Chapitre 28

3.5K 338 50
                                    

Dissimulé dans l'ombre, Grayson attendait qu'Ambre sorte de la boutique. Il évitait de répondre aux remarques impertinentes de Lïa, assise près de lui. Il gronda d'impatience. Voilà presque une heure qu'il faisait le pied de grue et il avait de plus en plus de mal à supporter les rafales glaciales et les flocons qui tombaient sans cesse sur lui. Son sang bouillonnant dans ses veines aurait suffi à faire fondre toute cette maudite neige.

Pourquoi les femmes ressentaient-elles ce besoin primordial de faire attendre les hommes ? Il ne les comprendrait jamais et n'en avait aucune envie. Sa soeur avait l'art et la manière de jouer avec ses nerfs déjà mis à rude épreuve après sa discussion avec Caelan. Ses objectifs dans un ordre concrets étaient de récupérer sa sœur, de la renvoyer directement au château sans autre forme de procès, de rencontrer Kara O'Connor et de prendre ses fonctions de gardien auprès d'elle en attendant le retour hypothétique de Dale.

Tout ça s'annonçait bien mal, médita-t-il en jetant pour la dixième fois un coup d’œil sur sa montre.

– Pourquoi n'entrons-nous pas dans la boutique, Herre ? Chuchota Lia d'un ton plaintif.

– Nous sommes parfaitement à l'aise ici, rétorqua-t-il sèchement.

– Mais j'ai froid moi !

Agacé, il siffla entre ses dents. Les femelles – peu importe leur race – commençaient sérieusement à lui courir sur le haricot. Sans arrêt, elles se plaignaient, gémissaient et parlaient sans que l'on ait besoin ou simplement envie d'écouter leur avis. Le bruit d'un moteur résonna dans la rue déserte, coupant court à ses pensées. Personne n'osait s'aventurer dehors par ce temps de chien, hormis les fous dans son genre. Sa curiosité piquée au vif, il s'avança sans divulguer sa présence et détailla la jeune femme sortant de la boite de conserve qui lui servait de voiture. Pourquoi les femmes adoraient ce genre de véhicule totalement inutile ? Un bon vieux 4x4 aurait été beaucoup plus pratique pour circuler dans la neige.

Va savoir ce qu'il y a dans la tête d'une femme, se fit-il la réflexion. Il chassa ses préjugés et observa la jeune femme. Elle était minuscule en comparaison de son mètre quatre-vingt-dix-huit et cela le fit sourire. Un seul regard sur lui et elle s'enfuirait en courant. Il retint un éclat de rire en évaluant sa silhouette menue. Elle portait un long manteau noir qui caressait ses chevilles. Un souffle de vent l'entrouvrit et il remarqua des bottes de cuir souple enserrant des mollets bien galbés. Sa chevelure argentée ? Non, il n'avait pas la berlue, ses cheveux attachés en tresse et qui tombaient gracieusement sur son épaule étaient bel et bien argentés. De là où il se trouvait, il lui était impossible de discerner son visage.

Dommage, il aurait bien aimé apercevoir ses traits. Soudain, elle se retourna, en serrant son sac contre sa poitrine et regarda dans sa direction. Pétrifié, il sentit son cœur battre à coups redoublés. Cette jeune femme avait un visage à l'ovale parfait, des pommettes hautes, des lèvres sensuelles, des yeux opalescents et un petit nez délicat. Sans aucun doute possible, il sut que cette femme était la fille de la déesse Taline tant leur ressemblance était frappante. Sa beauté rivalisait sans peine avec celle de sa mère. Pas étonnant que Dale soit tombé fou amoureux d'elle. Sans savoir pourquoi, il fut pris d'une subite envie de faire sa connaissance, de l'aborder et de savoir si sa voix était aussi douce et veloutée que celle de Taline. Il fit un pas en avant, mais fut aussitôt arrêté par Lïa. Elle le fixait en montrant les crocs, visiblement mécontente.

– Tu n'as pas le droit de nourrir de telle pensée !

– Sors de ma tête, petit monstre, grommela-t-il.

– Elle est la compagne de Dale St James et de nul autre.

Il ne cherchait pas à séduire cette fille ! Lïa le toisa d'un air furieux. Il ravala des paroles acerbes et réalisa tout à coup l'horreur de son comportement. La honte s'abattit sur lui. Bordel de merde, elle lui plaisait et ça le dégoutait de lui-même.

Sombres Héritages-1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant