Chapitre vingt-et-un

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Alexane était pétrifiée, ce bain de sang lui rappelait tellement la mort de sa mère... François lui aussi était apeuré, mais il ne pouvait pas se lamenter. Il devait protéger sa fille. Alors, il prit celle-ci par le bras et l’entraîna hors de l’écurie.

« Fuyons ! s’exclama-t-il avec précipitation.

– La paix avait été signée… Signée… murmura compulsivement la jeune femme.

– De suite ! »

Ils n’avaient guère où aller, les catholiques semblaient être partout, prêts à assassiner toute personne semblant être de la réforme. Ils coururent le plus vite qu’ils purent toute en essayant de ne pas attirer l’attention. Alors qu’ils dépassaient une grande maison, des cris de femme résonnèrent. Derrière eux, des guerriers s’en prenaient à une protestante, enceinte, seule et sans aucun moyen de se défendre. Le comte ne put continuer sans l’aider. Cette femme lui rappelait celle que lui-même avait tuée trois ans auparavant, mais aussi sa propre femme, assassinée par des catholiques alors qu’il n’était pas présent pour la défendre. Oui, cette femme aurait pu être Elisa… 

Il analysa la situation très vite: Il serait seul contre de multiples assaillants. Enfin, seul… Non. Sa fille était à ses côtés. Ce n’était pas forcément pour le rassurer. Il avait eu l’occasion de constater qu’elle était plutôt habile, mais il avait peur de la perdre, elle aussi, et savait pertinemment que leurs chances de survivre à ce combat seraient minces. Mais il connaissait très bien Alexane. Elle partageait son altruisme et sa détermination, et était tout comme lui très affectée de la mort de sa mère. Même si, espérant la protéger, il décidait de ne pas s’interposer; elle l’aurait sans aucun doute fait elle-même. 

Il n’hésita pas une seconde de plus, prit son arme et attaqua le catholique qui, par surprise, lâcha sa victime. Trois compagnons du soldat rappliquèrent immédiatement, bien décidés à porter secours à leur ami. Alexane accourut à son tour aider son père. Elle parvint à blesser un des hommes au bras et a en désarmer un autre. Cependant, elle et son père étaient toujours inférieurs par le nombre. Conscient qu’ils ne pourraient pas retenir longtemps ce groupe de catholiques, François hurla à la huguenote (et peut-être aussi à sa fille, même si il savait cela vain) : « Fuyez ! » La femme ne se fit pas prier, en revanche, Alexane, comme il s’y attendait, resta au côté de son père. L’homme qu’elle avait blessé avait battu en retraite, mais les autres ne semblaient pas vouloir faire de même. La jeune femme faisait de son mieux pour repousser l’ennemi. Dans son dos, le comte faisait de même.
 
«  AAAARGH !!!  »

L’ennemi avait profité d’une seconde d'inattention pour enfoncer sa rapière dans le torse du comte qui s’écroula sur ses genoux. 

«  PÈRE !  » s’écria Alexane.

D’une main tremblante, il toucha sa blessure, d’où s’écoulait beaucoup de sang. « Alexane… Vas-t-en... » murmura-t-il. Le monde sembla s’arrêter autour de la jeune femme. La guerre venait de lui prendre son père comme elle avait prit sa mère… 

Au même instant, des bruits de chevaux galopant sur le pavé résonnèrent dans la rue : “Arrêtez!, hurla un homme dont elle reconnut la voix. Ceux-là, ils sont à moi!”
Cet homme, Alexane le reconnut: devant elle, arme à la main, maculé de sang, sourire narquois, se tenait Henri de Guise. Le groupe d’homme partit en courant sans protester , abandonnant Alexane près du corps de son père. La jeune femme se jeta à genoux à ses côtés, ne parvenant pas à retenir ses larmes. Ce qu’elle voyait lui glaçait le sang:”
- Tiens, tiens, tiens, résonna la voix d’Henri. Mais ne serait-ce pas cette peste de huguenote…?” 
La blessure était profonde et le sang coulait abondamment sur le pourpoint du comte, mais tout du moins son coeur battait-il toujours. Pour Mademoiselle de Chabannes, plus rien n’avait d’importance à part son père. Elle posa la tête de celui-ci sur ses genoux et tacha de se souvenir de ce qu’elle savait de la médecine:”
-La huguenote qui montre mes lettres au prince?, continua-t-il”.
La blessure étant au torse, elle ne pouvait faire de garrot. Elle déchira la chemise et compressa la plaie. Le flot de sang s’atténua un peu. Alexane était tellement concentrée qu’elle ne fit pas attention aux menaces du duc, ce qui l’agaça fort:” 
- Alors…, dit-il avec condescendance. On a tué ton Père? Ne t’inquiète pas, j’aime réunir les famille”.
Il leva son arme et Alexane ferma les yeux. Convaincue que sa mort était proche et inévitable, elle serra le corps de son père de toute ses forces. Pourtant, alors que tout semblait perdu, un cri perçant vient interrompre le jeune homme:

Alexane de ChabannesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant