Chapitre vingt-cinq

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Alexane ne tint pas plus longtemps et retourna vite au chevet de son père. Elle était intriguée par ce que lui avait dit Nicolas: le prince n'avait pas une vie facile... Ces paroles lui avaient fait prendre conscience d'une chose: elle ne connaissait en réalité pas le prince, elle ne savait rien de lui. Nicolas parlait-il de la relation du prince avec Marie ou y avait-il autre chose qu'elle ignorait ? D'ailleurs, la princesse, où était-t-elle ? Pendant un court moment, une idée folle traversa l'esprit de la jeune femme: le prince était gentil mais parfois instable, aurait-il fait du mal à la princesse dans son infini tristesse ?

Non, impossible. Alexane était fatiguée, cela devait causer ces improbables pensées. Elle tenta de penser à autre chose, à son père, elle retourna à son chevet. Comme à son habitude, elle resta plongée dans ses pensées, quand soudain elle sursauta: il lui sembla que le comte avait bougé, un tout petit geste, certes mais cela emplit la demoiselle de bonheur. « Père ? » chuchota-t-elle. Nulle réponse mais il lui semblait voir ses doigts trembler très légèrement. Elle savait que, parfois, les personnes inconscientes pouvaient très légèrement bouger, des sortes de réflexes musculaires. Cela ne voulait certainement rien dire mais, elle avait l'impression que son père n'était pas si loin d'elle...

Il fut bientôt l'heure du souper, l'on vint toquer à la porte de la chambre.

« Le repas est servi, dit Philippe.

— Je n'ai pas faim, répondit machinalement Alexane. Je ne veux pas le laisser seul.

— Et une seule de ces affirmations est vraie, je me trompe ? »

Elle ne répondit pas. C'était trop tôt, beaucoup trop tôt pour essayer de se racheter. Le silence de la jeune femme ne faisait que torturer un peu plus les émotions du prince. Il fit comme à son habitude, caché derrière son sourire enfantin, et continua à parler. Toute sa vie n'était qu'une pièce de théâtre, cachée derrière un masque. Les seules fois où il l'avait enlevé pour se montrer véritablement, avaient mal tourné, très mal. Mais il continua de sourire. « Je m'en doutais... » Il sortit alors de sa poche deux miches de pain et deux pommes. « C'est assez frugal mais cela nous rappellera nos étapes dans les bois. » Alexane laissa échapper un léger sourire, c'était peu mais cela valait de l'or pour le prince, son amie souriait... Il lui donna une des pommes et une miche de pain.

« Merci Philippe, répondit-elle faiblement.

— Puis-je me joindre à votre repas ?

— Oui, acquiesça-t-elle en souriant faiblement à nouveau. »

Il s'assit sur le sol face à Alexane. Il y eu un court silence.

« Je suis désolé pour tout ce..., tenta le prince.

— N'en parlons pas, répondit directement la jeune femme. »

Le feu crépitait dans la cheminée, Alexane se sentait étrangement bien... Le prince était gentil, amusant... Comme avant.

« Le château est calme..., chuchota Alexane.

— Il faut dire que vous et votre père ne faites pas beaucoup de bruits, répondit le prince avec un léger sourire.

— Puis-je vous poser une question, Philippe?

— Bien entendu, répondit-il en souriant.

— Cela fait quelques jours que nous sommes arrivés à Champigny et...

— Et ? demanda le prince.

— Je n'ai ni vu ni entendu parler de la princesse... »

Le jeune homme ne répondit pas tout de suite, un silence assourdissant régnant dans la pièce. Encore une fois il tenta de cacher ses émotions: il n'y arriva pas. Ses yeux s'emplirent de larmes. « Philippe, que se passe-t-il ?! » s'inquiéta Alexane.

Alexane de ChabannesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant