Les deux jeunes femmes restèrent seules au château. La crainte d'Alexane vis-à-vis du départ de son père ne cessait d'augmenter. Le bruit courait que le duc d'Anjou était homme à tout comprendre, mais était-ce la vérité ? Et si ce dernier, en voyant le comte de Chabannes, décidait de le tuer ? Alexane ne pouvait s'empêcher de penser au pire. Le prince de Montpensier, lui aussi, manquait à la jeune femme. Cela faisait plusieurs mois qu'elle ne l'avait pas vu. Son caractère naïf et enfantin mettait auparavant un peu de joie dans la vie du château. Oui, Alexane appréciait le prince. Force est de constater qu'ils étaient devenus bons amis. Le comte avait tellement parlé de cet ami à sa fille, qu'Alexane semblait le connaître depuis des lustres. De même, le prince avait côtoyé le comte pendant tant de temps, et le caractère d'Alexane, excepté son arrogance, ressemblait tant à celui de son père; que le jeune homme avait l'impression de connaître la fille de son ami depuis bien des années.
Mais voilà, ces gens étaient partis à la guerre, et Alexane n'était point sûre de jamais les revoir.
Les longues années où elle avait vécu seule, dans l'attente du retour de son père, l'avaient habituée à la solitude. Elle en était même venue à l'apprécier. En revanche, Marie n'aimait guère être seule et souhaitait sans arrêt s'entretenir avec elle. Chaque jour, la princesse lui demandait comment elle allait , si elle souhaitait l'accompagner dans ses sorties, si elle pouvait lui enseigner les astres comme le faisait le comte... Chaque fois, Alexane restait de marbre. Elle ne détestait pas madame de Montpensier, mais elle ne l'appréciait guère plus, elle n'aurait pas su dire pourquoi. Les deux jeunes femmes étaient sages, belles, et vivaient librement au risque de désobéir aux ordres, aux lois et aux coutumes. Leur caractères étaient parfois similaires, et pourtant, Alexane ne parvenait pas à s'entendre avec Marie.
Un jour, cependant, la princesse vint lui demander de l'aide pour écrire à son mari, le prince. Sachant que c'était son père qui avait dit à la princesse d'écrire, la jeune fille ne put se résoudre à refuser, et aida la princesse. Dès lors, elles devinrent un peu plus proches, mais Alexane resta tout de même assez distante. Force est de constater que Marie n'écrivait pas très bien. Elle ne savait bien tenir la plume et formait mal les lettres...
Les mois passèrent, et elles se supportèrent un petit peu plus.
Un jour, les deux jeunes femmes étaient dans la cour. Alexane regardait les champs qui dansaient au gré du vent, et pendant ce temps, Marie cueillait des fleurs afin d'en faire un bouquet. Soudain, la première entendit le bruit répétitif et rapide des sabots de chevaux sur le sol, comme si des cavaliers arrivaient au galop. Elle pensa dans un premier temps qu'il s'agissait du prince et du comte qui revenaient enfin de la guerre. Cependant, elle eut peur de se faire trop d'illusions et n'y prêta pas plus d'attention que nécessaire. Pourtant, quelqu'un s'approchait bel et bien du château. Alexane plissa les yeux et reconnut le cheval de son père, ainsi que celui du prince. C'était bien eux.
« Marie ! cria la jeune fille. Ils sont de retour, le prince et mon père !
– En êtes-vous sûre ? interrogea la princesse en s'approchant.
– Oui ! Ne reconnaissez-vous donc pas Philippe ? » s'étonna-t-elle en désignant les deux cavaliers au loin.
Madame de Montpensier parut ne pas comprendre.
« Philippe ? répéta-t-elle
– Oui, Philippe, le prince, votre époux.
– Vous l'appelez Philippe ?
– Il... bafouilla Alexane en rougissant. Il m'en a donné le droit ! Père et lui sont des amis très proches, et les amis de père sont mes amis.
– Je ne savais même pas son nom... soupira la princesse. Je l'ai appelé "monsieur" ou plus simplement "vous", jamais je ne l'ai nommé par son prénom ! Comment peut-on être marié à quelqu'un qui nous est à ce point étranger ?! »
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Alexane de Chabannes
Fanfic« Vous disiez donc qu'une femme vous a transmis... risqua la Princesse - Je n'ai pas dit cela, répondit aussitôt Monsieur de Chabannes. - Cette femme que vous cachez, c'était votre femme ? demanda Marie. » Oui, Monsieur de Chabannes a une femme, en...