. Il s'en était mordu la langue. Sûrement pendant ses convulsions. Puis, il avait dû sombrer dans le sommeil, ou plutôt dans l'inconscience, jusqu'à ce que le premier rayon de soleil ne le tire de cette nuit cauchemardesque.
Saren s'assit sur le lit avec prudence. Il guettait l'arrivée d'autres symptômes désagréables, comme les nausées ou un mal de tête. Il s'humidifia les lèvres en quête de salive, mais sa gorge était sèche comme un vieux parchemin. Un liquide visqueux et nauséabond lui emplit la bouche, semblable à de la bile. Saren se saisit d'un tissu pour cracher. Il découvrit avec un mélange de peur et d'incompréhension des glaires noirs et épais. Cette vision l'écœura et lui donna envie de vomir.
Inquiet, Saren s'arracha de ses couvertures et se leva, les jambes flageolantes. Il dut s'adosser au mur le plus proche pour ne pas défaillir. Il tenait à peine debout. Pour se calmer, il régula sa respiration avant de s'installer à la petite officine dont il disposait dans la chambre d'auberge exigüe qu'il partageait avec trois autres collègues. Ceux-ci dormaient encore, chanceux de ne pas subir la même tourmente que lui. Ils ronflaient, heureux de bénéficier d'un sommeil réparateur pour quelques minutes encore. D'ici quelques instants, le contremaître de leur chantier – un homme à l'allure vile et désagréable – viendrait les réveiller à grands coups de tambour et de vociférations. Ils descendraient tous dans la grande salle, prendraient leur maigre collation sans piper mot et partiraient vers la mine à bord de charriots étroits et mal entretenus.
Aussi, Saren préféra profiter des quelques minutes de calme qui lui restaient.
Un feu-follet bleuâtre apparut à côté de lui. Saren ne tourna même pas la tête : il savait qu'il s'agissait simplement de son Spectre, une entité fantomatiques qui veillait sur lui et le protégeait, sous sa forme dématérialisée la plus faible. S'il était connecté en permanence à son esprit et demeurait invisible la plupart du temps, le Golem des Abysses pouvait, à l'instar de tous les Spectres, apparaître sous diverses apparences : simple boule de feu-follet, comme maintenant, ou alors avec le corps qu'il avait une fois matérialisé dans le monde physique, mais en transparence. C'est-à-dire un géant de roc et d'eau de plusieurs mètres de hauteur. Comme cela ne dégageait presque pas de Pouvoir, c'était une façon pratique pour un Manipulateur de parler à autre chose qu'à du vide.